De la gentilesse

petisaintleu

Gentil a deux origines antagonistes. D'un côté, nous trouvons l'adjectif latin gentillis, de la race. De l'autre, il vient de gentilles, le pluriel de gentille, les barbares, terme issu de la Bible pour désigner les « non-juifs ». Avec le temps, il a pris d'autres significations. Son premier sens s'adresse à une personne aimable. Le deuxième désigne, mais il est très peu usité de nos jours, un noble, ce qui a donné gentilhomme. Enfin, on peut aussi, et surtout, mettre en exergue le simplet, le benêt, l'abruti de base.

Ainsi, je suis très ennuyé quand, en entretien de recrutement, on m'interroge sur mes points forts et mes points faibles. C'est symptomatique d'ailleurs que dans l'immense majorité des cas, ce ne soit pas le terme d'axe de progrès qui soit privilégié. En effet, si je me qualifiais de gentil, dans la logique d'un axe de progrès, je pourrais expliquer que, certes, je suis un peu jacques (notez que je n'ai rien contre ce prénom ; il est ici utilisé dans son sens commun. Je n'ai pas dit non plus que les Jacques étaient insignifiants) sur les bords, mais que je fais des efforts pour connecter mon cerveau à mon cervelet et pour devenir un antonymique vilain, issu, lui, du latin villa, la ferme. Effectivement, ça me cloue le bec. Il faudrait donc que je perde de mon urbanité ? C'est-à-dire perde de ma civilité ? De là à me dire que je serais d'ici peu de mœurs barbare, il n'y a qu'un pas. Ce qui du coup, si l'idée me venait d'aller me promener en Judée il y a deux milles ans, me ferait passer pour un gentil ! Et, qu'adviendrait-il si mon interlocuteur était trotskiste (oui, nous sommes dans une fiction) ? Subirais-je ses railleries d'avouer que je prends ma noble extraction comme un signe d'adoubement à sa philosophie politique ?

Qu'en serait-il si je revendiquais ma gentillesse comme un point fort ? Si on reprend la définition sous l'angle du corniaud, là, il est clair que je serais définitivement grillé, comme une andouille. Mon sourire serait-il immédiatement interprété comme un signe inquiétant de crétinisme ?

Ah, cruel dilemme ! Je devrais donc taire ma bienveillance ? Pourtant, je ne me sens ni candide, ni faible, ni manquant de caractère. Je ne suis qu'un commerçant. Il m'a toujours semblé naturel qu'être sympathique et obligeant étaient des valeurs essentielles pour accueillir mes clients. À défaut de quoi, j'aurais postulé pour un poste de guichetier dans une administration. Mais, je ne suis pas benoît (ni jacques d'ailleurs). J'assume donc pleinement mon intention de rester attentionné et de ressasser que, non, la gentillesse n'est pas synonyme de faiblesse et qu'elle n'est pas incompatible avec une exigence qui est une des composantes de mon métier de manager.

  • Assumons notre gentillesse ! Oui à "trop bon", non à "trop con" ;-)

    · Il y a environ 9 ans ·
    Yeza 3

    Yeza Ahem

  • Méfions-nous des journées de la gentillesse, dès fois elles tournent mal...

    · Il y a environ 9 ans ·
    P1000170 195

    arthur-roubignolle

  • Sauf erreur, gentil a pour seule origine étymologique le Latin : le latin chrétien (gentiles)- biblique dirons nous - ayant emprunté au Latin classique (gentilis). Et, dans les deux cas, il vient de "gens, gentis", mot latin qui signifie "la famille, le clan".
    Cette parenthèse étymologique étant fermée, j'aime ces mots dont le sens a tant évolué avec les siècles. Le gentilhomme prisé des Dames du temps jadis a disparu et le "garçon gentil" qui l'a remplacé passe souvent pour un type un peu niais. Et pourtant, n'avons-nous pas toutes un jour chanté ce "joli coquelicot, Mesdames"...
    Un commerçant aurait intérêt à s'armer de gentillesse. Comme le disait Al Capone, qui n'était pas un modèle en ce domaine : “On peut obtenir beaucoup plus avec un mot gentil et un revolver, qu'avec un mot gentil tout seul.”

    · Il y a environ 9 ans ·
    Couv2

    veroniquethery

  • Avec toute mon honnêteté habituelle, mais je suis blonde, apparemment, et en vrai aussi, je suis d'une crédulité à en découdre les chausses des gentilles, dans tous les sens du terme, imaginer un manager gentil est une nouvelle extraordinaire à elle toute seule, bravo!!!! ;0)

    · Il y a environ 9 ans ·
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    flodeau

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