Au fil de l'eau

Susanne Derève

Côte de brume couleur de métal et de craie
Rade de Brest
Dimanche
Au mois de Mai
 
Dans le ciel pétrifié, grands oiseaux malhabiles
Les grues montent la garde de leurs bras immobiles
Sur le béton des quais
Sur l'eau le vent se tait
 
Jeux de cubes, ventres pansus des silos et citernes
Tas de sable et de soufre, balances et poternes
Rails et wagonnets que butine la rouille
Sur l'herbe des pavés
 
Le vent se tait
La mer est lisse sous le flanc des cargos
Dans le port militaire,
L'ombre du Clemenceau balance jusqu'à terre
Tandis que les badaux s'en vont le nez en l'air
Nonchalants et falots
                                                    
Grasses odeurs de varech et de vase                
Noires défroques des barbes du jusant
Tels des charognards, les goélands
S'en vont, s'en viennent et repassent
Frôlant d'une aile rase
Les berges de l'estran                           
 
Mais que le vent se lève
Alors les grands navires, lentement,  appareillent,
Vers Molène et Ouessant
Voiles ourlées de brume,
Tels des astres laiteux que le soleil allume,
Aux portes du couchant.
 
 
 
Côte d'Iroise couleur de métal et de chaux
Rade de Brest
Dimanche
Au fil de l'eau
 

2009
 

 
  • "D'autres villes"


    Pendant la nuit, qui s'enfonce entre violet et silence,
    Clignotent encore quelques néons,
    Leur reflet alternativement vert et jaune
    Sur l'asphalte mouillée. Têtus.
    Les baraques du chantier du port, désertées.

    Et au loin le flux chuintant des voitures,
    Les boucles de l'échangeur éclairées d'orange.
    Cependant les nuages sournois masquent alternativement une lune.
    Un oeil fixe, cloué là haut.
    Il nous dit la présence solaire, - ailleurs.

    Ailleurs à l'opposé de la terre.
    Sous d'autres climats.
    Avec d'autres langues.
    Mais la même course du jour,
    Se déplaçant comme une vague.

    D'autres villes qui s'enfonçant bientôt,
    Entre le violet et le silence ...
    Et le clapotis des flots.
    Alors qu'ici s'annoncera l'aube ,
    Sur un jour recommencé.

    Les immeubles seront encore au même endroit.
    A l'assaut des colllines.
    Les grues pourront reprendre leur ballet.
    L'oeil fixe de la lune s'est effacé,
    Discrètement, dans la brume .

    -


    RC - mars 2014

    · Il y a presque 8 ans ·
    Tulip  avr  21  03

    rechab

    • j'aime beaucoup vos textes, comme un univers familier dit avec d'autres mots que les miens
      elle est étrange parfois cette poésie du béton et des grues, cette puissance du métal ; à cette époque , elles sont éclairées le soir, je ne m'en lasse pas, mais il faudrait posséder le coup de pinceau du peintre, les mots sont toujours imparfaits

      · Il y a presque 8 ans ·
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      Susanne Derève

  • Belle Bretagne qui se mire dans la mer par tous les temps.

    · Il y a environ 8 ans ·
    Blanes (39) 3

    virgo34

  • Oui c'est beau. Je ne sais pas quoi dire d'autre. Ça me touche au même endroit qu'un paysage. Ou qu'un matin. Quelque part entre la poitrine et la solitude. Merci.

    · Il y a plus de 8 ans ·
    Vie1

    thib

    • merci également pour ce très joli commentaire.
      Heureuse de partager mes émotions avec d'autres

      · Il y a plus de 8 ans ·
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      Susanne Derève

  • Merci de ta lecture Elisabetha ,
    le Port ici commence à préparer sous le soleil les grandes fêtes maritimes de Juillet

    · Il y a plus de 8 ans ·
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    Susanne Derève

  • c'est très beau. On dirait du Hérédia.

    · Il y a plus de 8 ans ·
    Bbjeune021redimensionne

    elisabetha

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