Eclat d'une présence fugace

Marie Benoit

Regarde à travers la vitre, sur ce carreau embué par le froid du dehors… Tu y verras ce visage qui te hante, où dans ces yeux emplis de larmes se mêlent amour, chagrin et désespoir. Ce visage du passé, ce regard ravagé où coulent sans cesse les larmes de cette histoire inachevée. Passion dévorante, mais interdite, inaccessible à présent. Ce visage si beau dans sa fragilité cristalline, si pur telle la rosée du matin perlant sur l'herbe fraîche. Ce visage que tu as aimé, que tu aimes et que tu aimeras toute ta vie.

Cet instant unique, ce moment magique vécu, qui restera à jamais gravé dans ton cœur. Souvenirs de mouvements graciles, gestes futiles, pensée floue d'un rêve oublié, brumes légères d'une douce utopie refoulée. Ce fantôme qui t'habite, vers qui te tends la main sans jamais pouvoir le toucher. Cependant liés à jamais par cet amour profond, fil indestructible qui t'unit à la vie.

Tu entends, dans une mélancolique nostalgie, ses éclats de rires. Tu revois la malice taquine de ses yeux, ses sourires habités par cette tendre affection qu'elle te porte. Silhouette aux traits fugaces, presque effacée de ta mémoire et pourtant toujours aussi présente. Spectre de ton existence précédente que tu ne peux abandonner. Tu tentes sans cesse d'avancer, mais il revient et te retient, encore et encore. Tu sens son parfum, son doux parfum, envahir tes narines.

Tu te rappelles les caresses légères de ses mains sur ton corps, dans une douce lumière tamisée. Ses formes se dessinent lentement dans ton esprit. Tu ressens à nouveau cette complicité que vous partagiez, cette fascination que vous aviez l'un pour l'autre, cette façon que vous aviez de vous découvrir toujours un peu plus chaque jour. A présent tu te rappelles clairement. Cet être à qui tu murmures, sans même t'en rendre compte, un sincère et sensible : "Je t'aime…".

Une larme, une unique larme roule sur ta joue. Pour cette personne, tu as choisi la vie. Alors tu détaches ton regard de cette sombre, cette froide fenêtre donnant sur la nuit et tu le tournes vers la lumière et la chaleur de ton foyer, accueillant à bras ouverts tes enfants qui accourent pour te souhaiter bonne nuit…

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