Etat de « GRACE »

Lydie Hans

chronique musicale sur l'album phare de Jeff BUCKLEY

L'année de mes 17 ans, j'étais en première, un peu paumée, curieuse. Besoin de rêves, de musiques, de sons différents qui prennent aux tripes, d'un électrochoc. Une copine de classe me fait écouter un album un peu spécial, pas commercial. Un chanteur à la gueule d'ange, une bouche à se damner et un regard sulfureux et gourmand. Dès la première écoute, je suis sous le choc, le déchaînement des guitares, envoûtantes, une voix comme nulle autre. Une voix venue d'ailleurs, profonde peu banale pour un homme, puissante, vigoureuse qui secoue comme un baiser interdit donné à la hâte, mon cœur a flambé. L'album « Grace » de Jeff Buckley est sorti en 1994, je l'ai découvert en 1997. Le premier titre « Grace » est mon préféré, mais très vite je passe aux autres morceaux, « Lilac Wine », « Lover should we come over », « Eternal life »…autant de morceaux qui portent et expriment la rage et la douleur de vivre et d'aimer. J'en suis à jamais marquée dans mon cœur musical qui est encore ivre de l'écouter aujourd'hui. Sa voix est celle de l'amant qu'on aimerait avoir, ses mots peuvent être ceux d'une femme qui aime trop, qui aime mal. Un timbre unique et bouleversant, on ferme les yeux et on entre en transe, on crie, on supplie, on jubile et on pardonne. Jeff Buckley faisait l'amour à la vie à travers la musique. Il vivait intensément, et c'est intrépide qu'il s'enfonça dans un lac de Memphis, Tennessee pour ne plus revenir le 29 mai 1997, emportant avec lui sa fureur de vivre éternelle...

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