Foehn Ier
dambrezy
L'Homme descendit péniblement du car qui relie chaque matin Romorantin-Lanthenay à l'Argentière. Le chauffeur lui tendit sa valise, retourna à son siège et démarra. L'Homme regarda le véhicule s'éloigner puis resta un long moment sur le bord de la route appuyé sur une canne en merisier au pommeau de fer blanc qui semblait bien fragile pour son corps devenu pesant. Le nez palpitant sous les senteurs de la végétation, il fixa, de l'autre côté de la chaussée, la masse sombre des arbres qui exhalait ses dernières fraîcheurs avant l'arrivée imminente du soleil. Puis il se redressa, ramassa sa valise et commença à marcher lentement, avec précaution, prenant soin de tous les membres de son corps. Un chemin à droite annonça rapidement « L'auberge du Haras ». Il l'emprunta pour arriver, une centaine de mètres plus loin, devant un bâtiment blanc de petite taille flanqué de deux dépendances qui servaient de remise et de garage. Il inspira une grande bouffée d'air, poussa la porte vitrée et demanda sa chambre.
*
Chaque matin, peu après sept heures trente, une petite file de cavaliers progressant au pas faisait résonner le chemin de terre, dans un beau bruit de sabots impatients et de hennissements frémissants, donnant ainsi à la nature environnante le départ de la journée. La troupe coupait ensuite la départementale pour rejoindre la forêt qui permettait dans ses vastes allées des galops étourdissants.
Et chaque jour, peu après sept heures trente, l'Homme ouvrait la fenêtre de sa chambre, laissait dépasser son buste et regardait dans un sourire figé les cavaliers s'avancer. Il détaillait un à un les chevaux avec un air connaisseur dans lequel semblait toutefois percer comme une pointe de morgue. Lorsqu'il était d'humeur agréable, il répondait aux saluts des gens à cheval en levant sa canne au-dessus de la tête mais le plus souvent, il se contentait d'un mouvement du menton en guise de réponse. Une fois la troupe passée, il restait encore un court instant appuyé à la rambarde, l'oreille tendue, pour saisir l'écho des sabots qui se perdait sous la frondaison, puis il descendait dans la grande salle de l'auberge, prenait un solide petit déjeuner fait de charcuteries et de fromages et sortait pour s'enfoncer vers les allées perdues.
Il marchait lentement, à petits pas, à l'écoute de son corps, transpirant légèrement sous les chandails qui se superposaient et quand, enfin, il parvenait au chêne, il se laissait tomber à son pied avec soulagement, le dos calé contre le tronc rugueux pour assister au spectacle.
Une piste ovale en bonne terre grasse d'une dizaine de mètres de largeur environ et d'une longueur de deux mille mètres déroulait ses parallèles et ses courbes. Là, bien calé, il attendait. Un petit grondement, tout d'abord, qui allait s'amplifiant, une onde menaçante, puis un tremblement et enfin les quatre ou cinq chevaux poussés au maximum passaient en trombe devant lui faisant voleter la terre. Il adorait ce moment de chaos et de grâce. Qu'y-a-t-il de plus beau qu'un beau pur-sang lancé au galop ? Il ne lui était pas rare, à la vue de ce spectacle, de tenir des rênes imaginaires et de faire la course. Son corps frémissant se courbait, puis se redressait au rythme du cheval. Sa cravache tournoyait puis s'abattait sur le flanc de l'animal imaginaire l’exhortant à donner tout ce qu'il pouvait et plus encore.
Si ce fichu corps n'avait pas flanché, il serait encore présent sur les champs de course, aimait-il à penser quand il était optimiste. Il avait toujours ça dans le sang. « l'Œil » : voilà comme on le surnommait dans le milieu, car rien ne lui échappait quand il s'agissait de chevaux et de terrains. Ainsi, d'autres que lui n'auraient pas remarqué l'imperceptible montée qui se présentait après le premier virage, là-bas à droite. Il savait que ce petit relief constituait la principale difficulté du parcours. Là, se jouait la course et là se perdait la course.
Après deux ou trois heures passées à regarder courir les champions, il se relevait le corps endolori, reprenait sa canne et rebroussait chemin. L'après-midi, il reproduisait la séquence de la journée, restant contre son arbre jusqu'au dernier passage des chevaux. Ensuite, il rejoignait son hôtel, dînait très tôt et s'endormait en pensant au jour d'après.
Trois semaines avaient passé et le rituel que s'était imposé l'Homme n'avait pas varié, quel que fut le temps ou son état de fatigue. Ernesto, le patron de l'auberge, homme loquace s'il en est, n'avait rien pu tirer de son étrange locataire. Chaque tentative pour en savoir un peu plus sur l'Homme était vouée à l'échec. Amorcer une conversation, même anodine, se révélait une affaire compliquée tant l'Homme avait le don pour fermer tout dialogue. C'est tout juste si Ernesto apprit que l'Homme n’était jamais venu à l'Argentière et qu'il semblait vouer une passion pour les chevaux. Alors, faute de combattants, Ernesto avait laissé son hôte en paix et s'était contenté de le servir en silence.
Un jour, alors que le printemps était désormais solidement ancré, l'Homme décida que le moment était venu. Nu dans sa chambre devant la grande glace insérée dans la porte de la monumentale armoire, il parcourut son corps du regard recensant toutes les blessures causées par ses chutes en course. Il pouvait en compter dix-neuf. Il avait exclu de cet inventaire les foulures, les luxations et les torsions pour ne garder que les fractures, les bris et les arrachages. Six dents cassées, une mâchoire brisée par deux fois, le coude, les côtes, le bassin, les jambes... Du plus petit au plus grand, à peu près tous les os de son corps portaient les stigmates de ses chutes.
Ses membres ne formaient plus qu'un amas d'articulations défaites, de jointures défaillantes et de muscles vieillis avant l'âge. Tout ce corps grinçant, vidé de son énergie, n'avançait plus qu'au rythme d'une vieille barque chargée, descendant sans retour une rivière aux rivages désolés.
Il sentit alors une vive douleur lui vriller l'intérieur du crâne. Il fut contraint de s'asseoir et, illusoirement, se tint la tête entre les deux mains pour faire cesser les souffrances. Là était la vraie, la grande blessure, celle qui ne disparaîtrait jamais. Dans ce crâne, le sang tapait plus durement que dans toutes les blessures réunies de son corps.
Il se leva, se passa la main sur le visage pour chasser l'intense lassitude qui semblait vouloir l'envahir. Il décida de s'habiller et quand, enfin il termina de nouer sa cravate de laine noire et d'ajuster les pans de sa veste en velours, il entrevit la terrible noirceur qui faisait luire son regard.
Alors, il retira son petit sac à doc de l'armoire, saisit sa canne et referma la porte derrière lui.
Le haras n'était pas éloigné de l'auberge mais il mit une trentaine de minutes pour y arriver. Une grande animation y régnait. Des palefreniers s'affairaient dans les boxes et il pouvait entendre les chevaux piaffer et jouer du sabot. L'air était chargé de l'odeur du foin et du crottin et ces odeurs familières lui firent tourner la tête. Un court instant, il ressentit une bouffée de nostalgie l'étreindre, mais il se ressaisit aussitôt. Il parcourut le domaine tranquillement sans que personne ne lui demandât rien. Les visiteurs n'y étaient pas rares : acheteurs, propriétaires, familles. Il rendit quelques saluts à des jeunes qu'il avait vu passer à cheval le matin au pied de son auberge.
Il savait ce qu'il cherchait et tout son être était concentré sur l’objectif. Pourtant, après avoir fureté partout, visité un à un tous les boxes et pénétré dans toutes les dépendances, il se résigna à questionner une jeune fille blonde qui tenait la longe d'un cheval bai-brun aux oreilles vives.
- Bonjour, je cherche un de vos pensionnaires, Foehn Ier ? Dit-il en s'appuyant sur sa cane.
Elle héla un autre jeune homme aux bottes crottées qui transportait une pile impressionnante de bombes.
- Ça te dit Foehn Ier ?
Il hésita un instant puis, du menton, désigna une petite bâtisse au loin. L'Homme les remercia et prit la direction indiquée tout en pestant contre le manque de culture de ces jeunes. A mesure qu'il s'approchait du bâtiment, il sentait son cœur palpiter et ses mains devenir moites. Avant l'écurie, il marqua un temps d'arrêt et crut défaillir. Il sortit fébrilement une petite boite de la poche de sa veste et ingurgita une pilule contre ses faiblesses cardiaques. Puis il se remit en marche dans ce qui semblait ressembler désormais à un chemin de croix.
Il entra, épuisé, dans le bâtiment en inspirant tout l'air que ses poumons pouvaient accepter. L'endroit était exigu et le silence y régnait. Il s'arrêta. Pas un habitant ne renâclait, aucun bruit de sabot ne se faisait entendre...
Quatre boxes se succédaient sur le côté droit. Il s'approcha. Les trois premiers étaient vides. Il frémit en se portant devant le dernier. Une plaque en contreplaqué était apposée sur la porte : le nom de Foehn Ier y était inscrit d’une écriture ample.
Mais l'animal n'était pas là. Il ressortit et contourna l'écurie. Derrière, s'étendait, dans un vallon aux courbes douces, une coulée verte constituée de champs cultivés, de prés et de bosquets. Près de l'un d'eux, il aperçut une masse sombre se déplacer. L'Homme plissa les yeux pour ajuster son regard.
- Enfant de salaud ! Ne put-il s'empêcher de lâcher la lèvre tremblante.
Il venait de reconnaître Foehn Ier qui avançait au pas, l’épaule puissante et majestueuse, droit comme s'il était à la parade, fier de lui. L'Homme dut s'asseoir à même l'herbe pour évacuer la tension.
- Ma Némésis ! ma Némésis ! Enfin je te retrouve, ne cessait-il de chuchoter sans cesser de fixer l'animal qui avançait au loin.
Il se releva et s'approcha de l'enclos électrifié dans lequel se trouvait Foehn Ier.
Ce dernier ne semblait pas s'être rendu compte de la présence de l'Homme. Mais cela n'était qu'une des manifestations du caractère de l'animal : Foehn Ier était le cheval le plus orgueilleux de sa génération. Il n'allait pas se laisser aller à porter de l'intérêt pour une de ces pauvres créatures à deux pattes qui n'aiment rien tant que de gesticuler en sa présence. Soudain Foehn Ier entendit un sifflement qui lui était familier. Il fut contraint de tourner la tête vers l'intrus. Était-ce possible que... Il entendit un deuxième sifflement. Pas de doute ! Cela faisait une éternité que l'on n’avait pas sifflé cet air à son oreille. Cela ne pouvait être que l'Homme. Le cheval hennit brutalement pour signifier à l'intrus qu'il l'avait reconnu puis il s'éloigna en trottant vers le fond du pré et disparut derrière un des bosquets, se soustrayant ainsi à la vue de l'Homme.
- Enfant de salaud, répéta l'Homme en longeant la clôture électrique pour se rapprocher du cheval.
Foehn Ier broutait paisiblement. L'Homme s'approcha avec une économie de mouvements pour ne pas effrayer l'animal. Il était toujours aussi splendide. De taille moyenne, sa robe noire lançait des éclats pourpres qui lui donnaient l'effet d'un grand velours. Il n'avait plus les muscles saillants de sa jeunesse mais ses jambes et son poitrail laissaient percevoir toute l'énergie que le corps recelait encore.
- Me reconnais-tu ?
Les oreilles du cheval frémirent. Bien sûr qu'il le reconnaissait. Comment aurait-il pu oublier l'Homme ? Tant de fois, cette voix lui avait commandé de faire des choses qu'il n'avait jamais aimé faire : galoper à la commande, sauter des obstacles sous les hurlements des spectateurs, passer des heures confiné dans un boxe...
L'Homme avait sorti de son sac une corde et une pomme rouge, qu'il découpa en quartiers puis il alla éteindre le courant de la barrière et se posta devant Foehn 1er.
- Regarde mon vieux, dit l'Homme. Regarde !
L'Homme entreprit de se déshabiller lentement, ôtant tout ce qu'il portait. Totalement nu, il s'approcha encore du cheval, la corde dans une main et les quartiers de pomme dans l'autre.
- Regarde ce corps, l'animal. Il est laid, il est brisé, et c'est un peu ta faute. T'en souviens-tu ? Oh, tu n'es pas le seul responsable, je te l'accorde. Mais ça, dit-il en montrant sa jambe droite qui le faisait claudiquer et ça surtout, dit-il encore en désignant sa tête... Cela vient de toi et seulement de toi.
Foehn Ier n'avait jamais su résister à l'attrait d'un quartier de pomme rouge. Il s'approcha de la main tendue.
L'Homme lui présenta le fruit et dans un même mouvement lui passa la corde autour de la tête. Foehn Ier avait bien senti la chose qui s'était coulée autour de lui et qui lui enserrait désormais le cou mais la pomme était trop bonne. Il se contenta de placer ses yeux jaunes dorés dans ceux de l’Homme.
Alors quand ce dernier se porta a son côté pour lui flatter le flanc, Foehn Ier n'y vit pas malice. Et lorsque, au prix d'un effort surhumain, l'Homme parvint à se hisser sur sa croupe, en y mettant toute l'énergie et la force qu'il possédait encore, Foehn Ier ne put que constater l'évidence : il s'était fait avoir. Il sentit le corps chaud de l'Homme se crisper sur son dos, empoigner sa crinière et taper vigoureusement ses talons contre ses flancs. Foehn Ier n'eut d'autre choix que de démarrer. L'Homme le dirigeait avec détermination et science. Foehn Ier reconnaissait bien là, les manières un peu brutales qu'il pensait avoir oubliées pour toujours. Ils quittèrent l'enclos, et se mirent à galoper dans la prairie. L'Homme hurlait en l'étreignant de ses genoux et le poussait, le poussait sans cesse. L'animal, les naseaux palpitant, l'écume naissante, se laissa amener vers la forêt.
Ils arrivèrent enfin devant l’entrée du champ de course. Foehn Ier avait concédé à l'Homme le contrôle de son corps pendant une dizaine de minutes mais il était temps de rompre le pacte tacite. Il vira soudainement à gauche, quitta le chemin et s'enfonça, malgré les gestes de commande de son cavalier, dans la profondeur de la forêt. Foehn Ier accéléra. Il n'avait pas de concurrent devant lui pour le pousser et les cris de l'Homme ne servaient plus à le diriger. Seule la volonté et les souvenirs de ce qu'il avait été l’entraînaient. Il était vieux et n'avait plus le galop de sa jeunesse, mais il avait conservé son expérience.
Il slaloma entre les arbres avec dextérité puis, d'un coup, pressentant l'obstacle, il s'arrêta brutalement devant une souche d'arbre en travers du passage, refusant la possibilité du saut. L'Homme, qui tenait le cheval par les talons et la crinière, passa au-dessus de l'encolure et vint s'écraser au sol.
Foehn Ier fixa un instant le corps nu sur la mousse. Son échine fut parcourue d’un bref frisson, il poussa un léger hennissement et quitta les lieux en trottant.
***
La chambre de l'Homme était parfaitement rangée lorsqu’Ernesto y entra. Sur la table, un grand cahier d'écolier ouvert présentait d'innombrables coupures de presse qui avaient été collées avec soin. Ernesto savait que les mystères de l’Homme s’y trouvaient.
Tancrède de Castelnau avait été l'un des meilleurs jockeys de France. Au début des années 90 il avait ramené d'Allemagne un cheval dont le père, Tiburce d'Orange, avait connu son heure de gloire sur les champs de course européens. Foehn 1er devait son nom au vent qui souffle dans le Bade-Wurtemberg et qui excite les âmes au point, parfois, de les amener à la folie. Les jours de foehn, on repousse les opérations dans les hôpitaux et on renforce la sécurité dans les prisons.
Finalement, Foehn Ier devait, plus que tout autre cheval, porter son nom à merveille. Il fut pur-sang le plus fantasque que le milieu hippique ait jamais connu en un quart de siècle. A tel point que si tous devaient reconnaître son indéniable talent, il ne se trouva plus personne qui accepta de le monter. A l'exception d'un homme : Tancrède de Castelnau. Tancrède travailla durement pour le remettre à niveau et le préparer à son grand retour en France. Ses efforts furent remerciés. Il gagna en une saison quatre courses du groupe 1, et trois de ses cinq courses à Longchamp.
Un article relatant le Grand Prix Madame 1991 attira particulièrement l’attention d’Ernesto. Ce jour-là, Tancrède, persuadé de tenir entre ses rênes le crack du siècle, montrait le visage de l’assurance et de la détermination. De toute sa carrière, il n'avait jamais connu si capricieux, si fantasque, si caractériel et si talentueux que Foehn Ier.
Sur la ligne de départ, Tancrède avait senti palpiter son cheval. Des naseaux à la croupe, Foehn Ier n’était qu’électricité. La sortie des stalles lui fut défavorable, et le premier tiers de la course, médiocre, mais Tancrède ne montra aucune inquiétude ; il savait que son cheval n'était jamais aussi bon que lorsqu'il était à la poursuite de ses rivaux. Le défi de Foehn Ier ne consistait pas à répondre aux injonctions de son maître mais à ne laisser aucun autre cheval passer la ligne d'arrivée en premier. Avant-dernier de la course, il remonta un à un ses concurrents jusqu'à tenir tête au grand favori, Farouk d'Antibes. Les tribunes exultaient, le mano a mano faisait trembler les parieurs et les spectateurs.
A cent mètres de l'arrivée, Foehn Ier accéléra encore et gagna une encolure sur Farouk d'Antibes. A cinquante mètres, Tancrède sentit une grande chaleur l'envahir. Il était sur le point de gagner sa course la plus prestigieuse avec un cheval sur lequel personne ne voulait plus miser. Il était le plus grand jockey du monde parce qu'en dépit de tout et de tous, il avait cru en sa monture...
A vingt mètres de l'arrivée, la course était faite. Foehn s'apprêtait à l'emporter avec une avance indiscutable, quand survint le fait le plus singulier qu'on eut pu voir sur un champ de course. Foehn stoppa net sa course, freinant des quatre fers avec une violence telle que Tancrède de Castelnau, passa par dessus lui et chuta lourdement sur l'herbe. Il eut encore le temps d'entendre passer la cavalcade de tous ses concurrents puis il sombra dans le coma.
La dernière page du cahier était écrite de la main de l’Homme. Ernesto eut un pincement au cœur en la lisant. Cette course avait détruit physiquement Tancrède de Castelnau, qui ne put jamais remonter sur un cheval. Des mois d'hôpital, de multiples opérations lui enlevèrent le peu d'énergie qui lui restait. Il y eut pire. On considéra cette course comme la plus ridicule jamais courue et Tancrède gagna l'infamante cravache de carton qui mettait un point final brutal à sa carrière mais aussi à sa vie.
***
Tancrède fut enterré à l’Argentière. Ernesto, une fois par an, allait fleurir sa tombe. Il y avait déposé, dans un petit cadre de fer-blanc, la photo qu’il avait retrouvée dans la veste de l’Homme.
Tancrède de Castelnau, le bras levé, les pieds dressés sur ses étriers, le visage illuminé par un sourire franc, montait Foehn Ier dont les yeux jaunes dorés laissaient percer une étincelle narquoise.