Gastronomie.

Pour toutes ses bonnes raisons, j'ai ouvert un restaurant en province avec la prétention d'initier les autochtones à la vraie gastronomie. Initié est le mot juste, car les goûts s'initient, ils sont génétiques, certes, mais génétiquement limités, c'est la culture ambiante qui donne le ton, en Si mineur, pour changer.  Maintenant, nous n'allons pas rentrer dans ces querelles de charcutiers-volaillers-chercheurs. Les goûts font partie d'une tradition culinaire ancestrale remontant à nos atavismes d'hommes des cavernes anthropophages. Ça ne s'est pas fait en un jour comme Rome qui, lui, ne pousse que la nuit.

Donc, me voici installé dans mon établissement trois étoiles de ski près d'Auxerre, chez les bouseux.

Ma spécialité n'est pas un plat très compliqué à réaliser. Des noix ! Quoi ? Vous ne connaissez pas les noix ? Fruits du noyer, filles du pendu. Il faut sortir un peu, les gars et les gazettes ! Fréquentez les musées, assistez à des conférences, allez aux putes !

Les noix, vous ne pouvez pas louper la cuisson, il n'y en a pas, elle se mange crues. Les noix sont bonnes d'elles même, inutile de les assaisonner, ni de les servir avec une sauce à la noix. Il suffit juste d'enlever la coquille, car elle est dure à digérer.

Vous les servez, tel quelles dans une écuelle de chien et comme ce sont de beaux fruits, la déco est toute trouvée. Je les sers toutes emballées, mais je fournis une pierre pour les décortiquer.

Il faut à présent que je trouve un nom pour mon restaurant de gastronomie gustative. Que pensez-vous de « T'as de belles noix, tu sais ? » Ce n'est pas de moi, c'est tiré in extenso et à la carabine de la réplique d'un gonze dans un film qui savait parler aux gonzesses, lui ! Le mec en avait pécho une, avec des nichons de la taille de deux noisettes, une par nichon. (Oui, les filles ont deux nichons. Ah, si on ne sait pas ça, on ne peut pas comprendre !) Donc pour la flatter la gonzesse, il a préféré utiliser le terme de noix, car la noix est plus grosse que la noisette, qui de fait, est plus petite que la citrouille. Maintenant, une gonzesse avec deux citrouilles à la place des noix, tout le monde n'aime pas forcément. Remarquez, cela peut être pratique, quand il n'y a plus de taxi, pour rentrer chez soi après minuit.

Notez que les noisettes, c'est pas mal non plus, ça me ferait un deuxième plat à mettre sur ma carte. Donc mon restau s'appellerait : « T'as d'belles noix et d'belles noisettes aussi, tu sais ? »

Ma femme qui n'a jamais sa langue dans sa poche, parce que ça les déforme, me dit : « Pourquoi, tu ne rajouterais pas une feuille de salade pour faire joli ? »

Ah, ça, c'est bien les filles, ça ! Pour compliquer les préparations, elles sont fortes ! Une feuille de salade par assiette, ça en fait des feuilles, presque autant que d'assiettes et ensuite il faut les ranger toutes ses feuilles dans le vaisselier, car il est interdit de les manger, c'est seulement pour la déco. Celui qui la mange, doit en ramener une de chez lui, la prochaine fois, qu'il vient chez moi. Non ! Mais je ne vais pas me laisser emmerder par des pedzouilles, non plus ! Des salades, ils en ont plein dans le poulailler.

Donc, si vous n'avez rien de mieux à faire et n'avez pas de petite fin, passez me voir dans mon restaurant : « T'as de belles noix et de belles noisettes aussi, sur une feuille salade consignée. »

PS. Aux dernières nouvelles, j'ai abandonné la restauration au profit de l'hébergement, mon hôtel s'appelle : « Qui dort, dîne dehors ! »

Bonne nuit, les petits !