Hambourg

kelen


Bientôt minuit… Dans l'obscurité de mes appartements, je n'arrive plus à trouver le sommeil. Hantée par des visions fantasmagoriques de nos deux corps enlacés,  mon esprit ne sait trouver la paix qu'il mériterait. Le souvenir du trouble ressenti à l'issu de notre dernière partie d'échecs ne se dissipe pas, bien au contraire. Je sais que dès demain, je serais face à vous, et cette idée d'affronter à nouveau votre regard  fallacieux ravive les souvenirs encore brûlants de notre dernière rencontre.

Je m'extirpe de mon lit lascivement et me dirige vers la fenêtre afin de prendre l'air. La brise légère de la nuit apaise alors mes désirs exacerbés. Les secondes paraissent durer une éternité. Je m'assois sur la petite terrasse et m'endors…lasse d'avoir lutter toute la nuit contre ces vils démons…

Levée aux aurores, je n'ai qu'une seule idée : vous retrouver. La journée me paraît interminable et je ne rêve que de poursuivre cette fameuse partie d'échecs…

Jouer, enfin… dans la pénombre de votre chambre, à la lueur de cette bougie dégoulinante.

Enfin minuit. Vous vous glissez furtivement dans mes appartements… C'est risqué mais nous avons pris toutes les précautions. Le damier noir et blanc trône au milieu de la pièce, les pièces placées à l'identique de notre dernière partie. Théâtre de nos désirs, prétexte à nos perversités, c'est ici la seule règle étable. Il faut jouer. Jouer ses craintes, jouer ses envies, jouer ses fantasmes…

Chacun devant ses pions, l'air concentré…

Vous déplacez le fou. Le sourire au coin de vos lèvres, je sais déjà que vous jouez ma perte pour cette soirée.

« Vous avez gagné cette partie mais pas la guerre cher monsieur ! »

« En attendant, pour vous ce soir, il sera inutile de lutter ! Vous êtes mienne, et jusqu'à l'aube, mes désirs seront vos désirs… »

Vos mains se posent alors sur mes épaules, votre regard m'hypnotise. Si les  premières fois j'ai savouré les fruits de mes victoires, ce soir, je me sens dépossédée. Je durcis alors mon regard, vous ne me possèderez que si je le souhaite !:

Vous  vous dirigez vers la table  et vous frottez une allumette…L'encens se met à brûler dans la pièce, laissant émaner de douces odeurs vanillées. 

Vous prenez votre temps, vos gestes sont lents et lascifs…Vous n'êtes pas sans ignorer que j'attends votre verdict…telle une condamnée….Vous laissez durer ce plaisir et en moi monte l'excitation, mêlée à l'impatience. Vous jouez de ma position de faiblesse et je jure déjà de vous faire payer cette attente au prochain coup.

Vous vous asseyez sur votre tabouret et m'invitez à me mettre en face de vous, installée à l'identique. Vous me tendez une plume et une feuille.

« Votre gage sera de m'écrire ici vos désirs inavoués…et peut être ce soir m'inspirerai-je de l'un d'eux pour  satisfaire les miens… »

Ecrire ?  Je ne m'attendais pas à  cela…. Sûrement a-t-il senti mon impatience, et me la fait-il payer ! Mes envies ne s'écrivent pas mais se vivent !

Vous vous levez alors et vous vous postes derrière moi. Vous posez vos mains sur mes hanches. Je lance un soupir de soulagement…enfin je vous sens…Je sens votre souffle à mon oreille laissant échapper vos exhortations…  « Ecris, et je te touche… »

Alors je prends la plume et  grave sur le papier les sentiments éprouvés la nuit dernière, le plus fidèlement possible. Je me revois tremblante à l'idée de vous faire face, agitée par le souvenir de nos étreintes,  brûlante de désir pour vous. Je revis mon envie de vous sentir près de moi, puis en moi…Visions éclatées de mon désir, sentiments contradictoires, ambiguïté d'être à la fois dominé et dominante, projections tendancieuses de nos deux corps incontrôlés. La plume gratte le papier comme animée par mes désirs. Les mots me font revivre mes perversions de la veille, et votre regard sur ces derniers multiplie encore l'excitation. Vos mains massent ma nuque et électrisent ma colonne vertébrale. Un frisson parcourt mon corps.

Vous sentez le trouble grandir à moi et vous en jouez. Quand vous me sentez résistante vous insistez, et quand vous me sentez offerte, vous m'abandonnez. Quel jeu cruel !

Les mots que j'écris se font alors de plus en plus précis et de moins en moins implicite…je trouve des mots pour chacun de mes actes… pour chacune de mes envies, pour chacune de mes excitations…. La plume met  à nu mes fantasmes alors que vos mains délacent mon corset. L'inspiration qui tout à l'heure me manquait devient moteur de mon excitation pour cet homme qui aime me voir en danger. La nuit me parait interminable. J'écris, j'écris et rêve de la réalisation des fantasmes ici décrits et précisés jusque dans leurs détails les plus scabreux…Inversion des rôles,  cette nuit vous mènerez la danse sensuelle, mais demain, ma vengeance n'en sera que plus terrible….Le lacet de mon corset est maintenant desserré, mettant à nu mon échine encore tremblante. Je sens vos baisers se poser un à un sur la verticale de mon dos jusqu'à atteindre mes reins. Vos mains se glissent sous mes vêtements légers. Votre paume à la fois ferme et douce exerce une pression sur mes fesses, me faisant frissonner encore davantage. Inutile de lutter, je laisse tomber ma plume sur le papier.

Vous vous relevez alors et m'invitez à vous suivre sur ce canapé. Vous me tendez une coupe de vin, pour m'ennivrer encore davantage. La Raison m'a pourtant depuis longtemps abandonnée !

Vous saisissez le feuillet que j'ai noirci durant des heures et vous lisez mes mots, pudiques au début, libertins au fil des pages pour raviver encore mon trouble. Vous lisez dorénavant mes pensées les plus intimes et ce viol consenti de mon esprit vous donne un ascendant non négligeable sur moi. Entre honte et excitation, je ferme les yeux pour échapper à votre regard inquisiteur…Vous interprétez ceci  comme une invitation à  l'exacerbation des sens…Les yeux bandés, je deviens votre jouet. Libérée de votre regard, je me laisse guidée par vous.

Vous me prenez la main et je vous suis, hésitante, je sens vos bras m'enlacer, et votre bouche fusionner avec la mienne…Vos baisers sont à la fois doux et profonds, nos langues dansent sensuellement au rythme de nos étreintes…Vos mains s'aventurent au-delà des règles de bienséances… Je chancelle de plaisir et vous faites glisser les draps de soie sur mon corps à demi-nu. Je ne sais plus vraiment où je suis mais la crainte ne peut rivaliser avec l'excitation que j'éprouve. Vous me libérer des derniers obstacles à notre plaisir. Les yeux bandés, je ne peux qu'imaginer votre désir…Puis vous vous éloignez de moi, me laissant seule, étendue et brûlante. J'attends… et quand je sens à nouveau votre bouche, celle-ci s'amuse à provoquer mon petit bouton de chair, dans une aliénante excitation. Maintenue  dans cette indécente position, je sens votre langue s'immiscer davantage dans mon intimité. Mes soupirs encouragent vos baisers brûlants et à cet instant je ne rêve que de recevoir vos prochains assauts. La cyprine qui s'échappe de ma fente trahit alors l'excitation que je tente de vous dissimuler. Vous tirez gloire de la jouissance de mes faiblesses. Toute résistance est impossible. J'imagine sur votre visage le rictus de satisfaction que vous aimez tant arborer lors de vos victoires…Peu importe, ici je ne vois rien, et mon égocentrisme prime sur vos émotions supposées. L'important c'est ce qui est ressenti, et à cet instant je n'ai qu'une envie, celle de vous toucher et de vous mettre dans le même émoi que vous avez provoqué chez moi. Mes mains glissent alors sur votre torse pour plonger naturellement vers votre objet de plaisir fièrement arc-bouté. Mes caresses se font plus puissantes à mesure que je sens le membre se raidir. Le rythme oscille périodiquement entre lascivité et agitation pour jouer avec l'onde de plaisir de ce partenaire parfait. Enfin sur la brèche,  en équilibre entre l'excitation et l'orgasme,  je cesse toute caresse pour frustrer quelque peu mon tortionnaire.

Les premiers rayons du soleil viennent brutalement inonder de lumière la petite pièce, nous annonçant que le temps nous manque… Je vous sens alors vous rapprochez de moi et vos baisers m'échauffent le cou, vous prenez ma main dans la votre et la guidez dans les abysses de mon intimité. Je vous sens vous délectez de ce spectacle et à en croire les ondes que laissent paraître votre corps, vous n'êtes pas non plus inactif.

Les minutes filent à une allure impressionnante, et déjà, j'entends votre valet frapper à votre porte, heureusement scellée… Notre impatience partagée ne nous permet plus de continuer notre jeu-supplice et dans un élan vigoureux, je sens en moi votre vit aussi puissant qu'un glaive d'acier. Vos assauts sont à la fois violents et délicieux… et mes soupirs ne peuvent être contenus, malgré la discrétion dont je dois faire preuve. Mon corps vibre de plaisir, cahotant entre chaque va et vient.  Je me cambre pour mieux vous recevoir et  mes jambes enlacent votre taille dans un désir de fusionner. Mes muscles enserrent votre membre pour mieux le faire gonfler jusqu'à ce que dans un râle je sente en moi se verser votre puissant liquide séminal provoquant en moi une onde orgasmique m'étourdissant quelques instants.

Signaler ce texte