Harmonie en dos

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C’est facile de dire ça avec la gueule que t’as !
Elle était debout. Les lacets de ses chaussures marron, ils sont défaits, et sa robe est légère, légère, légère. Avec des fleurs. Ses cheveux sont un peu rouges, un peu bruns, un peu acajou. Ils ondulent jusqu’aux fesses et dessinent une cambrure magnifiquement déprimante en insistant sur des fesses belles, belles, belles.


C’est facile de dire ça avec la gueule que j’ai, c’est vrai. Il est couché, le visage couvert. Les lacets de ses chaussures noires sont ouverts. Il ne les porte pas. Ses cheveux sont toujours aussi beaux. Noirs. Brillants. Vivants. Ses mains fortes et réconfortantes manquaient à mon bassin. À mes fesses. À mes seins. À mon ventre. À mes fesses.


Casse toi avant que je ne te casse !
Je sais que je ne peux pas. La casser. Elle est debout et moi couché. Elle est vivante et moi… plus trop. Cet instant n’était pas l’infinie fraction que je considérais être mon passage sur terre. Cet instant n’est qu’une boucle très fermée à la redondance maladive. Redondance. Redondance. Redondance. Et les maux dansent à nouveau. J’appuie sur le bouton et sombre dans les bras de morphine.


Je sais que je devrais me casser, mais il ne peut rien y faire. Les lacérations s’étaient infectées. Son visage, tapi sous un massif bandage de gaze, était un amas de chair fondante et d’un pus verdâtre suintant de chaque pore. Assailli par une violente flamme qui creusa dans sa belle peau mate cratère après cratère, sa tête ne comptait plus sept orifices mais une quarantaine. Et sa généreuse barbe n’aida pas à ralentir le déluge igné qui l’emportait.


Je rêvais de portes. Chez moi, je les avais enlevées. Elles étaient une barrière à la spatialisation de mon imaginaire macabre. J’aimais savoir qu’aucune porte ne dérangerait le débarras d’un éventuel cadavre. Qu’aucune porte ne viendrait en travers de la route vers une partie charnelle et bestiale au retour d’un dîner aviné.


J’enlève mes chaussures et me glisse à côté. La porte reste grand ouverte.

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