J'avoue!

Parce que je suis fatiguée de m'exprimer par métaphores, analogies et autres allégories. Que j'en ai assez de me cacher derrière ce voile de mystères, m'étant moi-même rendue insondable juste parce que j'avais la trouille! Peur de faire péter ce masque que je me suis patiemment construit jour après jour, et que j'ai entretenu avec amour. Mais que je ne supporte plus d'apercevoir dans le miroir. Parce que je suis un litchi. Dure et piquante au dehors: je craignais qu'on bouffe mon intérieur, pour ensuite bêtement me recracher. Et on l'a fait, mais c'est ma responsabilité de l'avoir autorisé. Plus envie de blâmer. Il n'est jamais trop tard... pour se confesser.

J'avoue que j'ai été très lâche. Que j'ai souvent pris la fuite avant qu'on ne puisse me rejeter, mais surtout avant qu'on ne puisse m'aimer. Mécanisme d'auto-défense mal rôdé, qui voit partout du danger.

J'avoue que je me suis, insidieusement, emprisonnée dans cette solitude désirée. Désabusée, me croyant trop bien pour les autres, j'ai creusé mon propre fossé. Et m'y suis longtemps terrée.

J'avoue que je me suis construit cette image de moi qui devait à tout moment coller à mes règles strictes. Sous peine de punir sévèrement mon esprit, de l'envoyer se faire foutre au coin, et de le maltraiter. Juste parce que c'est en mon pouvoir. Et que c'est plus simple de pointer du doigt, que de se regarder en face, et d'évoluer.

J'avoue que mon image projetée aux autres était aussi scrupuleusement contrôlée. Surtout: "que tout le monde t'aime, que tu ne déplaises à personne, que le qu'en-dira-t-on te soit toujours favorable. Souris! Sois polie et aimable! Qu'on t'invite toujours à gauche, à droite. Adaptes-toi aux remarques, et change! Rince ton cerveau, oublie qui tu es: c'est aux autres de te l'apprendre!" A force, c'est pas étonnant qu'on passe une vie à chercher qui l'on est et ce qu'on aime. Ce qui nous fait vibrer nous, et plus maman, papa, le curé, le boss ou le futur marié. J'avoue que je me suis trop laissée modeler. Puis, quand je me suis réveillée, je me suis demandé "Mais merde, dans tout ça, où est-ce que je suis passée?". L'onde de l'électrochoc a été violente. J'en ai mis du temps pour la digérer! Mais il n'est jamais trop tard pour se rattraper. Pour autant qu'on se rende compte qu'on avait chuté.

J'avoue que constamment, je me sens épiée. Alors je surjoue comme un mime médiocre, ou un acteur de cinéma muet. J'avoue que j'ai pu sourire juste pour feindre qu'une chose ne m'atteignait pas. Juste pour ne pas mettre sous les projecteurs mon vrai Moi. Au point de m'auto-persuader que mon sourire était authentique. Sans plus trop savoir, au fond, ce que je ressentais vraiment. Alors ma vérité, troquée contre une illusion éphémère, se vengeait. La nostalgie de moi-même revenait. Comment aurais-je pu leur en vouloir? Au contraire, je les remercie désormais.

J'avoue que je sais lire dans les pensées... Ou, du moins, dans le langage corporel. Et il ne trompe pas. J'avoue qu'alors je peux anticiper, parfois trop loin, et donc aussi me saboter.

J'avoue qu'encore récemment j'adorais avoir raison. Mais que ça a, tristement, trop souvent été le cas. Maintenant j'aime mieux m'être plantée dans mes jugements, mes prédictions... avec une personne qui me surprend. Ça m'évite de me dire à nouveau "Je le savais!".

J'avoue que j'ai du mal à rester en compagnie de gens qui mentent et, surtout, qui se mentent à eux-mêmes.

Peut-être que je condamne plus le déni que l'ignorance.

Peut-être que je ne pardonnais pas aux autres qu'ils fassent ce pour quoi moi, je me flagellais.

10 mai 2014