Je suis ton oeuvre
christinej
Je n’etais qu’une fine lueur, les prémices d’une idee, un leger fremissement dans une partie de ton inconscient, toi, mon ecrivain. J’ai été un fœtus immature, fait de ratures, d’erreurs, de boules de papiers froissees. Et j’ai muri, grandi, tu m’as nourri de verbes, d’adverbes, d’adjectifs pour m’embellir. Mais tu n’etais jamais content du resultat, tu passais ton temps a m’amputer d’un bras, parfois il te prenait meme la fantaisie de me mettre trois jambes mais tu te rendais vite compte que j’etais alors bancal.
Quand l’esquisse de mon frele corps a été enfin ebauchee je ressemblais a un pantin, comme Pinocchio revant de prendre vie.
Tel un peintre tu as croque les détails de ma peau, la lissant, defroissant les plis, ajoutant des teintes pastelles sur mes joues, parfois meme du rouge sur mes levres pour un baiser a venir. Tu m’as fait genereuse et accueillante pour des yeux egares. Du vernis a mes ongles pour me sophistiquer, une chevelure fauve pour pousser a l’aventure. De belles courbes pour y glisser un soupcon de sensualite. Un regard d’un bleu penetrant pour s’y plonger sans retenue. Une goutte de mystere dans la tristesse de mon visage. Un cœur de lion pour ne pas avoir peur d’affronter les dangers.
Mais j’etais encore nue a tes yeux, alors tu m’as drapee de soie pour rappeler la lointaine chine et les vapeurs de l’opium. Une soie douce sur ma peau caressant l’epiderme pour reveler un frisson. Une robe noire, simple mais ajustee a ma silhouette, tout en sagesse mais tellement provocante par son dos mise a nu. Comme une invitation pour un assassin ou un traitre qui frapperait par derriere.
Tu m’as chaussee de talons hauts rendant mes jambes interminables et d’un dehanche languissante dans ma demarche. On se retourne sur mon passage, je laisse l’empreinte d’un souvenir. Tu m’as parfumee d’audace et de malice, suave essence de delice. Tu as farde mes yeux et mes joues mais discrètement tu ne veux pas de vulgarite ou de grotesque.
Il me manquait la parole.Tu m’as offert un voix au timbre bas pour raconter des secrets, un peu tenebreuse pour une pincee de mystere, un peu cajoleuse, un peu moqueuse avec une legere vibration d’accent lointain.
J’etais alors a toi, mon ecrivain, mon maitre, mon faconneur, entièrement, sans retenues. Toi qui a si souvent caresse mes lignes de tes mots.
Et voila, qu’a moi, humble creature a peine eclose de ton imagination, tu m’offres une ame, un nom, une vibration interieure, un titre a porter avec fierte.
Merci pour ta confiance mon ecrivain, penseur de mots, mon père.
Je suis ton œuvre.
je suis desolee pour les accents mais je n'en ai pas sur mon clavier j ai parfois la chance d'en voir apparaitre un mais sinon je ne peux pas accentuer mes textes..
· Il y a presque 13 ans ·christinej