Jour de chance concours skylab

nico4g

 Lors d'une journée, un homme laisse libre cours à sa perversité.

Jour de chance


 
Être intelligent, c’est se rendre compte à quel point les autres sont cons.
Je suis très intelligent, pauvre de moi. Je n’aime pas les gens, pauvres d’eux.
Avec de telles qualités, je suis devenu le commercial number one d’un gros fournisseur. Mon patron est en effet en surpoids, image du bourgeois du siècle dernier. Il aime me taper sur l’épaule et m’invite chez lui pour admirer ce que je peux obtenir si je continue à être un bon petit soldat.
Vous me croisez dans votre hypermarché préféré, un catalogue sous le bras ou en train de ranger mes produits dans un rayon. Vous me demandez parfois où est passé le Babybel et je vous réponds, dans un sourire, que je ne suis pas du magasin.
Malgré ma misanthropie, je suis marié. Les quelques cultivés relèveront que misanthropie et misogynie sont deux choses différentes, mais connaissent-ils la définition de misandre ? Bref, ma femme est assistante sociale et je l’aime. Elle a de gros seins, un cul rebondi et cuisine les lasagnes au saumon comme personne.
Faut-il une raison pour vivre ? Comme on vit dans le culte du bonheur, nous avons voulu cultiver le nôtre, mais ne sachant comment faire, nous avons suivi de bons conseils. Déjà, avoir un gosse ; heureusement pour lui, je ne peux pas. Alors, nous nous sommes rabattus sur un autre rêve : devenir propriétaires.
Et puis, hier, suite à une bonne nouvelle, ma vie trépidante a pris une nouvelle dimension.
 
En ce samedi matin, je suis d’humeur guillerette. J’ai rêvé que j’étais un sniper. J’éclatais la tête de notre président lors de son jogging. Sympa.
Ma femme m’embrasse et me contemple dans mon plus beau costume, celui assorti à mon attaché-case, digne extension de mon bras long. J’y ai glissé un revolver, une enveloppe et une boîte de cirage noir. Direction Evry.
Je suis dans la rue, les cheveux au vent, le pas aussi décidé que mon regard quand un clochard me harangue.
« Hey, t’as pas un euro ou une clope, mon pote. »
Je sors mon paquet de Dunhill et m’en allume une. Je regarde ce déchet, qui me sourit et me tend la main, et je lui crache à la gueule.
« Montre-moi le chemin du bar le plus proche. »
Ce morpion de notre belle société ne s’essuie même pas le visage, il réussit l’exploit de paraître encore plus con.
« Hey, m’sieur, c’est pas cool ».
Je réitère ma demande et il accède à mon desideratum. Le chien suit son maître. Je le laisse entrer dans cet établissement cafardeux qui les accueille volontiers quand ils ont un collier. Mon entrée est remarquée et l’est encore plus lorsque je clame « tournée générale ! ». Les joueurs de PMU saluent mon initiative et l’immondice à mes côtés retrouve le sourire. Pas pour longtemps. 
— Sauf pour lui, dis-je en le désignant.
— Z’êtes méchant, m’sieur.
— Et toi, t’es con. Qui a raison ? Mais, ne t’inquiète pas, j’ai un beau cadeau pour toi.
On sort du bar et je l’emmène dans une ruelle à l’abri des regards indiscrets. J’ouvre mon attaché-case et en sors le revolver.
« Tiens, il s’appelle Michael Douglas. Prends-en soin et pour une fois, réfléchis. Qui est responsable de ta déchéance ? »
Je lui mets l’arme dans la main et le laisse avec ses yeux délavés.
 
Je me rends maintenant à la demeure de mon patron. Il doit être à son bureau, mais ce n’est pas lui que je veux voir. Arrivé, je sonne et la jeune maîtresse de maison m’ouvre. Elle me reconnaît et, passé un moment de surprise, me fait entrer.
— C’est mon mari qui vous envoie ? 
— Non, j’ai envie de te baiser.
Cette actrice joue l’incrédulité à merveille.
— Allez, j’ai bien vu comment tu me regardes quand je viens dîner. C’est sûr qu’avec ton mari, t’as dû oublier ce que c’est qu’un chibre.
Je l’entraîne de force sur le canapé du salon et lui arrache ses vêtements. Elle essaie de s’enfuir, se débat, mais je suis beaucoup trop fort. Une mandale la calme et je baisse mon froc et mon slip.
— Regarde. Il te fait pas envie ?
Elle détourne ses yeux humides et sa bouche s’ouvre quand je commence à lui caresser son clitoris. Mes lèvres sont deux pinces qui emprisonnent ses tétons à tour de rôle. Quand je la sens humide, je la pénètre et imprime un va-et-vient qui finit par lui arracher un « oui » de satisfaction. J’éjacule en elle, petit souvenir périssable de cette matinée.
Ses yeux expriment désormais la fureur, sans jeu.
— Vous, vous… vous pouvez dire adieu à votre travail.
Je me casse, ma mission ici est terminée, les égyptiens m’attendent.
 
Là encore, je fais sensation quand j’entre dans le quartier des pyramides et il ne me faut pas attendre longtemps avant qu’un garde vienne me saluer.
— Qu’est-ce qui veut le babtou ? 
— J’ai besoin de matos.
Je lui montre mon attaché-case pour lui faire comprendre que c’est sérieux.
Il me fait signe de le suivre et m’emmène dans un immeuble. On descend aux caves et il s’arrête devant une porte. Il tape trois coups, « sésame » peu élaboré pour pénétrer dans la caverne des quarante dealers. 
À l’intérieur, ils ne sont que quatre assis autour d’une table. Ils jouent au poker et « bédavent ». Me voilà donc avec cinq rebeus dans une cave en train de fumer un bedo. J’ai pas touché à un joint depuis la fac, mais je ne tousse pas. Les mecs me toisent de leur œil sec.
— Alors, tu veux quoi ? 
— Du GHB et une barrette de shit, et pas coupée au pneu.
— Zarma ! comment il se la raconte… Attends, p’tite baltringue, si je veux, je t’explose et je prends ta valise.
— Sûr, mais tu louperais une belle occasion de te faire des thunes. D’ailleurs, regarde.
J’ouvre mon attaché-case et le club des cinq découvre qu’elle ne recèle qu’une enveloppe et une boîte de cirage.
— Je travaille pour monsieur D. et je peux faire en sorte qu’Evry devienne le nouveau Corbeil.
— C’est quoi ces mythos ?!
Je sais qu’ils connaissent parfaitement les agissements de monsieur D. en tant que politique éclairé. 
— Monsieur D. a envie que vous vous intégriez. Baisez les petites blanches et laissez vos sœurs fricoter avec les français. Arrêtez de penser en arriérés. Vos frères du bled en sont à la révolution après leurs guerres de religion et leurs croisades à coups d’avions dans les tours. Prenez de l’avance, et comprenez que vous gagnerez en tant que cancer, pas en tant que virus. 
Mon discours fait son effet. Celui qui semble être le chef me répond d’une voix dédaigneuse.
— Les ratons font pas des veaux. Les français sont racistes et y a que sur un terrain de foot qui veulent bien nous voir.
— Tu as raison. Les basses classes auront toujours besoin d’un coupable à leur bassesse. Alors, faites en sorte de stigmatiser les noirs. Montrez que ce sont eux qui ont besoin d’un coup de karcher. Nous, on est là pour vous aider à devenir respectables aux yeux de tous. La semaine prochaine, mon « aide » sera remplie si vous êtes prêts à reconnaitre en monsieur D. l’homme de la situation.
— Ramène déjà la caillasse et si tu cherches à nous enfumer, c’est moi qui te fume. Souviens-toi de mon blaze :  Mehdi BGBM.
— Heureux de discuter avec un homme plein de bon sens. Puis-je avoir ma commande pour aujourd’hui ?
Medhi hoche la tête vers l’un de ses sbires qui ouvre une boîte posée sur la table et en sort deux sachets.
 — Cinquante keus.
Je lui donne un beau billet jaunâtre et échange ma marchandise contre l’enveloppe dans l’attaché-case. Je la remets à mon nouvel ami. Elle contient l’adresse de la femme de mon cher patron ainsi que ce petit mot : « Si vous n’aimez pas le porc, peut-être que cette cochonne sera à votre goût. » Il est temps de m’éclipser.
 

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