La femme qui haïssait les serpents
veroniquethery
Elle se promène souvent dans des lieux inaccessibles. Trop haut. Trop loin. Trop obscur. C'est ce que diraient les autres.
Mais, elle a l'habitude de fouler ces sentiers étroits. Les falaises abruptes, les grottes étroites, les contrées étrangères. Ses pieds vaillants avancent sans hésiter.
Elle connaît les périls. Les affronte sans peur. La peur, elle ne sait pas ce que c'est. Elle l'a su. Il y a longtemps. Elle n'était qu'une petite fille.
Les petites filles ne sont pas des femmes capables de surmonter les pièges des montagnes. Les petites filles tombent dans les crevasses. Elles sont broyées, écrasées. L'air ne parvient plus jusqu'à leurs poumons. Et là, quand elles étouffent, la peur les envahit. Serpent énorme qui les pénètre et dévore leurs entrailles.
Elle n'a pas peur des serpents. Elle en a déjà tué plusieurs. Quand on voit la vie quitter ces êtres, on comprend qu'ils ne sont pas si effrayants. Il faut juste être bien armée, bien préparée. Les débusquer. Faire preuve de patience. Attendre. Longtemps. Des journées qui filent plus vite que la peur des petites filles. Et puis, ce moment où enfin, elle peut voir le regard vitreux perdre tout espoir.
Elle aime cet instant. En quelques secondes, elle devient aigle royal dansant dans le ciel au-dessus des montagnes. Elle devient louve farouche des forêts profondes. Elle est une guerrière des temps barbares. Invincible, sanglante, impitoyable. Parfois, les serpents tentent de se battre. Ils se dressent, pitoyables créatures, incapables de comprendre que personne ne pourra les sauver. Détestables créatures que Dieu maudit, jadis, au point de les faire ramper dans la poussière.
Elle aime les voir ramper. La supplier. De leur regard de bête infâme. Elle sourit en les voyant. Mais, ils ne voient pas ce sourire. Son visage garde la froideur des statues d'albâtre des musées antiques. Son cœur reste mort, seul la petite fille en elle sourit. Si tristement.
Elle a tué son premier serpent quand elle avait 12 ans. Il l'avait mordue à l'intérieur. Avait mangé ses entrailles fragiles. Quand il l'avait libérée, elle était allée dans la cuisine. Avait pris un couteau et avait planté la lame dans le ventre énorme du serpent qui dormait.
Elle hait les serpents. Parce que son Père en était un.
Merci pour les compliments ! Cela encourage
· Il y a environ 7 ans ·veroniquethery
Excellent texte.
· Il y a plus de 7 ans ·petisaintleu
https://www.youtube.com/watch?v=d9cEY13bUTo
· Il y a plus de 7 ans ·enzogrimaldi7
belle montée en "suspens" quoique j'avais un peu deviné la fin (le serpent évidemment)
· Il y a plus de 7 ans ·zographou
Belle métaphore, imprévisible et étonnante chute...Bravo !
· Il y a plus de 7 ans ·Louve