La Néo-Hippie

dyonisos

Elle vit intensément, prend des pilules d'exta puis des pilules du lendemain.

CONCOURS NEON

 

« Tu l'aimes ma couronne de fleurs? » (à lire en faisant une petite moue espiègle, dans un murmure essoufflé, l'œil coquin, la bouche en cul de poule)

 

Et ce n'est pas n'importe quelle fleur. Ce ne sont pas des pétunias, ni de vulgaires géraniums qu'Isis arbore comme Cléopâtre portait sa couronne néret. Ce sont des fleurs de Tiaré, négligemment entremêlées, par un artisan-fleuriste place Victor Hugo – Paris 16. 89€. Et pourtant, elle lève son poing pour défendre des valeurs presque communistes emmitouflée dans sa chambre en duplex de 30m². Tendre enfant. Elle parle du destin de la Grèce en mangeant un grec de luxe de la maison Desnoyer.

 

Isis (elle se fait appeler ainsi même si son prénom de baptême, celui que ses parents avocats ont choisi, c'est Domitille) est en rupture totale avec son passé, avec son passif bourgeois : elle met des fleurs dans ses cheveux l'été venu. Met des robes Maje légères sans soutien-gorge. Fume des clopes Merit qu'elle pose sur sa lèvre inférieure légèrement, préalablement humidifiée avec un coup de langue invitant. Vit en bande, bande de filles apprêtées arborant des lunettes miroir. Tient une après-midi en terrasse de café avec un demi de bière blanche.

Elle s'assoit souvent par terre, en tailleur, au bord des quais pour « chiller » et faire chier les passants.

 

Au cours de SVT -où elle aurait pourtant appris les bienfaits du préservatif sur une grossesse non-volontaire- elle préfère la VESPA d'Etienne, un des soupirants qui vit à l'ombre de la jeune fille en fleur, à l'ombre de ses seins plutôt : ses engagements catholiques se sont évanouis à l'aube de ses 15 ans, dans le plus grand secret dans la villa familiale de Calvi. Cette jeune fille à fleur ne lit plus Proust d'ailleurs, comme le faisait sa mère. A la littérature, elle préfère son Facebook où elle consent parfois à distribuer des likes à ses BFF. Au Carpe Diem, elle opte plutôt pour le YOLO qu'elle a volé à l'autre côté du périph'. Elle vit intensément, prend des pilules d'exta puis des pilules du lendemain. « Oups, je crois que j'ai fait une connerie » (à lire en faisant une petite grimace, la bouche de guingois, l'air absent, encore ivre de la veille). Tendre enfant.

 

Elle parle peu, trop parler tuerait son mystère qu'elle cultive à renfort de filtres Instagram en se positionnant sur des mot-dièses de chipies, comme l'appelle sa mère. #thickgap, #parisienne #girlswithtattoo pour générer du like et recruter de nouveaux followers. Elle parle un peu à son psy quand même, elle le côtoie depuis déjà quelques années. Ils se connaissent bien. Il est un peu paumé sur la conduite à tenir. Elle aussi est un peu paumée notre hippie moderne, derrière son selfie, sûre d'elle, se cache encore la fifille de son papa. Fragile petite chose qui voit le monde à travers son iPhone 6+ et les snapchats qu'elle reçoit, qui voit beaucoup de choses mais ne croit plus en rien.

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