La pommade

Hervé Lénervé

Alors, docteur c'est grave ?

Je suis perplexe, vous voyez, cette ombre sombre, dans cette zone pâle, m'interpelle.

C'est un cancer de la mâchoire.

Vous savez lire les radios, vous ?

Non, je l'ai dit au hasard, j'ai bon ?

La chance du profane. Mais vous vous êtes trompé sur l'organe, c'est une radio du cerveau.

Ouf ! 

Ceci dit pour quelqu'un qui n'est pas du métier, vous avez l'oeil. Tenez, que voyez-vous sur celle-ci. Allez-y sans crainte, c'est la radio de votre voisin de chambre.

Cancer des testicules, phase terminale, métastases connectés à son smartphone.

Décidément, vous êtes fort pour les cancers, mais pour la localisation vous ne valez rien. Regardez c'est un pied, voyez avec l'autre radio, comme ça, clip, clap, vous voyez, ça marche.

Ah oui. C'est le pied ! Alors qu'allez-vous lui faire.

On va lui couper le pied, c'est plus sûr, puis l'autre, pour éviter toutes récidives et cramer son portable par sécurité.

Et pour mon cas?

On ne peut pas vous amputer de la tête. Ah, ah ! On va vous prescrire une pommade.

Ca marche ?

Mieux avec les pieds. Mais il faut bien faire quelque chose.

Autrement, vous croyez que je vais m'en sortir ?

Les pieds devant, assurément. Mais si cela peut vous consoler, votre voisin aussi.

Le pauvre.

D'ailleurs, si vous pouviez lui dire qu'il va mourir, cela me rendrait service. C'est toujours pénible à annoncer ces trucs-là.

Je comprends, je vais lui dire qu'il a de la chance que ce soit le pied, pour la pommade.

Good !

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