La soupape
petisaintleu
Les croisades et leur lot de barbarie qui décimèrent les populations arabes, cathares ou albigeoises ; l'inquisition ; le massacre de la saint Barthélémy ; les baptêmes forcés des sauvages des Amériques. Soit : autres temps, autres mœurs…
Le silence du Vatican sur le sort des juifs alors que l'on connaissait l'existence d'Auschwitz. La protection de nazis que l'on aida à migrer vers le Chili ou l'Argentine. Les historiens reconnaissent aujourd'hui le pragmatisme de Pie XII qui, en dénonçant le régime hitlérien, aurait ouvert les portes des camps d'extermination à des dizaines de millions de catholiques. C'était un moindre mal. Et l'exfiltration des anciens tortionnaires n'était que l'œuvre de rares prélats à la marge.
Jusqu'aux indicibles viols d'enfants et de religieuses.
Le cardinal se releva de son prie-Dieu en larmes. À quoi bon ces années d'abnégation, comment justifier les canons de l'Église, pourquoi ces positions dogmatiques ? Le Christ qui au nom du Père s'était sacrifié pour proposer la nouvelle alliance avait enfanté la plus hypocrite, la plus sanglante et la plus perverse des saintes trinités.
Il titubait sous le poids de ces péchés et de son incapacité à comprendre le cœur des hommes. À la sortie du séminaire, il avait hésité à emprunter le chemin d'un monastère. Il était fasciné par ces extra-terrestres pour qui le corps était un obstacle pour pleinement se consacrer à la prière et au salut des âmes. Le cancer concomitant de ses parents, il l'avait compris comme un signe du ciel et il avait finalement choisi la prêtrise.
Il avait vite été repéré. À trente-deux ans, il était évêque et à quarante il fut consacré dans le pourpre. Le souverain pontife appréciait sa jeunesse et son humour. Ils avaient développé un rapport de confiance et il put compter sur lui pour traiter les dossiers les plus délicats sans que les querelles de clocher ne viennent interférer.
Après les complies, alors qu'il aurait dû se plonger dans le grand silence, il se vêtit de ses habits séculiers ; un jean pattes d'eph , une chemise à carreaux et un blouson d'aviateur. Les mêmes qui depuis quarante ans l'accompagnaient dans ses pérégrinations nocturnes. Son corps était resté vierge des agressions du temps.
Il atteint le 60 de la via Antonio Labriola en vingt minutes. Il grimpa jusqu'au troisième étage et sonna ; trois coups brefs et quatre longs, comme d'habitude. Luiggi lui ouvrit avec un large sourire. Le prélat aimait l'appartement qui lui rappelait la quiétude de celui de sa grand-mère chez qui il avait cheminé vers sa vocation en lisant la Bible au rythme métronomique de la pendule. Le rituel était toujours le même. Après s'être recueillis quelques instants devant une reproduction de la pietà de Michel-Ange, il lui servait le café qui les tiendrait éveillé jusqu'à l'aurore.
Avant de s'extraire de la couette, Il admira longuement son corps. Une rai de lumière venait transcender son torse divinement sculpté. Il soupira. Où était le mal à admirer cette virilité qui était la beauté faite homme ? Il lui revient en mémoire un passage des Galates « Pour vous, mes frères, vous avez été appelés à la liberté; seulement ne faites pas de cette liberté un prétexte pour vivre selon la chair; mais, rendez-vous, par la charité, serviteurs les uns des autres. ». Où était le péché, où était la charité ?
Il avait rencontré Luiggi lors d'un pèlerinage à Lourdes, poussant son fauteuil jusqu'à la grotte. Le miracle ne s'était pas produit, enfin pas celui auquel ils s'attendaient. Depuis vingt ans, quand il était à Rome, il s'était toujours refusé à toute mondanité superficielle pour se rendre chez lui, dépoussiérant les meubles, récurant les toilettes, repassant ses vêtements avant de lui faire l'amour.
Il s'attarda un instant devant le Marie-Madeleine en extase du Caravage. Il sourit. Il était serein. Dieu reconnaîtrait les chiens.
alô, quelle fresque, je me croirais devant un Follet où un sujet historique donne naissance à des personnages et à une histoire parallèle, nous entrainant dans le dédale d'une intrigue à saveur canonique. Le grand questionnement. J'aime la déclinaison de cette longue histoire où se profilera un quotidien épuré. Ben voilà c'est mon feeling A+
· Il y a environ 5 ans ·suemai
C'est gentil, merci.
· Il y a environ 5 ans ·petisaintleu
J'ai juste envie d'hurler à la lune et je ne sais même pas pourquoi
· Il y a presque 6 ans ·caza
une soupape culbutée?
· Il y a presque 6 ans ·arthur-roubignolle
Je n'en sais rien. Je n'y connais rien en mécanique. Je suis plutôt de la pédale.
· Il y a presque 6 ans ·petisaintleu