La terre

rechab


 Des terres brunes,

collées à mes chaussures,

je n'ai pas voulu garder rancune...,

ce sont elles  que l'on devine

entre l'eau qui roule,

et les interstices des routes.

 

 J'ai senti pour la première fois

combien elle était

infiniment là , me portant

de sa masse sombre

où des forêts broussailleuses poussent

sur ses chairs inexplorées :

 

sur cette  terre humide

s'accrochant à mes pieds,

je me suis penché,
pour m'y étaler.


Elle  était douce  et tiède,

comme un souvenir tendre.

 
Il suffirait de creuser un peu,

et de sentir palpiter les racines,

de saluer les insectes et les petits êtres

dont  c'est le domaine,

les fougères me caressant

de leur ombre.


Je suis suspendu sur son manteau

- à la différence  de l'eau - .

C'est une  géographie neuve :

elle me  tient  dans  sa lande:

une sorte de gant

suit mon contour.


            Presque,           je sentirais sourdre

sa respiration,           s'exhaler  vapeurs,

       courir gouttelettes et ruisselets,

que les mousses expriment :

les arbres la goûtent,

comme son humus sucré     ou acide...


            Est-ce un monde inhabité ?

J'ai parlé des petits animaux,

de leurs passages  secrets,  de leurs  terriers,

mais combien d'hommes

dorment encore à toutes profondeurs,

et dont on ne se souvient plus ?


Le paysage  est redevenu sauvage,

( enfin ce qu'on pense comme tel

                 quand l'humain

         ne laisse plus de cicatrices

    après les morsures des chantiers,

et les cuvettes mortuaires des obus ) .


Bousculé sans ménagement,

le calme  revenu,

la végétation s'est empressée

de reconquérir l'espace dévasté

                                 sans faire de bruit,

et une petite jungle joyeuse prolifère ...


Le sol peut trembler,

la terre se retourner,

virant aux  antipodes,

Les soleils se diviser, la lune  sombrer,

j'aurai toujours les pieds posés

sur la terre brune....


Alors j'en prends une poignée

--- oh,         ...       presque rien.

pour en  ramener un peu chez moi,

la disposer dans  un pot,

           - que les plantes lointaines
           se souviennent de leur pays...-
 


C'est comme si ce prélèvement  amical

m'avait conduit

à une partie de mes origines.

            Cette poignée me parle

        dans sa matité       et son silence :

comme si j'en avais serré la main aujourd'hui .

-



RC

  • Une divine - et je pèse mes mots - description de la nature, c'est magnifique !

    · Il y a environ 5 ans ·
    Louve blanche

    Louve

    • merci... comme ce texte d'avant(hier était perçu comme long, je n'était pas sûr qu'il soulève tant d'enthousiasme... merci !

      · Il y a environ 5 ans ·
      Tulip  avr  21  03

      rechab

    • oui ! Beau et long ! :) ... et prenant

      · Il y a environ 5 ans ·
      Photo

      Susanne Derève

    • et j'ai tenu compte en partie de tes observations en modifiant un peu la teneur de l'ensemble..

      · Il y a environ 5 ans ·
      Tulip  avr  21  03

      rechab

  • très beau... Il faut des centaines sinon des millions d'années pour créer l'humus... En quelques semaines il est détruit par le Dieu Goudron...
    http://imago270.eklablog.com/adoration-du-dieu-goudron-a161801862

    Et puis...Connais-tu Gilles Lapouge ? A 96 ans Il donne la patate !!
    Amitiés

    · Il y a environ 5 ans ·
    Autoportrait(small carr%c3%a9)

    Gabriel Meunier

    • ce nom me dit quelque chose... c'est quelqu'un qui écrit ?

      · Il y a environ 5 ans ·
      Tulip  avr  21  03

      rechab

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