L’abécédaire des zygomatiques

christinej

Bon je suis partie dans un délire. Je me suis amusée, j'espère que vous aussi vous vous amuserez pendant votre lecture.


********


L'abécédaire des zygomatiques


Mon automobile refuse absolument de me faire un créneau carré.

J'aperçois les minutes s'accumuler, m'accablant de leur redondance.

L'affreuse affaire que voila, je suis encore en retard à mon travail. J'entends mon hallali aboyer au loin.

C'est Armageddon, l'apocalypse qui recommence chaque matin. Je bredouille des excuses vagues et branlantes, mais madame Zinger, babines retroussées, les prémices d'une bave annoncée en coin de bouche, balance sans retenue aucune,


- Balivernes mademoiselle Anne, vous n'êtes qu'une bonne à rien, incapable d'être à l'heure à votre travail. Vous n'êtes qu'un cloporte claudiquant, une chiffe molle, tout juste bonne à chuchoter et à crachoter derrière mon dos des divagations outrageusement dénigrantes.

- Bonjour à vous aussi madame Zinger. Je m'affuble d'un sourire de dessin animé, quand dans ma tête roulent les rouages d'un meurtre prémédité.


A chaque retard ce sont les mêmes élucubrations éléphantesques, qu'elle éjacule en mitrailleuse et en postillons sur mon délicat épiderme.

Madame Zinger est une vieille fille, fripée, très certainement frigide, folle de nature, féroce par gout.

Elle se goinfre de gâteaux, de ces petites gâteries gourmandes qu'elle gobe goulûment quand elle pense que personne ne la regarde.

Elle passe son temps à hurler comme une hystérique. Elle met un point d'honneur à horrifier et à humilier tout être humain harponné par ses soins.

Irritable. Irritée. Impitoyable. Elle lance des injonctions, injecte sa cruauté directement dans la colonne vertébrale des employés.

Jamais de sourire ou alors satanique, jamais de gentillesse. On ne voit que ses dents jaunies, nous claquer dessus, jurant, jugulant toutes joies naissantes, allant même jusqu'à voler notre jeunesse.

A grand renfort de kleenex. Nous exfolions nos larmes. Nous ne sommes que des divertissements dans sa kermesse. Plus je la regarde et plus je trouve qu'elle ressemble à une Kere*.


Nous passons notre temps à louvoyer pour nous tenir éloigné d'elle, longeant les murs, limitant au maximum tout contact. Nous nous auto-liposuçons pour liquéfier notre peur et lobotomiser nos craintes.

Elle nous lamine, nous lessive, cette matrone. Nous maltraitant sans vergogne, nous autres, pauvres employés de bureau, qui mâchonnons maladroitement les capuchons malchanceux de stylos Bic, dommages collatéraux de cette guerre.

Les nerfs en pelote de trombones, on note en sténo la nébuleuse notice négligemment dictée.

On tapote sur nos claviers d'ordinateur, l'oint d'oignon au bord de l'œil, une larme en ornement obstinément accrochée aux cils. On oublie les outrages passés et on œuvre comme de bonnes ouvrières que nous sommes.

On s'attaque aux programmes plombant, alignés sur des pages de paperasse, en pile de péplums interminables, elastifiant les heures en prolongations infernales.


Il faut atteindre le quota quotidien quitte à être des querelleuses en quête d'un peu de repos, quelle tristesse!!!

Pourquoi ne pas rester à la maison?

Pourquoi devoir accepter la rutilante routine de ce rustre travail?

Sans oublier le rude règne de la reine Zinger?


Les heures défilent sans suite.

Solitude du poste.

Stylo en main.

Service. Sourire en coin.

Sottises pensées.

Surveillance.

Soupape sous pression.

Secrétaires secrètement songeuses.


Mais le voila, je l'entends, il arrive, le tyran. Il tambourine des pieds, transpire comme un taureau. Le tsar tétanise même les mouches. Le téléphone collé au tympan, il toussote un ordre.

L'univers s'arrête, Zinger ouvre ses écoutilles, nous allons subir l'imminent ultimatum, l'usurpateur entre en scène, unanimement convaincu de sa valeur ajoutée.

Le big boss vocifère un vocabulaire volage et volatile. Il ventile son ventre d'un rire ventriloque. Il ressemble à une verrue sur la face du monde. Avec tout sa véhémence il vérifie, par toucher postérieur à l'appui, que les secrétaires sont bien culottées.

Alors comme Alice dans Wonderland, je passe de l'autre coté du miroir.

Waterloo et Wagram en fond d'écran, Wagner en musique d'ambiance.

Je deviens Xena la guerrière qui aurait oublié de prendre son Xanax.

Je commence à yodler, la gorge pris dans un yoyo cacophonique. Mon poil de yack tout hérissé, je suis vraiment énervée.

Ca suffit les réprimandes, la tyrannie et les mains au panier.

Je vais vous dezipper les zygomatiques moi!

Descendre la température ambiante au zéro absolu.

Zébrer, tel un Zorro zeroique, vos consciences avec mes revendications.

Par ce que moi ce boulot, c'est de A a Z qu'il me sort par les trous de nez.


Je veux être libre.

Faire la grasse mat jusqu'à l'indécence.

Rester en pyjama.

Jeter mon réveil.

Ne plus avoir à me soucier de rien..

Ne plus avoir d'argent…

Etre à la rue…

…. Oui … enfin…. peut être pas en fait.


- bien sur madame Zinger je m'en occupe tout de suite.


Heureusement que l'on peut toujours rêver… oui je sais… pendant mon temps de pause.



* dans la mythologie grecque déesse symbolisant la mort.

  • bravo pour ce délire drôlement bien mené!

    · Il y a plus de 9 ans ·
    Suicideblonde dita von teese l 1 195

    Sweety

  • la plume a très bien virevolté ;)
    macomment on prononce Zinger ?
    comme "zinguerre"
    ou comme "zinjerre"
    du coup ça me fait penser au film
    " le vieil homme et l'enfant", avec Michel Simon
    " - il faudra dire que tu t'appelles Longet..."

    · Il y a plus de 9 ans ·
    Mars 2012 063

    halpage

    • merci halpage
      pour le prenom c'est comme ginger (en anglais) avec un z je ne sais pas si cela aide

      · Il y a plus de 9 ans ·
      521754 611151695579056 1514444333 n

      christinej

  • Belle prouesse. J'admire.

    · Il y a plus de 9 ans ·
    Francois merlin   bob sinclar

    wen

    • merci c'etait juste un delire de plume

      · Il y a plus de 9 ans ·
      521754 611151695579056 1514444333 n

      christinej

Signaler ce texte