Le dit de Callisto

Voici l'histoire de Callisto,

une nymphe en cloque qui n'a pas eu de pot.

Il faut avouer que de la regarder on ne pouvait se lasser,

Tant les cieux s'étaient, à l'embellir, surpassés.

Son fiston s'appelle Arcas et il a la grande classe,

puisqu'une fois crevé, il s'en est allé

Faire briller le ciel de son éclat innocent,

C'est lui la petite Ourse, au firmament,

Et sa triste mère s'est posée à ses côtés

Grande Ourse pour l'Eternité.

Ecoute son chant, c'est tout ce qu'elle a pu faire,

Chanter sa lamente de l' amant inconstant, clamser.

Callisto j'étais et Artémis la fière,

La jumelle divine je suivais, comme si elle était ma mère.

Nous étions plusieurs à l'admirer,

Mais contre le droit de l'accompagner,

Elle nous avait fait jurer chasteté.

Ceinture, nada, que dalle, tout le tralala.

Mais c'était sans compter

Sur le mal que se donna

Zeus pour m'embobiner.

M'ayant remarquée derrière la Chasseresse,

Pendant qu'assoupie sous un arbre je faisais la sieste,

Il s'approcha.

Malin, il avait revêtu les atours de ma patronne.

Ouvrant l'œil, je n'y pris garde,

Et avant que je puisse dire Delta ou Phi,

A m'aimer il s'adonne,

Il s' introduit, il m'ensemence, ça sent le roussi !

Artémis au regard clair

Remarque bien vite lors de ma toilette

Dans le ruisseau, que je deviens rondelette.

Ah et maintenant, où est-il, mon amant imprudent,

Qui rendit ma boss vénère,

Et a foutu ma vie en l'air ?

Où sont ses yeux si prestes ?

Ah qu'il me rende mes bois aux effluves sylvestres,

Où jadis je me promenais, le cœur léger.

L'amourette est passée, mon giron s'est enflé de tout son fruit.

Partout où je vais, Artémis, au bord de la crise de nerfs, de près me suit.

Je suis la suivante suivie,

Dans les creux sous l'écorce, j'ai cherché un abri,

Aux cimes rougeoyantes le soir j'ai grimpé,

Et de couler n'ai pu mes larmes empêcher.

Mais il paraît que c'est hormonal,

J'étais en stand-by, fini de jouer la vestale.

Les dieux s'étaient tus,

De leur sphère m'ayant bannie pour avoir sauté plus haut que mes genoux.

Mais lorsque la bise se ramena,

Et que les arbres furent nus,

L'épouse de Zeus me vit et en ourse me transforma, par  courroux.

C'est ma Chasseresse qui s'acharna,

Lorsqu'elle me vit, ronde et impotente,

Elle me fixa d'un œil précis, se figea dans l'attente

Et sa flèche poison me décocha ;

En plein cœur me toucha.

C'est Hermès qui accoucha mon petit ourson de garçon,

Un rayon de lumière dans ces péripéties.

Et ce n'est qu'alors, quand je rendais sang et souffle joufflu,

Qu'enfin ce trouillard de Zeus reparut.

Il me trouva trop tristement belle,

Regretta, devant sa jalouse moitié,

De n'avoir pas même le petit doigt levé.

Ses larmes perlèrent sur moi, inerte,

Et loin de tonner,

Il fit le vœu de me donner

Une place de  déesse,

Pour m'avoir si cruellement désertée.

Il me fit  Grande Ourse, Ourse solitaire maîtresse,

Que seul son  enfant étreint.

Je brille encore dans l'espoir que Zeus me voie,

Et que ma reine des forêts de nouveau m'approuve,

Toute mère que je fus, je pleure ma mère la Biche, la Louve

Et le nom de Callisto est chagrin

Car je ne fus pas plus leste

Ni lucide

Que le désir divin et cupide

Et je n'eus d'autre choix que de choir.

Mon enfant ne me connut que livide,

Le ciel mon reposoir est sans amour bien vide.