Tonnerre
Laure Cassus
Tout d'abord ce film s'appelle Tonnerre car il se déroule dans une région qui commence par un B, la bourgogne, et de suite j'ai pensé qu'il aurait pu se dérouler à Brest, rapport aux tonnerres de Brest du capitaine Haddock, qui était le nom de mon chien auparavant. Une référence à Tintin, car tintin ça veut aussi dire un truc qui te passe sous le nez.
C'est une histoire de cœur contrariée entre un homme extrêmement magnétique et musicien, qui vient s'isoler chez son père. Il tombe expressément amoureux d'une très jolie jeune femme qui le quittera pour un beau gosse sportif. C'est la première fois que je vois un homme souffrir autant à l'écran, hurler de douleur, se tordre de désespoir et en venir à la menace.
Dans la salle je me suis placée le plus loin possible de l'écran, les jambes les plus croisées possibles, la tête la plus enfouie possible dans un large col roulé. Pourquoi j'avais besoin de distance ? Parce ce que ce synopsis me parle. Oui désolée mais je redoutais que ce film soit une projection d'une partie de mes impressions survenues justement avec un musicien qui semblait lire dans mes pensées quand je le voyais en concert.
Voilà c'est posé, j'ai un handicap de folie latente liée au fait que je suis l'heureuse propriétaire d'une imagination sans limite commune avec celles du réel.
Cela peut arriver aussi avec des chansons de nature universelle où il semble que les paroles te parlent et te conseillent directement sur ce que tu es en train de vivre. C'est un moment étrange où l'on se sent faire partie d'un tout avec beaucoup plus de subtilité dans le ressenti que ce qui se passe en général à l'état normal. Donc je suis atteinte de ce syndrome de la communication par le fantasme, ce qui normalement est réservé aux adolescents allongés sur leur lit.
Ce qui m'a rassurée dans le film c'est que justement cet homme est aussi franchement excessivement sentimental comme pourrait l'être un ado ou une personne totalement libre d'exprimer des sentiments sans même avoir à se préoccuper de savoir s'il s'agit d'amour ou de désespoir platonique. C'est comme ça qu'on dit n'est ce pas ?
Comment j'avais déjà vécu un état d'apesanteur inter personnelle avec un musicien à Brest, je venais au ciné pour recevoir la confirmation que c'était une illusion, puisque Tonnerre ou Brest, c'est à peu près même combat, je ne suis pas à un détail prêt avec les messages irrationnels. Que de précautions je prends...
Dans le film, aucun moyen de s'identifier à une actrice aussi jolie et jeune, à part, heu, peut être cette façon de se tenir les épaules un peu rentrées tout le temps. Un détail sans incidence. Puis il y eut ce blouson de cuir vert bien plus sympa et contemporain que le mien. Bon. Par la suite apparaît un mot dans une chanson italienne tandis qu'ils dansent un slow (vintage quand même ce big love). Le mot qui m'a fait paniquée car c'est sur ce type de chanson que je rêvassais il y a deux ans, c'est lacrima. Ok on a les mêmes goûts avec le réalisateur. Je sais pas comment les gens arrivent à rester indifférents quand une similitude avec leur existence se présente ainsi dans un film. Moi je me suis enfoncée dans mon fauteuil après un cri de surprise que je n'ai pas pu contenir (aie les voisins).
L'histoire continue, le gars est adorable d'attentions et de tendresse et la fille disparaît sans donner de news. En effet en général les hommes deviennent dingues avec ce type d'évaporation. Et j'avoue que c'est un truc que j'ai fait plus d'une fois dans ma vie, uniquement par peur et désarroi face aux paroles à trouver. J'admire celles et ceux qui formulent facilement leurs intentions et leurs ressentis, moi c'est pas mon cas sauf si je suis en situation d'éduquer quelqu'un sur lequel j'estime avoir une ascendance, liée à l'âge ou à une différence notoire. Ha la la ça se dit pas non plus ça .
Bref le film continue et l'histoire est à la fois très touchante et très banale, je me dis même que c'est un film pour bobos nostalgiques de leur 20 ans mais pourquoi pas, on n'est pas obligé de socio-politiser tout. En fait ça va pour moi mais uniquement jusqu'à ce que ça n'aille plus.
L'acteur choisi pour jouer le rival du héros a un nom, un mode de vie et surtout un profil et des yeux qui sont 100% équivalents à ceux d'un homme jeune que je connais. Alors là, je fatigue, mais où le réalisateur a-t-il été chercher exactement les visuels de mes histoires persos ? Hein ? Où ça ?
Alors c'est simple, je sors de là encore davantage marquée par le fait que, soit on lit dans mes pensées, soit je délire, soit il y a un endroit où se retrouvent les désirs et espérances des uns et des autres, et que certains artistes arrivent à les percevoir.
C'est pas très drôle de devoir s'exhiber ainsi, je le fais uniquement sous la contrainte d'une ordonnance médicale. Car le soir même je suis tombée malade avec un kyste de grande taille apparu d'un coup dans le sein gauche, ce qui ne m'a pas fait plaisir vu que j'ai l'âge de faire des mammographies et qu'on m'a donc aplati les seins en crêpe pour la 2eme fois. Ont suivies des oppressions cardiaques débouchant sur 15 jours d'arrêt de travail. Voilà le résultat.
Excusez moi mais je vais être obligée d'arrêter mon cinéma et de pratiquer le centrage intensif. Merci d'avance au scénariste et au réalisateur de ne pas envisager de suite à cette histoire, ou alors avec défibrillateur et assistance respiratoire ambulante.
Tonnerre de Guillaume Brac (ha bah voilà), 2013