Le Manoir de la Falaise

peter-oroy

La lande transpercée, écartelée, violée par le vent, laissait s'envoler des lambeaux de végétation arrachés par la furie de la tourmente dégringolant des nuées de pourpre sale du ciel. Des paquets de mer rugissante venaient s'affaler en bas de la falaise rongée par les vagues. Le ciel et l'océan s'étaient unis dans l'épouvantable tumulte des déferlantes. La terre semblait mugir de douleur sous les assauts répétés de la bourrasque.

Il y a des années de cela le vieux manoir planté sur la lande en face de l'ile de Batz fut le théâtre du crime odieux de Marilyn, l'épouse d'un capitaine au long cours, perpétré par un notable de la région et ses acolytes. Faute de preuves tangibles et peut-être à cause du laxisme et de l'incompétence des autorités de l'époque, l'affaire fut classée sans suite laissant une famille déchirée et goudronnant le village de Plouarden dans le malheur et la suspicion.

Bien des années plus tard pour les gens du village une vie surnaturelle s'empara du manoir. « La Folle » était de retour, disait-on. Une suite d'événements étranges émaillés de meurtres mais surtout le naufrage suspect d'un chalutier vinrent ranimer la chronique et déclenchèrent la venue de Cathy O'Roy Lieutenant de vaisseau de la Marine Nationale chargée de mission par le Ministère de la Marine.

Les premières investigations de Cathy la menèrent sur la piste déjà établie par l'amirauté d'un trafic de matière nucléaire.

En fille de marin Cathy s'intéressa à un magnifique cotre ancré dans la baie.

Ses recherches et son enquête provoquèrent immédiatement des événements belliqueux à son égard. On tentait de l'éliminer. Mais une main invisible lui sauve une première fois la vie.

Plus tard c'est grâce à son instinct de survie et au propriétaire du cotre, un journaliste enquêtant lui aussi sur les mystères du trafic que sa mission va prendre un nouveau tournant et son cœur chavirer pour Pierre Villefranche.

Les relations de Pierre avec un commissaire de la police Belge vont entraîner Cathy et Pierre en périphérie de Mons aux abords du château d'Hastière qui sera la proie des flammes. Incendie organisé par nos deux héros et qui favorisera la prise de mafieux internationaux et le démantèlement d'un réseau de trafic de matières fissiles agissant sous la couverture d'une société de pêcherie bretonne.

Comme les rails d'une perspective imaginaire les deux affaires semblent se rejoindre vers un point de fuite commun.

La découverte opportune d'un album de photos édité par un artisan du coin, le fourbe Chastain, va déclencher le processus de convergence qui amènera Cathy, Pierre et Mary-Ann sur les traces de Tréguillou, peu reluisant personnage aux méthodes assassines. Les événements vont se précipiter et resserrer l'étau autour d'un Tréguillou de plus en plus nerveux.

Au hasard de ses investigations Cathy retrouvera Mary-Ann la fille de son oncle capitaine au long cours dont l'épouse fut sauvagement assassinée un soir de Noël dans le manoir de la lande.

 

Pendant ce temps à Plouarden le meurtre d'un poivrot notoire qui dans son délire ne cessait de divulguer des informations quant au trafic d'uranium et reliant l'affaire à Tréguillou sur le meurtre il y a 15 ans de Marilyn, sera exécuté symboliquement près d'un chemin bordé d'un calvaire qu'une procession empruntera.

C'est après la fuite de Chastain que Cathy découvrira tous les sordides clichés destinés à être monnayés par le photographe, depuis le meurtre de Marilyn en passant par les preuves accablantes de la complicité de Tréguillou dans l'affaire de l'uranium jusqu'à l'assassinat en direct du vieux poivrot. C'est un Tréguillou fou de rage qui sera arrêté ainsi que ses complices.

Cathy retrouva définitivement sa jeune cousine au manoir – celle que les gens du village, par peur et superstition  appelaient « La Folle ».

 

Le lendemain Mary-Ann rejoignit son camarade et collègue dans son cabinet de la rue d'Assas et Cathy se rendit à son rendez-vous à l'amirauté. Ils mirent l'après-midi à profit pour retrouver Paris. Ils se rafraîchirent à la terrasse d'un petit café de la rue de Montpensier, déjeunèrent sur les quais et finirent l'après-midi sur un bistrot péniche.

En même temps que des galons, Cathy avait gagné quelques semaines de permission spéciale accordée pour services rendus à l'état. Mary-Ann reprenait ses consultations à la rue d'Assas. Pierre terminait le dernier chapitre d'un reportage mouvementé qui promettait de marquer les annales du journalisme. Mais Pierre n'oubliait pas la promesse faite à Cathy.

 

Dans la lueur argentée d'un clair matin, le BL 789052 prit le cap nord 2 degrés en direction des côtes écossaises après avoir traversé le 56e parallèle et passé la pointe de Fraserburgh. Dans la brise fraîche annonçant les courants de la Mer du Nord, un gros chandail écossais la protégeant du vent, les yeux cachés derrière des Ray-Ban qui lui mangeaient la figure, Cathy, fière capitaine, dirigeait dans un claquement de voiles le BL 789052 vers Inverness.

Le mousse à ses côtés s'activait sur le pont, maniant les winches sur les injonctions du capitaine O'Roy qui, de temps à autre quémandait un baiser qu'elle faisait durer le plus longtemps possible.

BL 789052 s'appellera désormais La Cathy.

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