Le Père Supérieur n'est plus.

Christophe Hulé

Mes frères, vous avez le droit de parler ce soir.

Je sais que je vous demande d'enfreindre les règles.

Le Père Supérieur nous a quitté il y a peu.

Ne me prêtez aucune intention mauvaise, je pense que chacun d'entre vous a envie d'exprimer sa tristesse, son effroi, sa colère peut-être ?

Oui frère Jean ? Je vous sens fébrile et désireux de briser la règle, lâchez-vous Non de Dieu !

- Et bien moi je propose qu'on aille chercher le meilleur vin au cellier.

- Et nos meilleurs fromages !

- Et le gibier !

- Bien, je vois que les langues se délient, je suis heureux de vous voir surmonter ce traumatisme, notre Père Supérieur le serait aussi, je n'en doute pas un instant.

 - Moi je propose que l'on invite les sœurs pour l'occasion.

- Enfin, je comprends votre douleur, mais de là à …

- Et bien quoi ? Vous nous avez enjoint de festoyer pour fêter, pardon, célébrer sans trop de dommage, le départ du Maître vers des cieux propices. Notre foi atteste qu'il gît au paradis.

- Bon, je vous l'accorde, mais de là à inviter les sœurs …

- Elles sont autant chagrinées que nous.

- Je me dois d'en référer à la Papauté.

- La Papauté s'en fout, fait la sieste ou bien pire, alors mon frère, personne ne t'a intronisé que je sache, se lâcher à moitié c'est saper le travail, Dieu attend mieux de nous !

- M'enfin !

- Allez les gars, on écarte les tables et on met la sono !

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