Le printemps européen

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PSCHHHHH… PSCHHHHH… PSCHHHHH…

J’ai presque 20 ans et je fais partie de la JRE, la jeunesse révolutionnaire européenne. Eh oui, 100 ans après ce que les journalistes ont appelé le « printemps arabe » a eu lieu ce que nous baptisons le « printemps européen ». Mais au lieu de combattre les dictateurs, nous combattons les marchés financiers, les spéculateurs qui imposent leur dictat aux pays qui se disent démocratiques.

Il a fallu 100 ans de crise, 100 ans de politiques de rigueur, 100 ans de récession et de chômage pour que les peuples du vieux continent se révoltent. Ce vieux continent si riche, si historiquement imbu de lui-même, a implosé en 2110 quand les gens, comme vous et moi, ont compris que voter ne leur donnait pas plus de liberté étant donné que les candidats, à quelque  élection que ce soit, étaient déjà formatés par les marchés. Annoncer ce que l’opinion publique voulait entendre et préparer en sous-main des accords avec les plus influents, tout le monde savait, plus ou moins, que cela se pratiquait. Mais tout le monde s’est voilé la face trop longtemps, voulant croire qu’un renouveau social était possible, comme le phénix qui renaît de ses cendres.

Le martèlement médiatique avait presque réussi à ôter son libre arbitre à la nature humaine qui, entre nous, ne demandait que cela : vivre sa vie sans problèmes et ne penser qu’à soi. Mais c’était sans compter sur les pauvres qui, devenant plus pauvres d’année en année, ont commencé à créer des réseaux sur le Net comme on lançait des apéros géants dans les années 2000. Sans compter également sur les vieux, de plus en plus nombreux, trop mal en point pour travailler, si seulement ils trouvaient du travail, et n’ayant même plus de retraite. Les caisses des États sont vides depuis des décennies à force de réformes, de mutualisations des moyens qui compliquent les démarches et créent des modes de calculs des salaires, des indemnités, des retraites, des prestations quelconques tellement complexes que même les services publics ne savent plus les mettre en œuvre. Enfin, c’était sans compter sur les mères qui, ne pouvant plus nourrir leur progéniture et ayant connu enfant un confort de vie bien supérieur, sont sorties dans les rues pour manifester. Elles ont été le catalyseur d’une révolution européenne qui a ébahi le reste du monde.

Aujourd’hui, après 1 an de chaos, je me prépare avec d’autres à une nouvelle action. Tant que l’argent circulera d’une élite à une autre, pour leurs seuls profits, nous continuerons le combat. Nous ne nous prenons pas pour des « bolchevicks » mais le modèle capitaliste et libéral n’a pas fonctionné non plus, il y a eu trop de dérives. Les dégâts économiques et sociaux sont, aujourd’hui, trop importants pour qu’aucun gouvernement puisse rattraper le coup.

Des villes désertées, des campagnes inondées de bidonvilles et des commandos comme celui dont je fais partie qui sabotent les quartiers des finances des grandes villes, les seuls encore habités, voilà ce qu’est devenue l’Europe en 100 ans, à force de spéculations et de décisions politiques prises en fonction du seul appât du gain.

Je ne sais pas si j’en reviendrai vivant, mais je sais que ma cause est juste même si elle peut paraître dérisoire. Je suis prêt à donner ma vie pour mon Europe, pour que le peuple européen retrouve sa dignité, pour que les enfants que je n’aurai probablement jamais, aient un avenir.

Sur les ondes : paroles de « Player Killer » pour la JRE, 2111.

PSCHHHHH… PSCHHHHH… PSCHHHHH…

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