Le sage qui ne voulait plus l'être
Loxias
Il était une fois, il n' y a pas si longtemps, un sage.
Il vivait reclus depuis plusieurs années non loin du village de La Fontaine-Daniel, dans la Sarthe. Il ne connaissait plus l'angoisse, ni l'Espoir d'ailleurs. Ne cherchant pas à vivre mieux, il semblait devenu définitivement inapte à la colère et au jugement. En revanche, il ne faut pas croire comme on l'entend parfois, qu'en tant que sage, il n' avait plus de désirs. Il avait des désirs, des envies, comme nous, mais il n'en subissait plus les conséquences. En effet, il ne voyait plus nulle part de "contradictions". Le conflit était la chose la plus naturelle du monde, et il s'en accommodait gaiment. Il vivait seul, mais en fraternité avec tous, lui comprit. Et, plusieurs fois par an, du village, on apercevait des étrangers, des voyageurs se rendre chez lui pour quelques jours et repartir sans même passer par chez nous. Ni en mal avec son passé ni en rupture avec rien d'ailleurs, il acceptait le monde.
Bref, il a alimenté ma soif de fantastique durant toute ma jeunesse et, vous l'aurez peut-être déjà compris, sa rencontre m'a transformé. J'ai eu le privilège de le connaître l'année de mes dix-sept ans. Nous avons passé de nombreuses heures ensemble, attablés à son unique meuble, à rire beaucoup, pleurer un peu, parler surtout et encore…Jusqu'à ce qu'il me demande ceci, il y a à peu près cinq minutes :
Prends cette feuille là, et le crayon. Tu vas écrire quelque chose pour moi. Tu commences par raconter brièvement ce que tu sais de moi, puis nos entrevues, puis tu en viens à moi qui te demande d'écrire quelque chose. Quand tu en es arrivé là tu me préviens, et tu écris "o.k", o.k ?
O.K
Bien, écris maintenant mot pour mot ce qui va suivre, cette phrase comprise, finis là par deux points et ouvre les guillemets :
"Si ce testament est un jour lu par quelqu'un en quête de lui-même, il y trouvera sa perte. Si cette personne continue à lire à présent, c'est qu'elle la cherche.
Je suis devenu il y a plusieurs années le pivot de ma vie. Si je n'avais peur d'être mal lu, je dirais même que je suis la vie. Mais il y a pourtant une chose dont je suis sûr, c'est que je ne l'ai pas voulu. Je me suis éveillé un jour, sans jamais avoir rien fais pour cela. En effet, je ne connaissais rien aux notions de travail intérieur, hygiène de vie etc… Je suis devenu ce que je suis malgré moi, sans ma participation. Depuis ce jour, je n'existe plus vraiment.
Je fais écrire ces mots par une victime dans le but d'en faire de nombreuses autres. Car si j'arrive à faire le mal dans la lumière qui m'habite, alors je serai libre. Et la vérité est en deçà de l'être humain. Rendez-vous compte, contrairement à tous, je n'ai pas le choix…Le juste s'impose de lui-même. Ce n'est pas moi qui commande à mon coeur ni à mon bras, tout est parfaitement coordonné. Je ne suis qu'un instrument. J'aimerais tellement l'oublié. C'est dans la discorde que l'on fait preuve de vie, dans le conflit, dans l'erreur. Comment faire maintenant que je suis hors d'atteinte pour revenir parmi les miens ? Je bave devant ce qui fait votre identité, à vous les autres humains. Je bave devant vos tares. Si vous saviez comme c'est la chose la plus digne qui soit. N' ouvrez pas les yeux surtout, ou vous disparaîtrez.
Je te laisse le choix de rajouter un titre à cette fichue blague. Fermer les guillemets."
"Car si j'arrive à faire le mal dans la lumière qui m'habite, alors je serai libre." cette phrase est si marquante !
· Il y a presque 4 ans ·k-short-stories
Merci, perso je te découvre et j'adore, hâte de lire tous tes textes.
· Il y a presque 4 ans ·Loxias
Merci beaucoup, ça me fait vraiment plaisir !
· Il y a presque 4 ans ·k-short-stories
Pas mal ;)
· Il y a plus de 13 ans ·nylou