Le silence est d'Or
clouds6
Les fleurs pourrissaient, mais personne ne daignait les changer. Personne ne s'en sentait capable. C'était trop dur, car cela signifiait faire perdurer la mort. Raviver la douleur, la faire renaître, à chaque changement d'azalées dans le vase. L'épitaphe était magnifiquement écrite. Les mots gravés semblaient si purs, si froids. Comme le marbre de la pierre sur laquelle ils étaient écrits.
Ici gît mon amour. Ici gît l'espoir d'une vie. Comme celle qu'elle portait en elle. À quoi ressemble-t-elle désormais ? Mon dieu, qu'est-ce que le temps a bien pu faire comme ravages sur ton si beau visage... Plus jamais je ne croiserai ton sublime regard. Plus jamais je ne toucherai tes douces mains. Plus jamais. Et, bordel, c'est bien trop dur à s'avouer. Voir partir la personne qui nous tient le plus à cœur est si cruel. Personne ne mérite une telle chose.
Je crois qu'il m'est déjà arrivé de m'endormir sur ta tombe. Chaque matin je prends le même chemin, emmitouflé dans mon manteau, puis je m'agenouille. Et sans que je commande quoi que ce soit, mes yeux pleurent, et pleurent, encore et encore. Des larmes de cristal. Elles tombent sur le sol, faisant l'effet d'une bombe dans mon cœur. Et une larme pour ta disparition. Et une autre. Et une millième encore. Et je reste là, tranquille, appréciant la splendeur de l'endroit, et son calme paradisiaque. Je suis seul au beau milieu de la brume. Je suis seul mais je sais que tu n'es pas loin. Les heures passent. J'ai constamment cette boule au ventre et dans la gorge, qui me coupe l'appétit, et toute autre envie. La nuit tombe doucement, et la fatigue commence à se faire ressentir. Petit à petit, je m'endors, maintenant allongé sur le sol. Et puis je me réveille en même temps que le jour. L'aube est le moment que tu préférais dans la journée. À chaque fois que le soleil se lève, il marque un renouveau. À chaque fois que le soleil se lève, tu te levais aussi. Plus belle à chaque fois.
Les choses changent brusquement. Le bonheur et la routine commençait à peine à s'installer, que la mort s'était déjà emparée de toi. Tu es partie si vite. Tout allait si bien. Tu m'as été arrachée, et c'est à contre-coeur que je t'ai vu partir. La scène repasse en boucle dans ma tête. Cela devient de plus en plus horrible. Je revois sans cesse cette voiture arrivée à vive allure, un crissement de pneus, puis ton corps sur le par-brise éclaté en millions de morceaux. Ton si petit corps, fragile, débordant de vies. Oui, tu portais bien deux vies en toi. Cette journée devait s'annoncer si merveilleuse... Quelques enfants jouaient dans un parc, on les entendait rire de là où nous étions. Tu te souviens ? On s'était dit que le notre serait aussi heureux.
En réalité, tu portais même une troisième vie en toi : la mienne. Tu étais la seule, qui a su posséder mon âme et mon coeur, sans que je puisse y faire quoi que ce soit. Et maintenant... Maintenant je deviens quoi ? Quand je rentre chez nous, ma gorge se noue, je perds l'équilibre, ainsi que toutes notions de temps et de stabilité. Éclater en sanglots. C'est bien la seule chose que je voudrais faire. Mais je me dois de rester fort, car je sais que tu n'aurais jamais voulu me voir triste. Me voir ainsi déchiré, et totalement perdu.
Le destin en a voulu ainsi. J'ai jamais vraiment cru en Dieu, mais s'il existe bel et bien, il a plutôt intérêt à bien prendre soin de toi et de notre enfant. Jusqu'à ce que je vous rejoigne en tout cas. Et cette idée, de monter là-haut, commence à me venir à l'esprit de plus en plus. Ma présence sur terre est inutile dès à présent. J'aimerais rester pour ta famille et pour la mienne, pour leur montrer que je suis fort. Mais depuis ton départ je ne les vois plus. À vrai dire, je ne vois plus personne. Je me laisse emporter par le manque de ta présence, je me renferme comme une petite fleur au crépuscule. Je n'ai plus de mot, plus de force, plus d'appétit. Sans toi, je ne suis réellement plus rien. Je vivais pour toi. Avec toi. Et c'était tout. Cela me suffisait.
Les fleurs pourrissent, et je n'ose les changer. Malgré la difficulté à voir le temps tout transformer, pour moi ces fleurs te représentent, voilà pourquoi je refuse d'y toucher. Mes mains sont sales, pleines de regrets et de peine, elles ne mérite en aucun cas de toucher une beauté si pure comme celle que tu étais.
L'amour vit encore, oui, il s'est juste envolé. Et dans un bruissement d'aile, on peut encore le voir s'élever. Il est là, tout proche du ciel. Reliant les deux mondes. Me donnant cette impression de t'avoir encore près de moi.
Parfois il m'arrive de te sentir, d'entendre encore ta voix. Triste songe... J'ai beau tendre les bras, ton corps n'est pas là. C'est dur de se faire à l'idée, mais c'est pourtant crucial. Tu es partie, ma douce, ma belle. Tu es partie, mais sache que quand je serais à nouveau avec toi, nous pourrons reprendre notre vie.
Ow, et bien, je ne pensais pas que mes mots pouvaient avoir autant d'effet... Je suis étonnée et ravie !
· Il y a plus de 11 ans ·("Alice Madness Returns" est le jeu sur xBox ou bien je fais complétement fausse route ?)
clouds6
Envie de verser une larme. Je suis bouche-bée et j'vois presque ces fleurs fanées sous mon nez. D'un ton pâle sur le marbre grisâtre... Je ressentirais presque la tristesse de cet Amour dans la Mort. Ces tristes visions et imaginations du pauvre homme, de sa bien-aimée au visage décomposé sous terre... Tes textes ne cesseront jamais de me surprendre.
· Il y a plus de 11 ans ·(Oh et comme j'aime bien faire savoir les références auxquelles je pense quand je lis quelque-chose que j'aime, pour le titre, j'ai pensé à "Le silence est d'or, mais le mien vaut moins" dans "Alice Madness Returns")
Sandra Von Keller
Contente de voir que ça plaise !
· Il y a presque 12 ans ·clouds6
magnifique ... un texte qui sort de tes tripes, pur et émouvant, l'Amour sublimé ...
· Il y a presque 12 ans ·woody
Je prends en note ces suggestions et j'en tiendrais compte en améliorant mon texte.
· Il y a presque 12 ans ·Merci !
clouds6
Un très beau texte! J'aime beaucoup.
· Il y a presque 12 ans ·Deux suggestions: Peut-être pourriez-vous laisser la nouvelle s'écouler, comme une lettre écrite par lui à celle qui a disparu, et ne dévoiler qu'à la fin cette belle idée qu'il est peut-être sur sa tombe à elle et qu'il s'y serait endormi?
Il faudrait utiliser le tutoiement dès la première phrase et ne plus le lâcher.
Frédéric Clément