Le silence sera la fin

rcclarence

1er decembre

_ « Mais puisque je vous dis qu’ils ont disparu ! Rien n’a bougé chez eux. Pas même leur voiture ! Quand je suis arrivé, la table était dressée, un rôti d’agneau cuisait dans le four mais personne dans la maison, le garage ou le grenier ! J’ai attendu plusieurs heures et j’ai appelé leurs voisins et amis. Personne ne les a vus. Même dans les hôpitaux et les cliniques ! Ils ne sont nulle part ! Ils n’ont laissé aucun mot et ils ne répondent pas au téléphone. Même s’ils avaient dû partir précipitamment, ma mère aurait éteint le four !»

Une heure ! Une heure que je suis coincé dans ce commissariat surchauffé à expliquer à ce représentant des forces de l’ordre que Oui ! Mes parents ont disparu et que Non ! Ils ne se sont pas envolés sur un coup de tête.

Aucun de mes arguments ne l’ébranle. La loi, c’est la loi. Ils doivent attendre 24h avant de rechercher une personne majeure.

Je tape du poing sur le comptoir dans un excès de colère.  Le gendarme me préviens du regard, encore un manquement au respect de ma part et j’aurais de sérieux problèmes.

_  « Revenez demain s’ils ne sont pas réapparus. »

Dans un mélange de frustration intense et d’angoisse diffuse,  Jeff ( ?) quitte le commissariat pour s’engouffrer dans la nuit froide de décembre. Dehors, les lumières rependues dans le village annoncent l’approche de Noel. D’ordinaire, les centaines de petites ampoules clignotantes réveillent toujours en lui un sentiment de bien-être et de plénitude. Mais pas aujourd’hui.

 Par sécurité, Jeff décide de revenir chez ses parents. Au cas où ils reviendraient pendant la nuit. Au fond de lui, Jeff sait qu’il y a peu de chance pour que cela arrive. 

Arrivé sur le pas de porte, il eut un moment d’hésitation. Il ferma les yeux et malgré lui, il s’attendait à trouver les lumières allumées, l’odeur du repas qui n’attend que lui, la chaleur de l’accueil de ses parents. Mais pour la première fois, c’est dans une maison vide et froide qu’il pénétra.

A peine une heure après être arrivé, la sonnette de la porte retentit aux oreilles de Jeff comme un électrochoc. Il se précipita pour ouvrir et tomba face à une jeune femme souriante qui ne lui laissa pas le temps de parler.

_ « Je m’appelle Tia Harbourg, je suis de la police et je voudrais vous posez quelques questions au sujet de vos parents. »

Le cœur de Jeff semblait exploser dans sa poitrine.

_ « Vous les avez retrouvés ? »

_ « Non. Je veux juste éclairer certains points avec vous. »

Jeff entrouvrit plus largement la porte et Tia s’engouffra dans la maison. Pleine d’assurance, elle se dirigea directement dans le salon sans y être invitée.

_  « Je suis déjà venue il y a quinze jours. Votre mère est venue nous signaler la disparition de Titus. Je pense que les deux affaires sont liées.» Expliqua-t-elle avec vigueur

Jeff avait beau chercher, il ne voyait pas en quoi la fugue d’un bulldog avait un rapport avec la disparition de ses parents.

Il invita Tia à s’assoir sur l’un des deux fauteuils du salon et il s’effondra dans le sien.

_ « Je ne comprends pas ce que vous voulez dire. Ce chien s’est déjà échappé pas mal de fois. Je ne vois pas le rapport et puis cet après-midi votre collègue m’a dit qu’il fallait attendre 24h avant qu’un adulte soit porte disparu. Pourquoi vous êtes là au juste ?»

L’assurance de la jeune femme semblait s’estomper dans ce fauteuil trop grand pour elle mais elle gardait toujours son sourire.

_ « Je suis une toute nouvelle recrue. Une bleusaille si vous préférez. Imaginez, une jeune femme flic dans un village de campagne perdue ou il ne se passe pas grand chose. Mes supérieurs ne me confient pas de vraies enquêtes, je n’ai droit qu’aux problèmes de voisinage et aux chiens perdus. » Elle dit cela sans amertume, comme résignée.

Jeff ne voyait pas trop où elle voulait en venir.

_ « Pour être honnête, reprit-elle, je ne suis pas la officiellement. Je souhaite juste vous poser quelques questions pour vérifier une théorie. »

_  « Allez-y. » L’invita Jeff.

_ « Racontez-moi toute l’histoire.»

Jeff répéta à la jeune femme la même chose qu’a l’officier qu’il avait vu plus tôt dans la journée. Il parla près de dix minutes, vers la fin de son récit, sa voix s’éraillait. Pendant ce temps, Tia notait tout ce qu’elle jugeait important sur un petit carnet à spirale bleu marine.

_ « Alors ? C’est quoi votre théorie ? »

Tia semblait ménager son effet. Elle referma lentement le carnet et le rangea dans la poche de son manteau, puis elle s’avança vers Jeff comme pour lui confier un secret.

_ « Depuis la semaine dernière, on a enregistré plusieurs cas de disparition suspecte dans la région de Castres. Elles se sont toutes produites en périphérie d’un centre de déchets en cours de décontamination. »

Jeff la coupa.

_ « Vous voulez parler du site de Lavaur ? »

Tia parue étonnée.

_ « Vous connaissez ? »

_ « Oui, je travaille pour EcoEarth, c’est l’entreprise qui dépollue le site avec une toute nouvelle technologie respectueuse de l’environnement. »

_ «  Vous faites quoi la bas ? »

Jeff sourit légèrement gêné.

_  « Je ne suis pas ingénieur, juste un petit informaticien. »

Cette dernière information semblait intéresser particulièrement la jeune femme.

_  « Vous êtes au courant de la politique d’EcoEarth concernant les propositions de rachats des biens immobiliers dans cette région ? »

Jeff n’eut pas à réfléchir. Il raconta ce qu’il savait à Tia. Le bruit courait depuis un moment déjà que le président d’EcoEarth voulait implanter une antenne sur son premier site de dépollution. Le succès de la dépollution de l’ancienne décharge devait devenir un endroit symbolique pour l’entreprise. »

_ « Plusieurs des disparus ont reçus une offre avant de se volatiliser. » Lâcha Tia.

_ «Et vous pensez que EcoEarth est coupable ??? » S’exclama Jeff d’un ton incrédule.

_ « Au début, oui, je le pensais. Mais depuis quatre jours, d’autres disparitions ont été signalées dans des villages plus écartées de cette zone. J’ai essayé de faire des regroupements entre celles-ci mais il semble n’y en avoir aucune. EcoEarth n’a fait aucune proposition au deuxième groupe de disparus. » Conclu Tia d’un air abattu.

_ « Et c’est tout ? Vous n’avez pas d’autres éléments ? »

Tia s’enfonça dans le fauteuil et joua machinalement avec son stylo l’air pensive.

_ « Si. Les personnes disparues ont le même profil. Tous des agriculteurs ou des personnes travaillant la terre et ils ont tous signalé quelques jours avant, la fugue d’un animal. Est-ce que c’est le cas de vos parents ?»

_ « Depuis leur retraite, ils ont acheté une petite parcelle de terre en dehors du village ou ils cultivent un grand potager. » Répondit-il d’une voix blanche. « Est-ce que… est-ce que vous pensez qu’ils sont…enfin que… » Jeff ne finit pas sa phrase et prit sa tête entre ses mains pour tenter de se cacher l’horreur de la situation. Sa gorge le brulait et il sentait comme une pelote d’aiguilles répandues dans sa poitrine. Il se força à respirer, sa tête tournait à cause du manque d’air. La colère montait progressivement en lui et faisait gonfler la veine de son cou puissant.

_ « Pourquoi vous n’avez rien fait avant ? Pourquoi personne ne fait rien ? » Hurla-t-il sur la jeune femme.

Jeff ne le réalisa qu’après, mais il s’était lever du fauteuil  et menaçait Tia en la pointant du doigt.

 Jusqu'à présent, elle n’avait pas fait attention à la stature de colosse de l’homme en face d’elle. Avec ses épaules aux trapèzes épais, il avait des airs de minotaure en furie. Tia ne dit rien et attendit que Jeff se calme.

Effectivement, après de longues secondes, il se recroquevilla dans son siège et se mit à fixer intensément le feu qui léchait les briques de la vieille cheminée.

_ « Pour l’instant, il n’y a eu que neuf disparitions reparties sur trois villes limitrophes. Concrètement, cela ne représente rien au niveau statistique. Vos parents sont les premiers dans notre département. J’ai envoyé un rapport à la direction régionale pour alerter le préfet de police et je vais surement recevoir une mise à pied pour mon initiative. » Conclu-t-elle cyniquement. 

Jeff n’eut aucune réaction mais ses yeux rouges indiquaient clairement qu’il retenait ses larmes. Tia reprit.

_ « Venez demain, en début d’après-midi. Je prendrais moi-même votre déposition. »

Sans quitter le foyer rugissant, Jeff lui demanda quelle était sa théorie.

_ « Des théories, j’en ai plusieurs mais aucune ne me semble probable. Pour être honnête, j’ai même pense a une invasion de petits hommes verts ! »

Cette dernière phrase eu au moins le mérite de ramener le regard de Jeff sur Tia.

_ « Je vais faire tout mon possible pour trouver la vérité. » Promit-elle.

_ « La vérité est ailleurs Scully. » Annonça Jeff de sa voix palie par l’émotion.

Tia sourit en baissant la tête. 

_ « Je vous attend demain. » En se levant, elle lui tendit une carte de visite à son nom.

_ « Juste au cas où. » Rajouta-t-elle.

Jeff la regarda déposer son képi sur sa coiffure en chignon réglementaire. Il vit partir cette jeune femme dans sa parka trop grande pour elle, avec le sentiment étrange que rien ne serait plus jamais comme avant.

Il avait besoin d’un verre pour passer le gout amer qu’il avait dans la bouche. Il se leva et prit directement du bar, une bouteille de vieil armagnac et vida un verre, puis deux. A partir du quatrième, il ne sentait plus la brulure de l’alcool.

Sans rien dans l’estomac, le spiritueux le saoula rapidement. Dans une veine tentative pour colmater une probable future gueule de bois, il voulut se servir d’un peu du gigot qu’avait préparé sa mère.

Mais la viande qui avait gélifié dans la graisse de cuisson lui donna envie de vomir. Il laissa tout en plan dans la cuisine et partit retrouver sa chambre de petit garçon.

Il ne se déshabilla pas complètement et garda son caleçon et son tee-shirt. En s’enroulant dans la couette en duvet d’oie, il repensa a ses jeunes années. Il se revit enfant, emmitouflé dans cette même couverture, par un soir d’hiver identique, avec sa mère qui lui lisait une histoire sur un Père-Noel auquel il croyait encore à cet âge-là. En s’endormant, il pria pour que le lendemain soit porteur de bonnes nouvelles. Mais ce qu’il ignorait, c’est qu’il n’y aurait plus jamais de meilleur lendemain.

2 Décembre

Avant même d’ouvrir les yeux, il sut qu’il allait vomir. Il n’eut pas le temps de sortir du lit et inonda le vieux parquet de ses sucs gastrique. Il avait l’impression d’avoir l’estomac et la gorge en feu, la lumière du jour brula ses rétines et enflamma son crâne. Son empire pour un verre d’eau. Il fallait qu’il se lève et tenta de bouger. Chaque mouvement malmenait ses membres ankylosés et lui arrachait une grimace. Il avait l’impression d’avoir été roué de coup.

Il s’assit doucement et lâcha un rot alcoolisé. Apres quelques minutes de lutte avec les draps, il réussit à sortir du lit en évitant la flaque de vomi.

Il se dirigea comme un automate jusqu'à la salle de bain et avant même de boire, il pissa longuement en débordant sur la cuvette des WC.

Il accueillit l’aspirine trouvé dans la boite à pharmacie comme le nouveau messie et il le but d’une traite. La douche tiède lui fit du bien.

Il s’habilla avec les vêtements de la veille qui trainaient sur le plancher puis descendit à la cuisine. Il fallait qu’il avale quelque chose. Vomir l’avait soulagé mais il était encore légèrement nauséeux. En ouvrant le frigo, il trouva le St Graal des déboires alcoolique, du coca frais. Il but les deux tiers de la cannette d’une seule traite. Il rota à nouveau et se sentit légèrement mieux.

Par automatisme, il alluma la télévision mais sans mettre le son. Sur la première chaine, il tomba sur le journal télévisé, en zappant sur les autres chaines, il constata que toutes diffusaient les mêmes images. Il mit le son et la voix de la présentatrice résonna dans toute la cuisine.

_ « Aujourd’hui, nous sommes sans nouvelles de près de 300 personnes vivant dans la région du Tarn-et-Garonne.  En effet, depuis ce matin ce sont des dizaines et des dizaines de proches venus signaler la disparition d’une ou plusieurs personnes. Des maris, des femmes, des enfants et parfois même des familles entières qui se sont volatilisées en laissant tout derrière eux. Les théories les plus folles circulent. Certains avance la cause d’une invasion d’extra-terrestre venus nous détruire, pour d’autre ce sont des expériences du gouvernement qui ont mal tourné. Une des plus véhiculée par internet serait que le gouvernement a enlevé ces personnes pour les cacher dans des abris anti- atomiques en cas de fin du monde. Depuis ce matin, beaucoup de groupe de fanatiques manifestes dans les rues pour être eux aussi choisit pour survivre en cas extinction de la race humaine, programmé par les Mayas au 21 décembre 2012. Je vous propose d’ailleurs d’écouter un des responsables  de FDM2012, littéralement, la fin du monde en 2012… »

Ces quelques paroles de la présentatrice télé furent comme un électrochoc pour Jeff. Il se rappela immédiatement pourquoi il était chez ses parents et pourquoi ils n’étaient pas là avec lui. Une nausée le plia en deux et il vomit dans l’évier de la cuisine. Cette fois-ci, cela n’avait rien à voir avec les effets du trop-plein d’alcool.

Dans le brouillard de sa gueule de bois, il tenta d’organiser ses idées sans céder à la panique. Il fallait qu’il appelle la femme flic qui était venu la veille. Léa, Clara ou un prénom comme ça qui finit en A.

Il se rappela qu’elle lui avait laissé une carte en cas d’urgence. Il l’a chercha pendant quelques minutes en énumérant consciencieusement une bordée de jurons. Puis enfin, il l’a trouva, ainsi que son téléphone portable. Dieu merci, il avait encore de la batterie. En touchant l’écran tactile de son smart phone, Il vit qu’il avait reçu plusieurs appels en provenance d’un numéro inconnu. Il décida de s’en occuper plus tard et composa le numéro de Tia.

_  « Monsieur Lisen ? C’est pas trop tôt, ça fait une heure que j’essaie de vous joindre. Je vous ai laissé au moins quatre ou cinq messages. Ou êtes-vous ? »

Jeff, qui avait reculé le combine de son oreille pour ménager son mal de crane, essaya de se composer une voix qui ne transpirait pas la peur.

_ « Qu’est ce qui se passe ? » Articula-t-il du mieux qu’il put.

Tia ne compris pas le sens véritable de sa question et lui parla du message important qu’elle avait à lui transmettre.

_ « Venez immédiatement au commissariat ! » Ordonna-t-elle.

_ « Oui, très bien. J’arrive. »

_ « Une dernière chose. Quand vous arriverez aux barrages de l’armée, présentez ma carte de visite et dites que vous venez me voir. C’est compris ?»

Le ton autoritaire de la jeune femme le rassura un peu. Elle savait ce qu’elle faisait, elle représentait l’ordre et ne le laisserait pas tomber.

_ « Euh oui…mais de quelle armée vous parlez ? »

_ «  De quelle armée je parle ? De quelle armée je parle ?? Mais de la nôtre bien sûr ! Vous n’avez pas écouté les messages d’alertes diffusés par la voiture mégaphone ? Toute la région est sous le couvert de la loi Marshall ! »

L’angoisse reprit Jeff aux tripes.

_ « Quoi ? »

_ « Venez sans plus attendre ! Je vais vous expliquer. » 

Jeff rassembla toutes ses affaires et prit quelques photos de famille en plus. En refermant la porte de la maison de ses parents, il avait le sentiment prémonitoire qu’il ne reviendrait jamais ici.

Il mit quelques minutes avant de partir car le givre bloquait le pare-brise. La chaleur du chauffage se rependit dans ses veines.

Sur la route, il croisa plusieurs tout terrains pleins d’hommes en uniforme. En traversant, le village, il les voyait poste a chaque angles de rues avec un fusil mitrailleurs en bandoulière, prêt à tirer. Ni Jeff, ni ces parents n’avait connu la guerre mais ce jour la, il eut l’impression de traverser un territoire occupé. Cinq kilomètres avant le commissariat, et comme l’avait prévue Tia, il fut arrêter a un barrage. Il suivit les instructions donnes par la jeune femme et pu repartir sans problème.

Il fini le reste de la route, la gorge serrée et les mains crispées sur le volant.

En arrivant, le poste était en effervescence et un nombre incroyable de personne travaillait dans le bruit et la fureur. Il fut escorté par un gendarme jusqu’au bureau de Tia.

_ « Je croyais que vous n’étiez qu’une bleusaille pas considérée par ses supérieurs. » Se rappela Jeff d’un ton dubitatif.

Tia sourit et pour la première fois, Jeff remarqua les deux petites fossettes qui lui trouaient les joues.

_ « J’ai eu une promotion éclair! Ce matin même ! Asseyez-vous, il faut que je vous raconte. »

Tia repris son air sérieux. 

Elle lui expliqua que son rapport était arrivé deux jours plus tôt sur le bureau du préfet de police et que ce dernier l’avait lu attentivement à cause des signalements, en grand nombre, de fugue d’animaux dans la région, ses dernières semaines. Quand des disparitions de personnes ont commencé à être signalées, elle avait été la seule à enquêter et faire un rapprochement.

Et depuis ce matin, elle avait son propre bureau et travaillait en étroite collaboration avec la brigade spéciale aux personnes portées disparues.  

_ « Une sacrée promotion en effet. Pourquoi vous vouliez me voir ? »

_ « J’allais y venir. Vous vous rappelez hier, quand je vous ai parlée de ma théorie sur l’implication d’EcoEarth dans la disparition de ses personnes ? »

_ « Oui mais vous l’aviez écarté cette idée parce que ca ne collait pas avec le reste. »

_ « En effet, cependant, de nouveaux éléments nous ont remis sur cette piste. »

_ « Quels éléments ? » Interrogea Jeff, qui au travers d’EcoEarth, avait l’impression qu’on l’accusait directement.

_ « Les experts ont redéfinit un périmètre géographique des disparitions et le point centrique est la décharge que votre entreprise à dépolluer. » 

_ « Mais c’est insensé ! Cette entreprise est tout ce qui y a de plus clean ! Je connais personnellement plusieurs employés dont le directeur et c’est l’homme le plus respectueux de la vie que je connaisse ! Appelez-les ! Vous verrez bien par vous-même ! «  S’énerva Jeff.

_ « On l’a fait mais personne ne réponds et ne pourra répondre. Ils font tous partie des disparus de ce matin. L’entreprise entière est complètement vide. On a envoyé des équipes chez chacun des vingt-quatre employés et on n’a trouvé personne. Ils se sont volatilisés. Est-ce que vous avez une explication à ca ? »

_ « Quoi ? Ils ont tous disparus ? Mais c’est impossible ! Je croyais que toutes les disparitions étaient concentrées autour de la décharge. Le site de création est à près de 120kms dans un lieu dit perdue après la foret noire. Et puis, si c’était vrai, où sont les corps ?  »

Tia ne répondit pas à la question.

_ «  Qu’est ce que vous pouvez me dire sur l’ambiance ses derniers jours au travail ? »

Quand Jeff s’était rendu au commissariat, il n’avait pas imaginé un seul instant qu’il allait subir un interrogatoire.

_ «  Je ne peux rien vous dire. Je reviens de trois semaines de vacances en Australie. » Et il sortit son passeport pour le prouver.

_ « Qu’est ce que vous faisiez la bas ? »

Cette petite bonne femme commençait sérieusement à lui taper sur nerfs.

_ « Voyage d’agrément. Pourquoi ? Je suis suspect moi aussi ? »

Tia sentit qu’elle avait été trop incisive avec lui et ce radoucie.

_ « Pour l’instant non mais avouez que le fait que vous soyez le seul représentant de votre entreprise encore en vie, peut paraitre suspect. Heureusement pour vous, ceci vous disculpe ! » Dit-elle en lui rendant le passeport.

_ « Mais qu’est ce que vous attendez de moi à la fin ? »

_ « On a besoin de savoir comment EcoEarth à dépolluer la décharge. »

_ « Mais je suis administrateur-réseau moi ! Pas ingénieur ! Ce procéder est le secret le mieux garder de France. Il faut une accréditation spéciale pour avoir accès à cette information, et moi, je ne l’ai pas ! La seule chose que je peux faire, c’est vous donner les codes d’accès de tous les fichiers mais ca ne vous avancera pas à grand-chose, toutes les données sont cryptées. »

_ « C’est parfait. » Conclue-Tia.

Elle appela les experts et Jeff fut conduit sous bonne escorte dans un centre des opérations  provisoire. L’opération prit un total d’une heure et dix minutes, puis Jeff laissa sa place aux vrais experts afin qu’ils cassent le code et découvrent le secret D’EcoEarth.

Le ventre de Jeff criait famine, heureusement, on lui proposa de manger un morceau dans la salle de repos. Il avala en quelques bouchées un pain bagnat dégoulinant de mayonnaise. Le gras du sandwich fit comme une pellicule sur son estomac et sans s’en rendre compte, il s’endormi sur une des banquettes du service de police.

Quand Jeff s’éveilla, la nuit était déjà tombée. L’effervescence du matin s’était complètement estompée. Il trouva l’équipe au grand complet rassemblée dans le silence le plus total. Instinctivement, Jeff comprit que quelque chose n’allait pas et l’angoisse reprit ses quartiers dans son abdomen.

_ « Qu’est ce qui se passe ? »

Le silence perdura puis se brisa dans un crissement de bruit de pas et de chaises raclées sur le sol. Chacun reprenait sa position dans la ruche. Tia s’avança vers lui. Elle avait l’air plus fragile que jamais dans son jean ajusté et son pull noir à col roulée. Elle le prit par le bras et le ramena en salle de repos.

_ « Vous avez pu décoder les fichiers ? » Demanda-t-il, plein d’espoir.

_ « Non. Mais il va falloir faire vite. » Répondit Tia d’une voix blanche.

_ « Mais vous allez enfin me dire ce qu’il se passe ? »

_ « EcoEarth a fourni sa solution de dépollution à plusieurs centaines de collectivités territoriales sur tous les continents.

_ « Oui. Et alors ? »

 _ « Et alors le phénomène c’est répété dans chacun de ces endroits où EcoEarth a utilisé son processus de dépollution. Nous comptons en ce moment même, plusieurs centaines de milliers de disparus sur toute la planète. »

3 décembre :

Jeff n’avait pas réussi à fermer l’œil de la nuit. Comme les autres, il attendait les progrès des experts scientifique. Vers 3h du matin, une partie des fichiers avait pu être décryptée et des ingénieurs de l’armée et du civil travaillaient conjointement pour découvrir le procédé de dépollution d’EcoEarth.    

Pour l’instant, la seule chose qu’ils pouvaient certifier c’est que ce n’était ni un produit chimique, ni bactérien.

Au petit matin, le nombre de disparus avait atteint le million. Un million de personnes en moins sur Terre et aucun témoignage. Personne n’a rien vu. C’est comme s’ils s’étaient tout simplement volatilisés. 

En allumant le poste de télévision, Jeff s’attendait à voir des scènes de panique, de mouvement de foule et de vandalisme mais il fut surpris de voir que la population continuait d’aller travailler et de vivre normalement. En fait la présentatrice rappela simplement les faits dans un flash spécial, puis la chaine diffusa les images d’un micro-trottoir.

Jeff fut abasourdi par les commentaires de ses concitoyens.

« Les gens sont cons ! C’est n’importe quoi ces histoires de fin du monde » « Tant que ca ne touche pas les villes, je ne vois pas pourquoi on devrait s’affoler ? »  « A coup sur, on va tous les retrouver en 2013 ! » « C’est encore un problème d’environnement ! A ne pas respecter la Terre, on va tous finir par en crever ! » « C’est encore un complot du gouvernement pour justifier de nos impôts ! » Criait un homme en colère.  Bien sur, il y avait quelques manifestations loufoques au sujet de la présence d’une autre vie dans l’univers et des illuminées qui criaient à la fin du monde. L’opposition politique, qu’en à  elle, prenait un malin plaisir à dénigrer les qualités du président pour faire face à cette crise. Ecœuré, il éteignit la télé.

Jeff faisait maintenant les cent pas dans la salle de repos en cherchant un moyen d’aider à enrayer cette catastrophe. Il se servit un café et alla trainer dans les pattes de Tia. La jeune femme l’impressionnait beaucoup, elle n’avait pas dormie de la nuit mais elle ne semblait pas ressentir les effets de la fatigue. Elle et son équipe se préparaient à aller recueillir des échantillons de sol aux endroits des disparitions signalées.

Ils s’apprêtaient à partir chacun de leur coté avec leur binôme respectif quand Jeff se proposa  de se joindre à eux. Tia accepta, ils avaient besoin de toutes les bonnes volontés.

Dans la voiture, Jeff parla du journal télévisé et s’offusqua des réactions de la population française.

Tia et son binôme se regardèrent de concert.

_ « Jeff, si le public garde son calme, c’est parce qu’il n’a aucune raison de s’inquiéter. »

_ « Qu’est ce que vous voulez dire ? Qu’ils ne savent pas la vérité ? »

_  « Bien sur que non. On doit déjà faire face à un agent inconnu qui décime une partie de la population, on n’a pas envie d’avoir à gérer l‘hystérie de l’autre partie. Les seuls endroits touchés se trouvent en rase campagne dans des territoires isolés. Les villes et les agglomérations sont sures. On n’y a recensé aucune disparition.  Il faut juste qu’on réussisse à identifier cette chose pour pouvoir l’enrayer et la partie sera gagnée. En plus, aujourd’hui on a deux nouveaux scientifiques qui viennent des Etats-Unis pour nous prêter main forte. C’’est sur ! Aujourd’hui, on va trouver une solution ! » Tia avait une telle assurance qu’elle failli convaincre Jeff.

Ils arrivèrent près du site de l’ancienne décharge traitée par EcoEarth, ils se garèrent dans un chemin de terre et descendirent de la voiture de fonction pour finir à pied. Jeff regretta de ne pas avoir ses vieilles baskets pour marcher dans le mélange de terre humide et meuble.  Les deux autres n’avaient rien à craindre avec leurs rangers.

Tous se firent la même réflexion. L’aspect de la terre n’était pas normal. Elle aurait dur etre dure comme de la pierre avec tout ce givre.

Jeff suivit les instructions de Tia à la lettre. Il marcha derrière eux et ne toucha à rien. Comme s’il y avait une connerie qu’il à faire en traversant un champ vide.

Le collègue de Tia se baissait de temps en temps pour relever des échantillons de terre pendant que Tia les étiquetait. Apres vingt bonnes minutes de ce petit manège, Tia envoya son collègue chercher la voiture et lui demanda de l’attendre de l’autre coté du site. Elle voulait vérifier l’autre parcelle.

Le temps qu’elle se retourne pour expliquer à Jeff comment faire pour étiqueter les éprouvettes, qu’ils entendirent un cri étouffé.

Le partenaire de Tia avait disparu de leur champ de vision. Sans même se concerter, ils l’appelèrent en criant son nom.

_ « LUCAS ! LUCAS ! LUUUUUUCAS ! LUCAS !!!! »

_  « Je ne le vois plus ! » S’affola Tia.

_ « La voiture est toujours là mais je ne vois personne à l’intérieur ! » Signala Jeff.

_ « Reste ici ! J’y vais ! » Déclara Tia.

_ « Non ! »

Jeff la reteint par le bras en observant au loin, les yeux fixés sur quelque chose.

_  « Regarde ! Le sol bouge ! »

_ « Où ca ? Je ne vois rien ! »

_ « Près de la voiture. » Sans savoir pourquoi, ils s’étaient mis à chuchoter. Comme si la chose pouvait les entendre.

Effectivement, en plissant les yeux, Tia pouvait voir la terre bouger. Enfin, elle ne bouger pas au sens propre c’est comme si chaque bout de terre était indépendant des autres. Puis, comme par magie, la voiture disparue dans la terre.

_  « Au mon Dieu ! Au mon Dieu ! » Murmura Jeff.

_ « Jeff, regarde, ca bouge dans notre direction. » Constata-Tia d’une voix éteinte.

_ « Il faut qu’on sorte de là ! Il faut atteindre la route ! »

N’écoutant que leurs instincts Jeff et Tia se mirent à courir comme des dératés pour atteindre le morceau de  bitume  qui longeait le champ.

Tia qui s’enfonçait régulièrement dans la terre trop meuble, failli tomber a quelques mètres de l’arrivé mais Jeff la rattrapa au vol et la remis sur pied sans s’arrêter de courir. A un mètre du bord, Jeff lui ordonna de sauter.

En se retournant, ils purent constater qu’il s’en était fallu de peu pour qu’ils y restent eux aussi. La terre continuait sa danse juste devant eux comme si elle attendait qu’ils viennent la rejoindre.

_ « Putain ! Mais c’était quoi ca ? Mais qu’est ce que vous avez foutu dans cette boite ? Vous avez essayé de jouer à Dieu ou quoi ?  »  Hurla Tia à plein poumon.

Jeff gardait les yeux fixait sur le sol. La seule chose qu’il voyait, c’est comment ses parents étaient morts. Au bout de quelques minutes, il se releva et aida Tia à en faire de même.

_ « Il faut qu’on rentre. Il faut qu’on dise aux experts ce qu’on a vu. »

Tia respira longuement, comme pour se retenir de fondre en larmes.

_ « Tu as raison, mettons nous en route. »

Ils gardèrent le silence, le reste du trajet, trop occupé à regarder autour d’eux si la terre les suivait.

Un peu plus loin sur la route, Tia arrêta un convoi militaire avec l’énergie du désespoir. Ils les ramenèrent au commissariat devenue une base des opérations relié au monde entier. 

En descendant du camion, ils furent accueillis par le ministre de l’intérieur en personne. Tia se mit au garde-à-vous et annonça la mort de son partenaire les larmes au coin des yeux.

Le ministre, lui annonça que deux autres équipes n’étaient pas rentrées. La tension au sein des locaux était palpable. L’impuissance de la situation, la perte de plusieurs collègues et d’une partie de la population locale, exacerbaient les hommes en uniformes. Tous se portaient volontaire pour les missions de mise en quarantaine des secteurs touchés par les disparitions. Mais le ministre avait refusé, il voulait que seul les militaires soient sur ce terrain.

Pendant ce temps, Jeff et Tia répondirent aux questions des experts scientifiques. Les premiers échantillons étaient en cours d’analyse. A la fin de l’interrogatoire, Jeff rejoignit Tia dans la salle de repos. Les yeux cernés, dévoré par le chagrin, la fatigue et une situation de crise qui nous dépassait tous,  elle fixait le mur en face d’elle.

Jeff s’assit à coté d’elle sur la banquette.

_ « Il avait un enfant. Tu te rends compte ? Alors que moi, je n’ai rien à perdre ! » Lâcha-t-elle entre deux sanglots.

Parce qu’il ne trouva pas les mots, il ne dit rien et passa son bras autour de cette frêle silhouette pour la réconforter. Elle ne se laissa pas aller contre son épaule et continua sa contemplation de la surface monochrome. Au bout de quelques minutes, elle se dégagea puis se mit à faire les cent pas.

Jeff la regarda en ce demandant ce qu’il faisait encore là, alors qu’il n’était utile en rien et alors qu’il se posait cette question existentielle, un des experts lui demanda assistance.

Même si Tia n’avait pas été réclamé, elle suivit Jeff, enfin contente de pouvoir s’occuper l’esprit. Apparemment, un fichier avait été caché dans un autre et ils avaient besoin du code d’accès pour pouvoir le décrypter.  

Jeff avait beau chercher dans son ordinateur, il n’avait pas ce code. Il essaya les différents  mots de passe qu’utilisaient son boss mais la recherche resta infructueuse. Jeff pensa a son boss qu’il connaissait bien et qu’il le surnommait gentiment Geekounet. Il essaya cette dernière combinaison et le fichier s’ouvrit enfin.

Les experts passèrent encore une heure sur les données recueillis. Pendant ce temps, sous le cou de l’émotion et de la fatigue Tia s’était endormi, la tête pose sur un bureau. Jeff la couvrit avec une veste d’uniforme.

_ « Oh mon Dieu ! Ca y est ! » S’exclama un des experts.

_ « Alors ? » demanda le ministre.

_ »Alors, on est dans une merde noire. Nous avons à faire à des nanites. Pour faire simple, c’est de la nanotechnologie combinée avec de la biologie. Celles-là ont pour but de recycler tout ce qui n’est pas organique. »

_ « Ce n’est pas logique ! Intervient un expert. Elles devraient être inoffensives pour l’homme ! »

_ « Normalement oui, mais on ne sait pas encore pourquoi elle attaque l’homme et pas les animaux. Par contre, on a un autre problème. D’après les données d’EcoEarth, elles sont programmées pour avoir une durée de vie minimale mais elles continuent de vivre après leurs cycles mais surtout, elles ont trouvés un moyen de se multiplier. Tant qu’on ne sera pas les neutraliser, elles vont continuer leur nettoyage de fond et le rythme va s’accélérer encore. »

  • Moi aussi en relisant mon texte hier soir j'ai vu qu'il y avait quelques couacs. À force de faire trop attention... c'est tout le contraire qui se produit.

    · Il y a environ 12 ans ·
    Photo la plume blanche  39928 zoom 300

    shude

  • Merci! Par contre, grosse boulette, j'ai mis la version non-corigee orthographiquement (et aussi quelques tournures manquent). J'espere que le jury ne va pas pleurer des larmes de sang...

    · Il y a environ 12 ans ·
    Imagescaolxyq7 150

    rcclarence

  • Je suis fan. Bien rythmé, avec une écriture très fluide. On se laisse vite emporté par l'histoire. Les personnages sont aussi très bien construit.

    · Il y a environ 12 ans ·
    Photo la plume blanche  39928 zoom 300

    shude

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