Le vieux con.(remix)

effect

"La pornographie est à la sexualité du pauvre ce que l'amour est à la classe aisée: l'imagination est plus fertile quand elle ne dispose que de très peu de moyens. "

" Je t'explique... nous avions une petite maison d'édition qui ne vendait plus rien, ou presque. Seule tournait encore une rotative 4 couleurs pour la conception de nos ouvrages dit de 'vulgarité' (à ne pas confondre avec ceux de 'vulgarisation' qui consistent à rendre accessible le compliqué à tous, alors que les nôtres se contentaient d'offrir du plaisir à moins) et que l'on vendait sous le manteau des premiers parkings à Mammouth, entre 2 caddies de Four Roses et 3 cartouches de Marlboro Ventimigliese. Notre enthousiasme grandissait au fur et à mesure de nos ventes, le pognon tombait dans nos poches comme les mouches sur de la merde, à nous en faire oublier l'heure de midi...

"Ding Dong "

... notre catalogue commercial sentait plus la quadrichromie que la police de caractères; l'écriture faisant appel à la lecture et à l'imagination, il était plus facile de fourguer de la photographie pornographique pleine page, qui elle, ne nécessitait que très peu d'investissement intellectuel, voir même pas du tout...

"Ding Dong"

... le grammage de nos papiers indiquait la qualité de nos impressions, un support épais offrant une meilleure pénétration des encres pour mieux en afficher la richesse des détails...

"Ding Dong "

... les ouvrages de peu d'importance étaient imprimés sur du papier bible alors que nos œuvres majeures se couchaient sur du glacé 230 grammes, au même titre que les montres et les parfums des plaquettes de duty free que l'on trouvait dans les premiers charters pour New-York. On faisait du fric avec du cul pendant que d'autres se cassaient les couilles à réinventer le temps et la matière, à remplacer les aiguilles par des cristaux liquides et l'extrait de pétales de roses par de la vanille de synthèse...

"Ding Dong "

... par 'œuvre majeure', il fallait entendre 'œuvre complexe', c'est à dire œuvre où la mise en scène demandait un véritable plan d'exécution, une sorte de cahier des charges à repartir sur tout un tas de petits métiers artistiques. Il y avait d'abord l'homme qui buvait des canons (le scénariste) pour mieux faire sortir le génie qui était caché en lui, puis venait ensuite le roughman qui essayait de traduire par son feutre appuyé et sa pointe émoussée, l'écriture confuse du premier, afin de présenter et vendre au producteur - celui qui remuait des glaçons et embrassait de jolies filles autour des piscines- le scénario tout imagé. Après quelques verres et quelques sauteries sous le soleil couchant, entrait la seconde phase projet: la prise de vues en studio...

"Ding Dong "

... Il y avait le chef des lumières qui interchangeait les gélatines des projecteurs pour abaisser ou augmenter la température des couleurs, et l'assistant zoom qui fouillait et refouillait sans cesse dans ses valises compartimentées et moussues, le bon objectif pour la bonne focale. Le photographe était celui qui mettait l'œil au cadre et le doigt au déclencheur quand l'action lui semblait avoir pris de l'intérêt. Tu comprends ?

"Ding Dong "

- Putain va ouvrir, c'est sûrement la 3 fromages !"

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