Les baroudeurs

Hervé Lénervé

Deux baroudeurs dans un pays exotique, mais à l’étranger.

- Tu penses que c'est du poulet ou du lapin, toi ?

- Je préfère ne pas trop le savoir. J'ai essayé de le demander, ils sont nuls en langage des signes.

- Ah, ils ne parlent pas l'Anglais, comme tous les indigènes ? Mais autrement, c'est bien d'accord, ils peuvent nous héberger pour la nuit, sous leur tipi ?

- Oui ! Enfin, en principe, je n'ai pas tous les détails, car ils sont très susceptibles. Ils se mettent en colère d'un rien, deviennent tout rouge, tapent du pied et égorgent un cochon, ou une femme, si le cochon manque, comme ça, pour voir. Ils ne doivent pas être musulmans avec tout le porc qu'ils doivent avoir dans leur congélo, s'ils en avaient eu un.

- C'est ça ! Ce doit être du porc pas frais, le plat. Pas du poisson, en tout cas, il n'y a pas d'arrêtes.

- Ou de la femme par défaut ? Ce qui est bien, c'est que ça n'a aucun goût. C'est neutre. Ce pourrait-être du varan avarié comme du Suisse qui retarde.

- C'est vrai, que ça pourrait avoir un goût de chiotte, aussi.

- D'autant plus, que l'on doit finir toute notre assiette.

- Non ?

- Si ! Autrement c'est un affront de troisième catégorie sur la liste des offenses sacrilèges, punies d'offrandes sacrificielles aux Dieux. Il me l'a bien expliqué, le grand, celui qui fait peur.

- Ah, parce que les autres, ils ne te font pas peur, à toi ? Bon, cool. Je finis tout, je ne voudrais pas être responsable de la mort d'une horde de cochons ou même d'une volée de femmes de substitution, à la rigueur.

Pour info, leurs plats étaient : un filet de thon rouge élevé sous la mer, mijoté dans de petits oignons, sur un lit de jus de groseilles. Le tout servi avec un blanc, un grand cru, bien frais.

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