Les Estampilés de Facebook
Rachel Colas
Les Estampillés de Facebook
Rachel Colas
Plus de 2000 amis ! Waouh ! Cela ne rigolait plus ! Il était arrivé à son objectif… Evidemment, il y avait mis du sien ! Ce n’était pas exclusivement des personnes qui lui avaient demandé de faire partie de ses amis Facebook. Non. Il avait lui-même fait quelques demandes, de ces demandes qui ne peuvent être refusées, par exemple pour certains profils publics qui ne demandaient pas mieux, eux aussi, d’avoir plus d’amis. C’était comme si le nombre d’amis décrivait le succès et l’importance de la personne. Au début, il se rappelait, il avait même « vampirisé » certains de ses amis. Des vrais ceux-là. Il fallait bien commencer par le début. Par de vraies personnes. Que l’on connaissait. En chair et en os ! Il avait fait cela avec diplomatie : s’était imposé dans certaines conversations, avait fait preuve d’humour, bazardant à qui va des « j’aime » même s’il n’en avait rien à foutre. Généralement, c’était payant : on lui envoyait une demande d’amitié ! Ainsi, il avait pu quasi copier/coller des listes entières d’amis. Par contre, il dénichait vite celui qui procédait de cette façon et était sans pitié : bloqué à jamais ! Mais un ami exclu devait impérativement entrainer une nouvelle demande d’amitié : histoire de toujours rester à niveau.
2000 ! Dans le fond, il était quelqu’un d’extrêmement intéressant ! Même si dans sa vraie vie, il pouvait compter ses vrais amis sur les doigts de la main… et encore, il s’agissait plus de « copains » et de certains « collègues »… Qu’importe : 2000 amis prêtaient attention à ses statuts ! Le pied !
Il se connectait le matin très tôt. Ensuite le midi : de son portable. Il avait acheté un i phone. Il pouvait se connecter quand et où il le voulait, pouvait lire les derniers posts, y réagir et surtout accepter les demandes d’amis. Son but était d’arriver à 3000 amis en peu de temps ! Cela lui demandait une vigilance et un effort considérables. Une nouvelle demande était presque comme une jouissance. Il ne vivait plus que pour ça. Se demandant sans cesse : qui allait être le prochain, la prochaine ? Et quelles motivations avaient-ils ? Pourquoi l’avoir choisi ? En quoi leur était-il intéressant ? Ensuite, il se connectait à 17h, directement en rentrant du travail. Il était tenté parfois d’allumer son i phone lorsque la circulation le coinçait… Jusqu’à présent, il avait résisté. Non pas en raison d’une quelconque prudence, loin de là… Uniquement parce qu’il réfrénait son désir de découvrir enfin s’il y avait une nouvelle demande, un nouveau message privé ou un commentaire sur son mur… Il faisait durer le plaisir…
Dernièrement, il avait posté de gentilles répliques s’adressant à une amie d’une amie. Une peintre. Elle avait du talent. Était jolie. Faisait preuve d’humour et de délicatesse. Il attendait. Qu’elle demande. Parfois, il restait un jour ou deux sans rien écrire. Ensuite, précautionneusement, il se montrait. Fin. Sûr de lui. Un tantinet provoquant. Juste ce qu’il fallait pour attirer sa proie dans sa liste d’amis… Et bien sûr, il y passait sa soirée, voire une partie de sa nuit… Il était addict. Complètement addict. Et il s’en foutait éperdument.
C’était génial ! Il avait découvert sur un forum des petites programmations qui allaient lui permettre beaucoup de choses… Par exemple, savoir qui regardait le plus son profil, ensuite, savoir qui l’éliminait de sa liste ou même le bloquait ! Evidemment, cela arrivait… chaque jour, il contrôlait le nombre d’amis. Il en avait dressé une liste Excel et vérifiait un à un jusqu’au moment où il trouvait LE ou LA coupable de ce déni. Une gifle virtuelle pour lui. C’était vraiment des Inutiles ! Maintenant, avec ce petit programme, il avait la réponse instantanément lorsqu’il se connectait. Il en prenait note et complétait désormais la liste des Inutiles et dans un premier temps, recherchait qui il pouvait inviter pour combler le trou…
L’informatique était devenue pour lui une passion. Il lisait très peu, sauf des manuels compliqués pour professionnel du web et pourtant, il se rendait de plus en plus compte que lorsque le livre était en librairie, les informations étaient déjà dépassées ! Il était maintenant administrateur d’un site qui regroupait pas mal de hackers. Evidemment, pour en faire partie, il fallait désarmer la première clef qui permettait de rentrer sur la page d’accueil du site. Ensuite seulement, il admettait ou non le membre. Ils étaient une cinquantaine, en ligne avec un pseudo anodin et prenant garde à ne donner aucune référence personnelle dans leurs posts. Seuls comptaient les exploits. Ils étaient performants et … dangereux !
Un jour, il se rendit compte que la liste des Inutiles venait de gagner son centième membre. Cela le contraria. Déjà une centaine de personnes l’avaient délaissé, abandonné, lui avaient tourné le dos comme de vils félons. C’était intolérable ! Il devait passer à l’action. Les punir. Violemment. à la hauteur de ce qu’ils lui avaient fait à lui ! Il devait réfléchir. à la manière.
Son idée lui tomba dessus alors qu’il naviguait sur le web en toute tranquillité. C’était si évident ! Il avait tout ce dont il avait besoin : possibilité de vidéo, un membre actif qui disposait de l’excellence en la matière et sa fameuse liste. Ce serait un jeu d’enfant que de rentrer en contact avec les inutiles. Les parasites de Facebook !
Au départ, on ne remarqua pas grand-chose. Certains pensaient qu’enfin on avait trouvé une solution. Il existait pas mal d’inexistants sur Facebook. Les Fake, ceux qui créaient de faux profils pour dire leur façon de penser anonymement, face cachée, ceux qui oubliaient leur mot de passe et créaient plusieurs fois leur profil, et tout simplement, ceux qui dans la vraie vie n’en faisait plus partie. Mort. Décédé. Absent au bataillon. Ceux dont le dernier statut ne changerait plus jamais. Dont la photo serait éternelle… et un jour, une croix se dessina sur certains profils. Le buzz fut instantané : Facebook avait trouvé un moyen pour signaler à ses membres que leur ami ne faisait plus partie du réseau. Leur réseau ainsi que le réseau de vie. Tout simplement.
Evidemment, il y eut les adeptes mais aussi les détracteurs. Comme toujours. Certains trouvaient cela pratique. D’autres, morbide. Ils avaient raison tous les deux. Le problème commença lorsque Facebook démentit toute intrusion dans ce processus d’information funéraire. Ce fut pire lorsqu’on évalua le nombre à une petite centaine de personnes. La presse se déchaîna. Certains en profitèrent pour porter plainte. La croix ne correspondait pas à leur religion. C’était indécent. L’appât du gain aussi. Mais cela était une autre histoire…
Il était fier ! C’était un exploit ! Evidemment, les membres l’avaient félicité. S’ils savaient ! Il n’avait accepté que de dire une partie de la vérité. Cela dépassait tout ce qu’ils avaient pu faire. Vraiment, il était un génie. Pour un peu, il aurait bien voulu que tout le monde connaisse son secret. Ainsi, il deviendrait mondialement connu. De tous. Universellement !
La liste des inutiles continuaient à s’allonger. Les croix étaient de plus en plus nombreuses. Il en était à plus de 3200 amis désormais. Il rêvait de dépasser les 5000 et de se créer un nouveau compte… Le buzz des croix avait fait couler beaucoup d’encre et pourtant du jour au lendemain, tout semblait être retombé dans l’oubli. Les vivants supprimaient tout simplement, de leurs amis, les croix. Parfois, certains étaient de vrais amis, d’autres de simples amis virtuels. Un nouveau fait de société venait de voir le jour ! Certains sociologues éminents en firent une nouvelle théorie. Désormais, on avait intégré, dans le processus de deuil, la suppression d’un ami dont le profil était repris par la croix, preuve incontestable de son décès.
Tout cela grâce à lui ! Sauf que personne ne le savait ! Cela le rongeait. Jour et nuit. Il n’arrivait plus à se concentrer sur son travail. Il décida de prendre congé, deux semaines feraient l’affaire. Surtout pour ce qu’il avait en tête.
Il lâcha la première bombe et créa un deuxième buzz. Il le fit intelligemment, sous une fausse identité. Il saurait manier le suspens jusqu’à l’ultime moment : son apothéose ! La sienne. Et personne, vraiment personne, ne pourrait la lui voler !
Son buzz tenait en une ligne : « Comment sont morts les Estampillés de Facebook ? ». C’était le nom officiel que la presse avait dédié à ceux-ci. La vague avait été énorme et en avait éclaboussé plus d’un ! Les recherches avaient été rapides. Le résultat surprenant, morbide et inquiétant ! Des dizaines de personnes quittèrent le réseau social de peur de la contamination bien qu’en réalité, il fut prouvé que toutes les personnes, toutes sans exception s’étaient suicidées ! Restait à connaître le pourquoi… Quant à la manière, il faut dire que certains avaient eu de l’imagination ! Entre se pendre, prendre de l’arsenic, s’enfoncer une lame dans le corps ou se jeter sous un train, rien ne se ressemblait ! Aucune similitude. Ni en arme, ni en amis communs, ni le jour, ni l’heure. Que des professions différentes et cela touchait tous les âges. C’était l’incompréhension totale !
Il était en ligne 20h sur 24h. Ne se risquant à dormir qu’aux petites heures du matin. Vérifiant toutes les informations. Les hackers de son forum étaient épatés, ils voulaient en savoir plus. Deux avaient refusé de se mouiller et s’étaient désistés. Ce n’était de toute façon pas les meilleurs. Son aura était telle qu’ils restaient tous connectés : ils attendaient, voulaient savoir. Comment ? Comment avait-il fait ? Car c’était bien lui qui était derrière tout cela, n’est-ce pas ?
Il eut une dernière idée de génie. Il informa la presse par le réseau Twitter qu’il détenait la vérité sur les Estampillés. Seules les personnes qui feraient partie de ses amis Facebook connaitraient en primeur le fin fond de l’histoire. à cet effet, il avait déjà prévu plusieurs comptes différents. Il avait du mal à accepter les demandes d’amitié tant il en recevait ! Il demanda d’ailleurs à ce sujet l’aide des membres de son forum pour valider les demandes d’amitié d’une seule opération. Ils avaient modifié aisément quelques paramètres du compte… Cela dépassait ses espérances. Il était désormais connu.
Et puis, il la balança. Sur son mur. Avec un cadeau en plus : quiconque l’ouvrirait, verrait celle-ci affichée sur son propre mur et dès lors partagerait sa découverte avec ses propres amis. Une chaîne sans fin !
Oui. Il la bazarda, comme ça. Sans explication. Ils allaient voir !
Une simple vidéo. D’une minute pas plus. Juste le temps de regarder et d’intégrer. Même pas le temps de se dire que l’on n’avait pas envie de regarder. Juste le temps pour accrocher l’œil à l’image. Ecouter sans s’en rendre compte. C’était un chef d’œuvre d’hypnose avec images subliminales. Elles pénétraient dans le subconscient, tels des vers informatiques dans le disque dur pour sournoisement émerger dans le conscient et y imprimer dans tous les fichiers de sauvegarde le mot DELETE : l’ordre de mettre fin à sa vie était inéluctable.
Des milliers de personnes cliquèrent sur « play » quasi en même temps, la vidéo s’afficha sur leur mur pour le grand plaisir de leurs amis avides de découvrir la vidéo du jour…
Quant à lui, il avait tout prévu. Il l’avait mis en grand écran. Il cliqua sur PLAY.
Une corde attendait qu’il vienne y déposer son cou.
OK,mais très vite l histérie furieuse,les cris tenaces de de jeunes bambins de 3,et 4 ans,bref,
· Il y a presque 12 ans ·elle en était a son 8 ou 9 ième clavier,dès qu elle tournait le dos les momes arrachaient les touches,et grave ces faits et d autres liés toujours a ce coté addict et abstraction,m ont touchés,bon moins addict elle est devenue et trop kamikaze je suis devenu avec son grand ami hostie et Web Master,trop de couche d ortie aussi sur le nez rouge d un king beffroi,bref,re Bravo et Merci pour x détails,voila,Bonne journée a vous.
Fil,Hip,Oohhh, 18 Rockin Cher
Souvent,des gens faisant abstraction de tout face a un écran,bref,
· Il y a presque 12 ans ·a une époque,beaucoup d échanges épistolaire j avais avec une jeune mère addicte d internet,
c est elle qui m avait convaincu de prendre msn,( quelques nuits d impro sympas,elle kiffait grave écrire,et j aimais beaucoup ses automatismes,bref,cela était uniquement épistolaire et un jour elle me propose l apport de la cam pour parler,
Fil,Hip,Oohhh, 18 Rockin Cher
Bravo,épatant votre texte,et riche d inspiration sur les comportements liés aux réseaux sociaux,bref,.ayant découvert votre texte en deux fois,et loin d imaginer la suite,au dela de la page 2,une histoire vécue m est revenue,bref,encore Bravo pour la haute teneur de ce texte,et l inspiration que je cite plus haut,est lié au fait que souvent d étranges comportement sur x heures sur un ordi,
· Il y a presque 12 ans ·Fil,Hip,Oohhh, 18 Rockin Cher
Un mot : wahw !
· Il y a presque 12 ans ·Nadège
J'ai vraiment adoré cette lecture ! Un réseau social peut vite devenir addictif comme n'importe quelle autre activité ... avec ses propres dangers.
· Il y a presque 12 ans ·laracinedesmots