Lettre ouverte à la liberté
mazdak-vafaei-shalmani
Si j’avais pu décider du sort de mon pays natal, lorsque le turban a remplacé la couronne, lorsque les soubresauts islamistes du bas peuple ont rejailli, ramenant les élans patriotiques à un despotisme caractéristique d’une époque déjà révolue, j’aurais sans doute crié comme un aliéné au pays des fous, que la dictature n’a pas un seul visage. Comme le masque de la mort, elle peut devenir rouge, verte, ou noire, et comme dans le conte d’Edgar Allan Poe, elle rode dans les environs du château de nos bons princes, trop sûr d’eux-mêmes pour la voir arriver, et pour se rendre compte qu’à chaque tic-tac de l’horloge, leurs convives tombent sous les coups lâches de cette assassin qui ne donne jamais son nom. Pendant ce temps, le peuple dort tranquillement, trop content de voir son oppresseur tombé, et trop fière d’avoir participé à sa chute. Comme une longue infection bactérienne, cette maladie se propage dans le monstre étatique, enivrant et empoisonnant le peuple, qui succombe lui aussi, dans une jouissance mortelle. Les grands savants pensent connaître le secret de la cécité, elle serait une des conséquences du diabète. Dans mon pays, dirigé par un ingénieur qui n’a jamais rien compris au droit puisqu’il ne se quantifie pas, et guidé par un ayatollah qui n’a jamais rien su de l’homme puisqu’il ne vénère que son créateur présumé, le monstre s’engraisse, et le peuple boit ses paroles complaisantes, tous deux finissent aveugles, marque d’une glycémie de populisme, que seules la liberté et l’égalité pourraient guérir. Aveugle, l’Iran erre comme Œdipe à Colonne, entre les sorties ratées de son président dont on ne peut louer que la mauvaise volonté, et son peuple qu’une querelle centenaire oppose, elle connaît un destin tout aussi tragique, pour avoir épousé sa mère, le despotisme,et avoir tué son père, la monarchie.
Si j’avais pu crier dans tous les quartiers de Téhéran, que derrière le visage pleinde maturité de tous ces patriarches, se cachaient l’animal, qui allait entraîner ses moutons, petits révolutionnaires coraniques sans humanité, à tuer à coup de pierre ses enfants rebelles, jusqu’à ce que leur sang pubère s’écoule comme un fleuve sur la place de la liberté, alors j’aurais été le premier à mourir. Car l’oracle ne ment jamais, et le destin iranien, était écrit dès que son peuple a boudé les célébrations de Persépolis, pour aller secrètement prier dans les Mosquées. La révolution islamique fait réfléchir mais elle ne ment pas : l’Islam est à la politique, ce que les chaines sont à l’esclave.