L'île du corail
toxic
L'île du Corail
J'aime… quand arrive mon tour d'aider Stan le capitaine, et Fred son second, sur le catamaran qui emporte pour la journée une trentaine de clients de l'hôtel vers l'île du Corail, dans une chaleur tellement accablante qu'elle parvient à flouter la ligne d'horizon.
Les cuisiniers de l'hôtel nous font livrer le matin même du départ les plateaux repas qui seront servis à bord, aux alentours de midi, après la plongée prévue autour de l'île.
Je suis chargé de préparer pendant l'heure de la traversée les cocktails de jus de fruits, jamais alcoolisés car le soleil tape fort, les clients doivent rester avec nous sur le catamaran, hors de question qu'ils tombent à l'eau et se noient dans notre dos.
L'île du Corail, aussi appelée l'île du Pharaon, se trouve à 6.000 milles marins (soit environ onze kilomètres) au sud d'Eilat et de notre hôtel, dans les eaux égyptiennes du golfe d'Aqaba. C'est la Mer Rouge qui baigne ces côtes, et dans ses fonds sous-marins dorment encore des poteries datant de la période romaine et byzantine.
Le clou de la sortie est de nager, tout près de l'île, au milieu des dauphins et d'une variété infinie de jolis petits poissons d'aquarium. Du corail tapisse les fonds, du corail beau comme des fleurs blanches, du corail de feu.
Et des étoiles de mer ! Des étoiles en guise de message, comme si on voulait me donner à lire, dans l'eau, la carte du ciel imprimée à l'envers, pour me montrer la voie que je dois suivre, puisque je suis incapable de trouver ailleurs que dans des histoires de cul sans lendemain, un sens à ma vie. Je me contente de vivre le sexe au jour le jour, et de connaitre chaque chemin d'eau qui mène d'un récif corallien à l'autre, d'une cuisse joliment galbée à l'autre...
Le bateau jette toujours l'ancre dans la baie abritée des vents, juste devant l'île. Je distribue masques, tubas et palmes aux clients puis je les expédie à l'eau, tandis que je reste à bord, assis à l'avant du catamaran, pour contempler le bleu turquoise de la mer et l'ocre de l'île, sans végétation. Je suis des yeux les contours de la forteresse musulmane, puis ceux des vestiges byzantins, le corps reposé de femmes. Je recherche, dans ces moments de calme, l'oubli de leurs fantasmes et des miens, mais aussi les raisons de mon addiction à elles.
… Doucement balancé par le clapotis de l'eau et caressé par le vent brûlant, je ferme les yeux et je deviens un banc de poissons. Je file droit devant dans les eaux aventureuses, sans limitation à ma course folle, pour explorer des horizons infinis de silence, un noir profond et extrême.
… Une peur extrême, aussi, qui me fait remonter à la surface de mon être, le cœur battant…
… Parce que je sais ce que je veux… le secret que je tais...
Je voudrais tant glisser dans le vide abyssal du corps d'une femme, une seule, jusqu'à ne plus avoir de consistance. Me fondre en elle… lui faire l'amour, à elle, comme à personne, à cette femme rêvée, sublime, idéale, magnifique et posée, lui faire l'amour des nuits entières, lentement, doucement, avec tendresse et volupté, ouvrir mon cœur, prendre le sien, et là, doucement la faire monter, monter, jusqu'à la libérer dans un soupir, pas dans un cri, non, un tendre et long soupir qui s'étoufferait dans ma bouche collée à la sienne, et puis là, je pourrais alors, moi, me libérer et hurler à la vie à la mort mon plaisir explosé.
… Une seule, une seule que j'aimerais et qui m'aimerait, celle qui serait ma femme. Alors, en proie à la peur panique de ne jamais la trouver, je remonte à la surface de mon être, là où je sais que je saurais y trouver une forme d'indifférence à défaut de cruauté.
Elles…
Elles, conjuguées au pluriel, baisées et bien baisées de tout mon corps mais sans mon cœur, redeviennent alors une urgence, la priorité de mes journées, parce qu'elles sont les seules à me garder du risque de désillusion qui accompagne l'amour.
Aujourd'hui, durant la traversée, j'ai repéré une fille très brune, avec d'immenses yeux vert clair en amande, moulée dans un bikini de daim orné de franges et de perles « à la Pocahontas », wouh-wouh ! Elle porte, de part et d'autre de ses charmantes petites oreilles, deux tresses que je rêve déjà de lui défaire…
Après la baignade, « Pocahontas » remonte par l'échelle sur le catamaran. Sa peau, constellée de gouttelettes d'eau, est bronzée, humide… et parfaite. J'aime déjà son fin duvet, blondi par le soleil, qui veloute son ventre, descend de son nombril vers son triangle des Bermudes, se poursuit sur ses cuisses… longilignes… huumm… Je devine aussi la couleur de sa chatte… brune. Brune, oui mais comment… ? Epaisse ou pas… ? Rasée, un peu, beaucoup, jusqu'où ? Ses lèvres… celles du bas… repliées, tendues ?
Pocahontas, pieds nus, me jette des regards appuyés tout en picorant quelques tranches de melon fondant à souhait, qu'elle écrase entre ses jolies dents du devant, en aspirant délicatement le jus. Ses yeux rieurs rivés dans les miens, elle virevolte autour des passagers pour agiter les franges de son maillot de bain autour de ses hanches.
Fred, qui a saisi le manège de la Fille du Grand Chef Indien, me confirme d'un hochement de tête que c'est gagné pour moi :
— Tu devrais aller te la faire sous le catamaran !
— Remplace-moi.
Je quitte le bar et mes cocktails pour me diriger droit sur Pocahontas.
… Sans un mot d'explication, je la prends par la main pour commencer, et je l'entraine avec moi de l'autre côté du catamaran, vers la cabine de l'équipage. Elle me suit, légère comme une plume…
J'ai le code, j'ouvre la porte, je referme derrière elle. Dans la cabine il fait très chaud, désir à fleur de peau, tout va au ralenti, et c'est ça qui est magique… Entre elle et moi, c'est l'alchimie… Je devine, dans la pénombre de la cabine, à son sourire et à son souffle, qu'elle est une aventurière du sexe à la recherche de l'accouplement. Animal, brut ? Essentiel ?
— Retourne-toi.
Elle me regarde.
— C'est comme ça que tu me parles, pour la première fois que tu m'adresses la parole ? Tu es toujours aussi direct ?
— Tu es libre de partir si tu veux...
Mais elle m'obéit : elle se retourne.
— Alors maintenant, tu es à moi… !
Je la plaque doucement contre la paroi de bois de la cabine, et je l'aide à relever ses bras :
— Tiens-toi au porte-manteau accroché au mur… Ne bouge pas tes mains, reste comme ça.
Je commence, je défais ses deux tresses, et les ondes souples et humides de sa chevelure balayent son dos.
Je lui laisse son maillot…
— Ecarte un peu tes jambes.
Elle s'exécute, mais pas assez, je glisse ma jambe entre les siennes pour forcer jusqu'à l'écartement que je veux. Je me rapproche d'elle, je pose mes mains sur ses hanches et je me colle, je m'emboite à son corps souple et tiède pour enfouir ma tête dans ses cheveux et y respirer l'odeur de la mer… Je suce une mèche au goût salé, puis deux. Je regarde les détails, les gouttes qui coulent de ses cheveux, sa peau qui perle de sueur, son bronzage, et j'aime ce que je vois. Je suce un peu son épaule transpirée. Mon sexe tout entier grossit contre elle et se durcit. J'ai envie d'elle au bout de mon gland alors je la serre fermement avec mon bras gauche, et de ma main droite je glisse le long de son ventre, pour aller fouiller en bas… Je passe sur son triangle, petit et rasé, que je caresse… puis je descends à la recherche de son clitoris, que je caresse aussi, dans des arrondis délicats et appuyés…
Elle vibre.
Elle vibre comme une biche, elle est douce et belle et gracile, elle m'excite, elle ressent bien l'envie et le plaisir, et j'aime ça. Elle se laisse aller… elle bascule sa tête en arrière et gémit doucement, je continue à l'exciter… Puis j'effleure sa nuque du bout de mes lèvres sans l'embrasser. Je veux me mettre à genou, je le fais, et j'écarte son maillot. Je mets ma tête entre ses fesses et je commence à la lécher… lentement… doucement… sous elle. Elle se déhanche de plaisir, excitée, implorante, et elle mouille de plus en plus, et toujours plus jusqu'à devenir déjà complètement trempée, en nage, en sueurs, de chaleur et d'envie. Je ressens, moi, l'envie de la mettre mais je ne fais rien, je me réserve. Je la lèche pour la faire monter, je ne la laisse pas jouir, je la retiens…
Elle se tient toujours au porte-manteau, fondante en bas, et moi je la savoure, elle est salée, du sel de la Mer mais pas seulement…
J'ai de plus en plus envie de la pénétrer mais je préfère faire ça ailleurs, en bas, dans l'eau turquoise… dans l'aquarium des poissons… Ici, il fait trop chaud, on fond comme des glaçons…
— Viens, on va sortir. On va dans l'eau.
Elle lâche le porte-manteau et se retourne vers moi. Elle ne cherche pas à m'embrasser, elle veut faire comme j'ai fait, je comprends, je me laisse faire, et à l'étincelle de ses yeux je sais que je suis sur la bonne voie, avec elle ce ne sera que de la baise.
Elle se met à genou, elle baisse mon maillot, et devient une femme qui me regarde, comme une femme regarde quand elle a mon gland dans sa bouche ; elle me parle avec les yeux, un vrai regard de salope mais en même temps très tendre. Elle embrasse mon sexe, on dirait qu'elle lui parle, elle l'embrasse comme si c'était ma bouche, et elle me suce aussi, et moi, je fonds…
Sur le lit on continue… trempés, excités et mélangés à l'eau salée. Je l'allonge sur le dos, une fois couchée, elle est plus détendue et je la pénètre, encore et encore et chaque fois que je sens qu'elle va jouir, j'arrête pour ressentir le toxic que je suis au bout de mon gland, je ressens l'envie, l'envie de la faire jouir et de jouir moi aussi, mais je veux nous mener encore plus loin.
Je sors d'elle, je remets mon maillot, je lui fais signe de me suivre, j'ouvre la porte, elle me suit. Par l'échelle je glisse dans l'eau sans bruit, j'attends qu'elle descende aussi, je regarde son cul que j'attends d'exploser, ses formes sont si féminines, si voluptueuses…
On nage sous le catamaran, et au travers des interstices du pont en teck qui, au-dessus de nos têtes, relie une coque du catamaran à l'autre, personne ne se doute de rien, seul Fred nous a vus, et l'air affolé me fait signe, avec l'index pointé en l'air : Non ! Non !
Il sait, Fred que je suis en bas… et cette idée m'excite encore plus.
On nage sous le catamaran, on se met face à face, je m'accroche à une barre transversale avec une main, le bas de mon corps reste dans l'eau. Avec l'autre main je ramène la fille vers moi, collée, j'enroule mon deuxième bras autour de la barre. Et là, c'est elle qui fait : elle s'accroche à moi, elle prend mon sexe et le met dedans, en elle, et avec ses jambes elle enserre mes reins. On ne se regarde pas, c'est comme un truc animal, on est imbriqués, elle a son visage dans mon cou et moi dans le sien.
Et on bouge.
On bouge et les poissons curieux viennent nous regarder mais moi je suis dans la baise, là, et il n'y a rien d'autre qui peut exister autour de moi. Ça va très doucement, on reste collés-collés, c'est lent et profond, on glisse bien, on devient un corps entier, et moi, je ressens toute la baise et j'adore ça.
Puis ça ne me suffit plus, il faut que ça explose, que la bulle éclate, alors ça s'accélère, ça devient un trot, un trot de cheval, et de plus en plus vite et de plus en plus fort ! Et on jouit, elle et moi en même temps. J'étouffe mon cri de plaisir, et, elle, elle mord mon épaule pour ne pas hurler.
Ça, c'était du cul physique. Du cul mais rien d'autre.
Sur le catamaran, puis après, quand nous sommes rentrés à l'hôtel, je n'ai plus calculé Pocahontas.
C'était de la baise, et la baise c'est comme ça.
Je le savais, elle aussi.
Je l'ai baisée, mais à aucun moment je ne l'ai embrassée, nuance. Je refusais de donner un peu de moi et quand une fille essayait de m'embrasser, je lui répondais, dans un mouvement de recul :
— Tu peux m'embrasser en bas si tu veux !
*
Puis je me suis mis à penser que si je n'embrassais pas, c'était peut-être parce que mon âme n'était plus là, comme si j'étais devenu une coquille vide.
… Comme si mon Bernard-L'hermite intérieur était parti ailleurs...
TOXIC
explosif!
· Il y a plus de 9 ans ·branche