L'inconnu que j'aime

desmotspourlavie

Un matin de janvier,je marchai, ou plutôt j’errai dans un quartier que je ne connaissais pas, proche de mon lieu de travail. A 5h, rares sont les personnes flânant ainsi. Et pourtant, un inconnu faisait de même. Nos regards se croisèrent, il poursuivit sa route comme si de rien n’était, moi, je restai figée. Même s'il faisait toujours nuit,tout mon être avait vu en lui mon âme soeur.

Depuis ce jour, je passe des heures dans le quartier où nos chemins se sont croisés, dans l’espoir de le revoir cheminer sans but. Je sais qu’un jour il reviendra à la même heure pour me parler, me sourire, et me dire ce que j’ai envie d’entendre de sa bouche.

Il m’a littéralement hypnotisée en un regard, à présent me voilà dépendante d’un parfait inconnu.

J’attends quelques minutes chaque matin sur un banc, comme pour lui laisser la chance de me rencontrer, comme pour conserver l’espoir que mon cœur alimentait un peu plus chaque jour.

Peu à peu, j’oublie la notion du temps, je me perds dans mes songes, et pense à ce que ressemblerait ma vie avec cet homme que je n’ai croisé qu’une fois dans ma vie.

Ces visions imaginaires me réchauffent de l’intérieur et m’aident à affronter le froid de cet hiver si rude.

Deux mois ont passé, mais mon obsession pour mon tendre inconnu était restée intacte, et même plus intense:je passe toujours par le quartier de notre rencontre et m’assois sur le même banc quelques minutes qui se transforment parfois en heures selon mes obligations.

Rien n’y fait: je veux le revoir. Je veux entendre sa voix et contempler à nouveau sa beauté. Je veux me plonger dans son regard et me perdre dans cet océan si bleu et si profond. Je sais que c’est lui, et pas un autre.

J’essaye de le chasser de mon esprit, je me dis que cette passion est totalement dénuée de sens, mais il reste profondément ancré dans ma tête et dans mon cœur: essayez d’arracher un chêne dont les racines sont greffées à la terre qui le supporte.

Un jour, je le revis, mais pas au même endroit. Cette fois il fallait que je lui parle, il ne fallait pas le laisser partir comme la première fois.

Je ne me suis pas trompée de personne: j’aurais su le reconnaître entre mille hommes.

Je lui tapotai timidement sur l’épaule, il se retourna, il me sourit, et me demanda ce que je voulais. Sa voix était aussi suave et douce que les traits de son visage. Il m’impressionnait à tel point que je ne sus quoi répondre. Il me proposa de m’accompagner là où j’allais pour faire connaissance. Lorsque nous arrivâmes au terme de notre itinéraire, il s’apprêta à partir lorsque j’eus une envie soudaine de le suivre. Il me confia qu’en réalité il n’habitait pas cette ville et qu’il allait retourner à son domicile. A présent que je l’avais retrouvé, il m’était devenu impossible de le laisser s’en aller, et l’idée même de me séparer de lui était un déchirement.

Je lui répondis que peu m’importaient les conséquences, j’avais tellement attendu ce moment que je suis résolue à le suivre. Il s’étonna, me regarda longuement, d’un air interrogateur. Je lui expliquai alors le « flash » du mois de janvier, et ma vie qui avait changé depuis ce jour. Il ria de bon cœur et s’excusa de m’avoir subjugué de la sorte.

Il me rappela que pour lui j’étais une parfaite inconnue et qu’il n’ouvrait pas sa maison à n’importe qui. Mon cœur se mit alors à se fendre, mes yeux se remplirent de larmes. Tout espoir était vain, il ne voulait pas de moi dans sa vie.

Il m’enlaça lorsqu’il me vit pleurer, et me chuchota au creux de mon oreille qu’il venait de ressentir pour moi ce que j’avais ressenti pour lui trois mois auparavant.

 

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