Matin
sauzki
Il fait chaud, très chaud. Tout est brulant autour de moi. J’aime ça.
Je sens le vent sur ma peau et le dessous de mes pieds cuire sur le bois de la terrasse.
J’ai du mal à ouvrir les yeux face à la lumière de ce début de matin.
J’ai dormi, je me suis coupé du réel quelques heures et maintenant je dois m’ouvrir à cette nouvelle journée. Je commence à marcher doucement, profitant de chaque pas et de la caresse du bois. Je fais le tour de ce rectangle ouvert au monde et je détends les muscles de mes jambes fatiguées par le sommeil.
Un café et la vie est encore plus belle.
Mes yeux sont maintenant habitués à la clarté et je retrouve ce cher olivier, toujours là, au bout de la terrasse. Je l’aime tant, immobile et fier, baignant d’ombre et de lumière avec juste quelques mouvements d’humeur quand le mistral s’emballe.
Mais aujourd’hui pas une feuille ne bouge. Il est bien, à profiter du soleil et de l’énergie naissante de cette journée d’été. Il me regarde vivre, jour après jour sans jamais me juger, compagnon impassible de mon quotidien.
Nous sommes là, tous les deux à sentir le jour commencer à réveiller la colline et ses odeurs de thym, de chênes et de pins. Toute la Provence de mon enfance, les promenades avec mon père et ma mère, nos rires et nos jeux sont là, dans une simple respiration. Toute cette beauté passée, perdue remonte en moi en un instant violent et fort. Quelques larmes s’annoncent et je préfère reprendre mon tour de la terrasse pour garder la sécheresse de ce matin.
J’atteins mon fauteuil préféré. Assis face au ciel bleu, je savoure le temps arrêté et je vis intensément ce moment. Je pense à ce et à ceux que j’ai perdus, à mon enfance, ma jeunesse, aux larmes, aux matins, aux échecs et aux nuits. Tout cela est maintenant moi.
Je trempe mes lèvres dans le café et réfléchie à ce que j’ai, une terrasse face à l’horizon, le soleil qui chauffe mon crane vieillissant, l’espoir, quelques années à discuter avec mon olivier et le bonheur d’être là, présent, à cet instant.