Mes fantastiques aventures: Partie 4

J. M

« En direction de l'ancien temple, tu dis? »

Le vieillard, qui paraissait âgé de plusieurs centaines d'année, tellement la peau de son visage était ridée, resta songeur, les yeux dans le vague, lorsque son interlocuteur lui apporta la nouvelle. La prophétie allait-elle enfin se réaliser? Le vieil homme, qui ne pouvait plus se déplacer tant ses jambes lourdes et fatiguées l'avaient déjà porté jusqu'à présent, sentait comme une lueur d'espoir briller, enfin, et réchauffer son cœur glacé. Il était si las aujourd'hui, il avait attendu depuis si longtemps.

Imaginoria était menacée. Malgré la présence de trois grands soleils, le royaume ne cessait de se refroidir. L'hiver semblait durer plus longtemps que jamais. Le printemps tardait à pointer son nez. Le vieillard avait redouté, chaque année, de voir la saison blanche s'éterniser et lorsque les beaux jours revenaient, il se rassurait, mais cette fois ci, les tempêtes redoublaient de force, les températures glaciales devenaient de moins en moins supportables, à tel point que les quelques rares habitants de la contrée du nord, pas préparés à un tel changement climatique, avaient fuient la rudesse du froid pour s'installer sur les terres un peu plus chaudes du sud. Mais combien de temps encore le sud allait-il conserver sa douce tiédeur? Le froid gagnait tout le pays, et ce n'était que le début d'un grand bouleversement...

Ce que Judith ignorait, c'est qu'Imaginoria était, autrefois, un grand continent, rattaché à la Terre. Celui-ci bénéficiait d'une végétation luxuriante, les gens vivaient en paix, dans une sérénité rarement rencontrée de nos jours. La nourriture abondait, le climat était clément, l'on vivait d'entraides et d'échanges. En ce temps lointain, l'on connaissait encore les secrets de la création du monde. Des sages détenaient les formules sacrées qui permettaient le miracle de la vie. De leurs pensées naissait l'univers entier, du plus petit atome à l'étoile gigantesque...

« Mon cher ami, toi seul est capable de survivre dans ce froid. Je te suis reconnaissant de ton aide précieuse! Va mon ami, va et suis cette jeune personne! C'est une terrienne, égarée chez nous, et il se peut qu'elle incarne cette enchanteresse qui viendrait sauver notre monde, tant les ressemblances sont frappantes. Cette vieille légende ne serait donc pas qu'un mythe et si elle s'avère exacte, cette jeune femme impétueuse est peut-être en danger...Tu dois l'aider! Et laisse moi à présent, je ne suis plus d'aucune utilité, je peux enfin rejoindre le monde des esprits. Tu sais ce que tu as à faire mon ami. Bonne chance à vous deux! »

Sur ces paroles, le vieil homme, jusque là assis en tailleur, détendit ses jambes douloureuses, et s'allongea sur son modeste lit de bois, simplement recouvert d'une peau de bête. Il ferma ses yeux et ajouta, d'une voix essoufflée, à peine audible: « Souviens toi de ces vers qui ont participé à la naissance d'Imaginoria, il faudra que tu les répètes à cette inconnue, garde les bien ancrés dans ta mémoire, je te fais confiance ». Puis il récita, dans un demi-sommeil:

« Un jour, une nuit,

Elle est née dans un souffle,

Aussi léger qu'une pensée,

Comme une bulle de sens,

Qui a éclatée dans le vide,

Et qui a rempli ce dernier...

Une mélodie

S'est élevée de nulle part,

Puis elle a inondé un ciel,

Ensemencé une terre,

Vivifié un océan,

Et une flamme vacillante

A enfanté les astres

Qui nous éclairent depuis... »

Un silence pesant s'ensuivit. L'humanoïde, qui ne souffrait pas de la morsure du froid, ni de celle des émotions d'ailleurs, ressentit néanmoins, pour la première fois de son existence, comme un petit pincement dans son cœur de métal, comme un léger serrement dans son ventre de métal. C'était comme si le vieil homme, que l'humanoïde avait toujours fidèlement servi et écouté tel un disciple attentionné et respectueux, lui avait légué, à cet instant même où la vie le quittait, un peu de son humanité.

Le dernier sage d'Imaginoria venait de mourir, et avec lui toutes les légendes et tous les mythes qui constituaient le royaume désormais chancelant face à la grande avancée du froid.

L'humanoïde sortit de la caverne où s'était réfugié le vieillard. Il décida de rejoindre Judith sur le champ, avant qu'elle n'entreprenne l'escalade de la roche des dieux, il n'y avait pas d'endroit plus instable dans le coin. L' érosion avait rendue l'ascension du pic hasardeuse et dangereuse.

Dehors, l'accalmie n'avait pas duré. Des flocons virevoltaient à nouveau dans les airs, se préparant doucement pour une longue danse macabre.

Christine

à suivre...

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