Mimétisme canin ou ADN commun?

Pour rire,

quand le ciel bas et lourd,

chargé d'eau et des sombres nuages de la crise, du chômage et des "emmierdements" quotidiens,

pèse comme un couvercle étanche de cocotte-minute verrouillé et soupapé,

sur nos frêles épaules de citoyens ordinaires,

lesquels quêtent du coup,

la moindre occasion de s'amuser de rien.

Nous apprenons qu'une bête, un pauvre toutou au poil dur, se désespère dans un box d'un refuge SPA. Ramassé par la fourrière, il lèche tristement les barreaux de sa cage de 3m2 , au milieu de 250 autres bestioles de tout poil et plumes: oie, mouton, chèvre, coqs, chats, perruches...lesquels attendent un maître comme certains ont attendu le Messie, avec la rage et l'espoir qu'ont les espèces enfermées, tantôt pleurant, tantôt beuglant, pensant prendre par les sentiments un quidam passant, lesquels cherchent selon, la bonne affaire ou la bonne action, le réconfort ou le frère d'un perdu qui lui ressemblait.

J'avais regardé le site l'année dernière après le décès de Sally, ma chienne adorée, mais n'ayant vu que des molosses d'un bon mètre au garot, j'avais renoncé....sans penser que les bénévoles débordés ne mettent en ligne que le trombinoscope des bêtes les plus difficiles à caser, une cohorte de chiens âgés, généralement plus lourds que moi, ne supportant pas les enfants ou pas les vieux, devenus enragés par la captivité et le malheur. Rien n'indiquait que dans ces refuges se trouvent aussi des chiots et de jeunes candidats à l'adoption, du york au scottish en passant par le Saint Bernard ou le caniche, de gentils animaux à peine sevrés, certains avec pédigrées, pucés, tatoués, abandonnés par des maîtres décédés, peu scrupuleux ou dépourvus de bon sens. C'est d'ailleurs ainsi que j'assistai à une scène inouie. Attendant à l'accueil du refuge avec d'autres maîtres putatifs, un veau noir et bavant investit l'espace, urinant sur le présentoir de dépliants et vômissant partout. Je ne sais lequel accompagnait l'autre, mais cet arrivée bruyante et odorante se fit simultanément à celle d'une jeune fille, toute de noir vêtue - excepté les nombreux piercings argentés- portant bas troués, mini-jupe de skaï et blouson assorti,  le tout assorti au vernis à ongles et rouge, ou plutôt, au noir à lèvres. La demoiselle textotait férocement, sans se soucier de sa bête, laquelle eut à peine à se dresser pour poser ses pattes scrabeuses sur le desk. Une maîtresse-es-chien taillée dans une armoire normande vint récupérer le molosse, que sa maîtresse abandonnait là, au prétexte qu'elle l'avait mordue. J'ai compris le chien. Nonobstant mon statut d'humain, j'aurais bien fait pareil. 

C'est donc le hasard de la vie et le passage d'une jeune amie, qui m'alertèrent sur ce mâle teckel, gémissant tant et plus derrière son rideau de fer, prenant la pluie, les tiques et des puces par dizaine. Au terme d'un périple judiciaire qui dura trois semaines (il faut voir comme les lois compliquent à loisir les adoptions des animaux), nous adoptâmes Haaron suite à l'abandon certifié de son précédent propriétaire. Ce jeune étalon canin d'un an à peine, ressemblait quand nous le récupérâmes à un vieillard souffreteux, le poil maigre, sec et gris, le sourcil en débandade et l'âme perturbée, infesté de tiques, psychologiquement abandonnique, nous léchant le moindre carré de peau pour nous assurer de son amour inconditionnel.

Bref, la bête lavée et nourrie, prit ses aises et découvrit la vie de couple avec notre jeune femelle de même race, de 6 mois son aînée.  Et là, est-ce le mimétisme avec la gent masculine de la maison ou finalement une ressemblance ADN avec l'espèce humaine, voilà que notre adopté se met à tout point à agir en mâle.

Quand il ne tente pas un nouvel assault viril sur sa compagne, il passe des heures à jouer avec une balle, la lâcher, courir après, la rattraper vélocemment, sous l'oeil perplexe et résigné de notre chienne, laquelle, couchée dans le canapé, contemple la scène, se disant que les mecs sont définitivement incorrigibles, qu'il leur en faut peu pour être heureux: une nana, un ballon et une gamelle bien remplie. Lui dévore ses croquettes dans de grands bruits de claquements de dents, avant de slurper énergiquement son eau, lors que notre petite femelle délicate déguste sans bruit sa nourriture, la plupart du temps quand l'autre morfal a fini d'engloutir son festin avant de se lécher les babines. Elle me regarde l'air de dire "on ne peut vraiment rien faire pour qu'il mange proprement et en silence? Pour qu'il ne mette pas des croquettes tout autour de la gamelle?"

Quand la mâle bête est épuisée, elle se vautre à plat dos pattes en l'air (et le reste) sur le canapé avant de ronfler, d'un coup, tête en arrière, paupières mi-closes, totalement détendu et avachi, ne pensant manifestement à rien, indifférent au sort de sa compagne. Notre chienne dort sur son coussin bien propre, sur le côté, ses membres se crispant au gré de ses rêves. Il lui arrive même de gémir ou de se retrourner. A croire que le cerveau des chiennes comme celui des femmes ne connait jamais le repos.

A l'inverse, notre toutou qui n'aboyait pas en arrivant chez nous, s'est transformé en chien de garde en une semaine, aboyant tant et plus aux pieds des inconnus ou à la moindre injustice, comme notre chienne, dont la voix n'a rien à envier à son caractère, trempé, ressemblant à s'y méprendre à celui de sa maîtresse! C'est au moins ça de gagné, un chien se doit quand même de garder la maison.

Et dire que je râlai contre les quelques chaussettes laissées éparses dans la maison! Maintenant je ramasse en plus chaque matin, les débris de tout ce que ce bel animal a déchiqueté de quelques coups de crocs!