Mon cœur, c'est quelqu'un de bien.

celle-qui-ecrit

J'ai attendu dans une gare pour pouvoir rentrer chez moi. Je n'avais rien à faire. Ma pochette de feuilles sur les genoux, j'ai écrit un texte. Il est vrai. C'est mon passé et mon présent, un sourire.
Il est 15h53, on est le mardi 25 mars.
J'attend depuis 14h08.
 
Je le sais parce que je viens de regarder sur mon portable.
Il fait un temps de chien dehors, le ciel est vide. Je suis seule sur cette chaise en plastique marron dégueulasse.
C'est le marron qui est dégueulasse, pas la chaise…
C'est un marron super moche, je saurais même pas comment le décrire… Enfin vous me direz, de toute façon le marron c'est pas une couleur exceptionnelle…
Je suis dans le hall de cette gare. Cette petite pièce grande mais pourtant vide.
Enfin il y a des choses, mais elle est vide.
Il y a un photomaton, une machine qui distribue des cannettes et tous ces autres trucs pleins de sucre. Il y a aussi une poubelle et une plante verte avec de petites feuilles allongées qui ont l'air d'être en plastique. Le carrelage est horrible, on dirait tout plein de choses laides réunies ensemble. Bref c'est moche, c'est vide et on s'ennuie. Il y a des gens qui passent et qui repassent.
 
Ce hall on dirait mon cœur.
 
C'est vrai. Ça peut paraitre con de dire ça, mais en y réfléchissant là maintenant, bah je me dis qu'ils ont plein de points communs.
Ça fait deux heures que je m'ennuie, j'ai raccroché au nez de ma mère parce que j'avais pas envie de me compliquer la vie.
Je crois que j'ai plus de circulation dans ma jambe droite, parce que je les croise. Je fais comme toutes ces femmes et ces filles. C'est con. Pourquoi on fait ça ? Pour bien se tenir ? Merde Cécile ! On s'en fout !
Je décroise mes jambes.
Bon je parlais de quoi ? Ah oui, de mon cœur.
 
Ce hall on dirait mon cœur. Passé.
 
Tout le monde en a un de cœur, plus ou moins beau, plus ou moins résistant. Le mien il est solidaire. Il ne sait pas ce qui l'attend et il fait ce qu'il doit faire : il bat. Voila, il bat.
Pourquoi ? Depuis le temps il aurait du s'arrêter. Depuis toutes ces fois ou je hurlais, ou j'espérais disparaitre. Il aurait du se dire « bon bah elle est soulante, elle a carrément aucune reconnaissance, elle se fout complètement de moi : j'abandonne ! ».
Il aurait du faire grève. Comme tout être normal, il aurait du s'énerver.
Mais non, il a continué.
Il ne m'a pas laissée en plan comme tous ces autres gens. Je ne lui faisais même pas confiance, mais lui si. Il n'a pas pris son air hautain, il ne m'a pas blessée, il n'a pas fait son faux-cul. Il ne m'a pas prise pour une conne, nan jamais.
 
Mon cœur, c'est quelqu'un de bien.
 
Sans lui, sans son aide, je ne serais plus là.
Je ne serais pas en train de me dire que la bande de mecs qui est en face de moi parle trop fort.
Je n'aurais pas mal au poignet à force d'écrire avec mon crayon de bois sur ma copie double parce que j'ai plus de feuilles simples et la flemme d'en racheter.
Je n'écouterai pas cette musique que j'ai découvert il n'y a pas longtemps.
Sans lui, je n'aurais pas tous ces amis.
Sans lui, je n'aurais pas autant rit.
Sans lui, je n'aurais pas 17 ans dans 5 jours.
Sans lui, je ne serais pas tombée amoureuse.
 
Sans lui, maintenant, je ne serais pas heureuse.
 
Il est 16h20, je vais bientôt monter dans mon train.


Cécile.

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