Mon réveillon avec maman Roubi (6)
arthur-roubignolle
Mon réveillon avec maman Roubi
Faut que je vous raconte mon réveillon de Noël, normalement je le passe avec ma mère. Je vais la chercher à la Maison d'accueil des Bleuets ou elle est censée finir sa vie (mais en réalité c'est elle qui abrège celle du personnel !). Et je l'emmène ensuite chez sa vieille amie, Geneviève Du Pâtis de la Trimouille, une dure à cuir elle aussi. Résistante de la première heure, elle a buté cinq miliciens à l'arme blanche toute seule. Quand elle a été arrêtée par la Gestapo, deux des tortionnaires qui la torturaient sont tombés en grave dépression, un troisième s'est pendu et le quatrième préféra rejoindre les Waffen SS sur le front russe ! Elle a été décorée par le Général lui même en personne.
Nous allons donc, ma mère et moi tous les Noëls chez cette dame, ou madame Raymonde une autre amie de ma mère et de Geneviève nous rejoint. Madame Raymonde a tenue un boxon à Rouen, boxon qui connut son heure de gloire avec les soldats américains à la Libération. (Madame Raymonde s'est d 'ailleurs mariée avec un de ses clients américains, un éleveur texan dont elle hérita de la fortune à la mort de celui-ci.).
Et c'est en compagnie de ces trois dames que nous faisons un souper fin qui se termine invariablement par une partie de bridge effrénée ou je plume l'une ou l'autre de ces dames (et toujours sur des ouvertures sans atout, ce qui les épatent à chaque fois...).
Bref, cette année, ma mère ne voulait pas aller chez son amie Geneviève (avec qui elle s'est brouillée à cause d'une sombre histoire de fausse donne lors d'une partie de bridge...).
Ma maman cette année a décidée de passer le réveillon de Noël chez les pauvres !
- Mais nous n'en connaissons pas ! Lui ai je rétorqué.
- Moi si ! Me dit-elle d' un ton fier.
- Qui ça ?
- Les parents de notre ancienne bonne, nous sommes invités chez-eux figure-toi !
- Ils sont biens bons, dis-je. Tu as tout de même licencier leur fille sous prétexte qu'elle avait subtilisée les petites cuillères en or héritées de l'oncle Archibald alors qu'en fait tu les as retrouvées trois jours plus tard et c'est toi-même qui les avaient planqués sous ton oreiller !
- Les pauvres sont cons que veux-tu que je te dise ! Me dit ma mère en enfilant son manteau en renard argenté.
Nous voilà donc arrivés chez les parents de notre ancienne bonne, qui habitent une petite loge de concierge dans le vingtième arrondissement.
Ma mère est toute excitée, je crois bien que c'est la première fois de sa vie qu'elle fait un repas avec des pauvres. Si l'on excepte évidemment cet épisode pendant l'exode en juin 40, ou elle a été obligée de partager son repas avec des paysans du Berry... Repas qui s'est terminé de façon assez abrupte à cause de l'aviation italienne mitraillant tout sur son passage... Les deux paysans ont été hachés menus sous les yeux de ma mère, qui n'a jamais pu terminer la délicieuse potée que ces braves gens lui avaient préparé...
Les Da Silva nous accueillent dans leur petite loge avec de grandes démonstrations de joie, trop heureux d'accueillir l'ancienne patronne qui a licencier leur fille et a faillit porter plainte contre elle par dessus le marché...(C'est moi qui ait empêché ma mère d'aller au commissariat!).
Ils ont mis « les petits plats dans les grands », nous disent-ils en nous désignant la table en formica sur laquelle ils ont disposées leurs assiettes en Duralex les plus belles et des couverts en pur inox de chez Conforamoi.
Madame Da Silva dit : « C'est à la bonne franquette, chez nous on fait pas de chichis ! »
- Ma mère : « rassurez-vous madame Da Silva je n'ai pas l'intention d'en faire. Allez hop, quand c'est qu'on boit un coup, à la Saint-Glinglin ou à Pâques ? »
Les Da Silva sont enchantés, monsieur Da Silva (Aghostino) se précipite vers ses bouteilles. Tournée de pastis générale !
« Ouerk ! » Fait ma mère en avalant une gorgée
- « C'est vraiment dégueulasse votre truc, ou c'est que vous avez acheté ce tord boyau ? »
- Chez Lidl, en promo à 6,50 euros !
La suite du repas fut dans la même veine. Ma mère qui s'attendait à du caviar fut très surprise par les œufs de lump, c'était la première fois qu'elle en mangeait.
Habituée à Noël aux chapons les plus fins de chez Fauchon, elle fit la grimace devant la dinde aux marrons (en promo aussi chez Lidl à 10,50 euros). Les crevettes d'élevage à 4,20 euros eurent du mal à passer elles aussi...
La Clairette de Die à 2,50 euros lui donna des aigreurs à l'estomac.
La bûche de Noël aux pures huiles de palme faillit l'achever...
Et c'est vers minuit que nous quittâmes ces baves gens qui s'étaient mis en frais pour nous. Ma mère faillit vomir dans le taxi mais heureusement ne le fit que lorsque nous arrivâmes dans le hall de la maison des Bleuets, ou je la laissais enfin...
Ma mère me dit, juste avant que je ne la quitte : « Ces pauvres, quand même, ils doivent toujours se débrouiller avec des moyens de fortune ! ».
Et c'est sur ces bonnes paroles que je m'éclipsais discrètement pour aller rejoindre Geneviève du Pâtis de la Trimouille et madame Raymonde pour leur mettre une pâtée au Poker. A trois seulement, impossible de faire une partie de bridge !
Ça faisait longtemps que nous n'avions plus de nouvelles de Madame votre mère...
· Il y a presque 6 ans ·petisaintleu
C'est vrai, je lui transmet ton bonjour, elle t'aime bien...(elle m'a toujours dit: " ce PetitSaint Leu, c'est un gars bien!"
· Il y a presque 6 ans ·arthur-roubignolle
Normal, c'est ma maîtresse.
· Il y a presque 6 ans ·petisaintleu
I am shocked! (vise-tu l'héritage de ma maman? je te promet que tu n'aura rien, elle est en train de tout claquer avec un autre amant...)
· Il y a presque 6 ans ·arthur-roubignolle
Je sais. Elle adore la troïka.
· Il y a presque 6 ans ·petisaintleu
Tu m'en apprends de belles! (mais ça ne m'étonnes pas de ma mère...)
· Il y a presque 6 ans ·arthur-roubignolle
Comme elle aime à le dire : Jamais 3 sans 4.
· Il y a presque 6 ans ·petisaintleu
Moi j'ai assumé et assuré cette année. Même pas eu besoin de citrate de bétaïne :o)
· Il y a presque 6 ans ·daniel-m
Vive les pauvres, ce sont les faire-valoir des riches ! :o))
· Il y a presque 6 ans ·Hervé Lénervé
trop bien, Balzac peut aller se rhabiller.
· Il y a presque 6 ans ·Pas Humain
Pourquoi, il était à poil ? :o))
· Il y a presque 6 ans ·Hervé Lénervé
Belle immersion dans le secret des loges, où les agapes à 5 euros sont monnaie courante.
· Il y a presque 6 ans ·yl5
Il vaut mieux boire de la piquette avec des gens bien que des grands cru avec des trous du cul!
· Il y a presque 6 ans ·arthur-roubignolle
Je pensais mettre un commentaire... Mais tu m'as doublé ! Super
· Il y a presque 6 ans ·Gabriel Meunier