Monochrome

kelen

J'ai mal aux yeux comme on s'angoisse.

Une tétanie quand je vous ai tous en face.

La peur de voir vos visages qui me glacent

Quand s'agacent mes douleurs et mes traces.

Alors je ferme les yeux. Je force l'étau.

Celui qui blesse ceux qui courbent le dos.

Blanc. Noir. Noir. Blanc.

J'ai dans mes yeux, le même constat, les mêmes dégâts

Qui dérapent parfois jusqu'à mon palpitant dépité

Quand tous ces pieux percent ma rétine, au point de m'aveugler

Noir.Blanc. Blanc. Noir.

Au commencement, le monochrome monotone de nos humeurs

Qui murmure lors de ses insomnies assourdissantes

Que seule une césure, une brisure, une fureur de couleurs

Pourrait nous sauver de cette asphyxie à transpercer nos tempes

Rouge.

Rouge comme le sang, celui qu'ont fait couler mes amants.

Quand l'expressionnisme vise ceux qui gisent au sol

Un coup. Un coup de rage sur un visage en sang

Quand le courage tise des litres l'alcool

Assommé. Etourdi. Me voilà anéantie entre les clés de sol

Un tableau de Munch. Un cri. Un coup de canif.

Et puis tant pis. Retournons en piste et en prose.

Rose

Rose comme nos névroses que l'on tente d'adoucir

Ces nostalgies, à double dose de peur et de désir

Quand l'enfance se fait défoncer à coup d'incertitude

Et que l'on ne garde dans le coeur qu'un rose amertume

Amer comme son rosé qui se déverse du pichet

Piquant au nerf une famille éclatée par ses excès

Rose. Rose bonbon comme ceux qu'on avalait

A coup de lexomil tous ces soirs d'été j'étais

Bien déterminée à partir loin et à poser ailleurs

Mes lunettes roses pour transpirer enfin de bonheur

Violet

Violée quand le rose d'Eros flirte avec le noir de Kobal

Et que plus rien ne compte dans c'corps à corps animal

Plus d'envie, plus de vie, quand l'amour se fait violer

Dans ce lit-cercueil, au creux de sa perversité

Je t'avertis que dans ces nuits j'ai fracassé mon ego

Et que l'alter m'a altérée jusqu'à rompre mes os

Et qu'être là et vous enlasser de mes vers

C'est juste un saut sans élastique, peut être un revers

Vert.

Verte de rage quand je les vois tous et toutes se fâner

Face à un système qu'on ferait mieux d'enflammer

De verités en vertiges on fustige leurs voracité

Boulimie de billets verts en arpège

Qui s'accrochent parfois dans nos appartés

Comme des canons qui assourdissent nos rêves.

Me voilà engagée.

Drapeaux rouges dans l'herbe verte.

Qui viendra les hisser? Ici ou là. Trop de rêves calcinés.

Surréaliste. Voilà le monde qui se crispe et gronde.

Quand nos oeuvres creusent leurs tombes. Assez.

Assez comme tous ces mots qui me rongent

Orange

Orange comme toutes celles qu'on apportera en détention

A ceux et celles qui ont dérapées sur l'asphalte

Et qui ont grimmé leur coeurs comme Tybalt

On rejoue nos drames à crânes ouverts

Toujours aphone et en manque d'air

Avec cette brique dans l'estomac qui pèse

Bien plus qu'une morale ou une conscience de glaise

Voilà des couleurs chaudes et des points de suspension

Entassées dans des cages dans les centres de rétention.
En attente. En sursis. Plus de noir et blanc. Que du gris.

Grisés par leurs omnipotence, les voici acteur

Ecrasant les oranges avec leurs tasers

Bleus.

Bleus comme ces CRS et leurs armes à feu

Un coup de flashball dans un oeil... Action !

Le quartier est tuméfié par leurs interpellations

Des coup de matraque dans des thorax qui craquent

Dans ce théâtre peuplé de policiers névropathes

Où tu cours, qu'est ce que tu crois?

Dans un transfo EDF, y'a pas de miracle tu vois !

Allez, vomis un peu cette haine

Pour éblouir nos coeurs qui saignent

Et emplis tes veines d'arc-en-ciel

Un mélange de couleurs éternelles

Associées, elles paraissent de toute beauté

Un songe qui danse entre des pluies acides

Vidant nos mémoires de tous ces appartés

Et rendant nos avenirs transparents et lucides

Cette nuit, le pinceau virevolte

D'expérience en expérience

Raccrochant ptits bonheurs et révolte

A mes tristes défaillances

Pour vous offrir au fil des mots, de ma trame

Un tableau unique, le reflet de mon âme.

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