Poids

Lev Hamels

L'espoir est lourd, et parfois plus que mes épaules, perdantes, ne savent le supporter. Alors certains jours, j'emmène mon espoir comme un sac à dos. D'autres, je suis déjà trop fatiguée pour traîner mes os sur les routes de ma vie. L'espoir est lourd, et le porter, ce serait m'alourdir, je crois que je ne suis pas prête. Moi, ce que je veux, c'est des ailes de papillons, mais comment les déployer, ces ailes de papillon, si un espoir en sac à dos les bloque ? Je sais que ces ailes sont mauvaises pour moi, mais je les désire ardemment, comme un gamin gâté qui s'acharne à obtenir quelque chose pour le simple plaisir de claironner "tu vois, je l'ai eu !". Il n'y a aucune raison pour ça, disent-ils. Ils disent que je suis en danger. ils disent que je joue, que c'est une phase, que je veux qu'on s'intéresse à moi. Ils disent que je n'ai pas encore l'air assez morte pour être anorexique. Ils me disent que je ne les aurais jamais, ces ailes de papillon. Moi je sais que si je deviens aussi mince et légère qu'un papillon, elle pousseront, ces ailes. D'autres appellent ça la mort. Au final, ce n'est qu'une question de point de vue.

Non pas que les ailes des papillons m'attirent en tant que telles. Disons que ce n'est pas une finalité, mais une marque. Le jour où les ailes des papillons pourront me porter, alors c'est que j'aurais suffisamment bien fait ce que j'avais à faire. Que je serais libérée à tout jamais des calories, de la tentation et de ces gens qui tentent par tous les moyens de te faire manger. Que je serais libérée de la graisse qui alourdit mes hanches et mon moral.

L'espoir est lourd, parfois trop lourd pour ce corps atrophié et sans énergie.

Disons que la petite balle brûlante au creux de mon estomac, elle, est plus légère, et me rend plus légère.

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