PORTRAIT OF MY OWN LIFE
suemai
Je suis une québécoise de 26 ans. Je travaille pour une agence de Montréal.
De plus loin que je me souvienne, j'étais assise sur les genoux de mon père à pianoter n'importe quoi. Mon papa, pianiste de jazz, m'enseignait, tout doucement, à jouer de cet instrument. Il était d'un calme déroutant. Ce qu'il fut toujours. Tant aimant, si près de moi, tel se doit d'être un père, je crois.
Tout autour, régnait la bonne humeur. Ralph, contrebassiste de génie accompagnait mon père partout tout au long des ses engagements. Ralph se voulait mon second père. Puis André le troisième, un féru de Jazz, passant souvent des heures à me bercer et Antoine, complétait le quatuor, faisant médecine et ne manquant jamais à l'appel. Ils faisaient partie du groupe des «quatre.» Ceux qui bercèrent mon enfance.
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Puis vint un jour où mourut mon père. J'en fis une terrible dépression. Je n'avais que 17 ans. Ralph demeura près de moi. André et Antoine poursuivirent leur carrière. C'est ainsi qu'avec Ralph et un jour Marie, je renouai avec une certaine vie. Pleine de larmes non pleurées, et si difficiles à contrôler. Je terminai mes études universitaire en aucunes disciplines précises je choisissais l'ordre de mes cours. Mal m'en pris, je fus diplômée en (Bachelière tout simplement). Par contre, je possédais des acquisitions dans une multitude incroyable de disciplines. De la physique à linguistique en passant par la littérature et l'informatique. Je me sentais comme mon père, improvisant ma vie.
Marie devint ma muse. Je l'ai aimée. Non pas d'amitié, mais bien d'amour, un fulgurant amour. Marie ne demandait rien. Elle demeurait toujours d'un calme, me rappelant celui de mon père. Oui, je suis lesbienne et j'assure (comme vous dites).
Mes études terminées, j'obtins un poste de chargée de comptes publicitaires dans une firme de communication. J'aimais un tantinet ce boulot. On me donnait le titre de castratrice. J'arrivais à obtenir ce je désirais. C'est ainsi que Jeff, un très grand ami et photographe amateur, devint vite photographe de l'agence, sous la menace de ma démission. J'avoue qu'à 22 ans, je faisais preuve d'une extrême arrogance. Sauf... qu'on me diagnostiqua une bipolarité, trouble de la personnalité. Par contre, je faisais partie des «hypomaniaques» et non des «dépressifs.» Je ne dormais que 4 ou 5 heures par nuit et ça fourmillait dans ma tête à une vitesse que je ne contrôlais plus. On m'a prescrit une médication afin de réduire l'effet compulsif de mes comportements.
Marie, je l'aimais plus que tout, comme si elle devenait un genre de galaxie à elle seule. Elle était belle de partout. Chaque soir, je la regardais comme venant d'un autre monde, envoyé pour me protéger. Papa ne m'avait abandonnée.
Puis un jour, se produisit l'inévitable. Marie rêvait de faire le grand tour de l'écosse à moto. Comme elle ne pouvait assumer ses dépenses, je lui ai offris donc, son désir : sa mort... ce que je ne soupçonnais pas encore. Elle s'envola et je ne la revis plus jamais. Ralph, d'un âge avancé et souffrant d'un diabète chronique, me soutint dans ce qui demeurait, plus qu'une épreuve, une dithyrambique conversation avec Dieu. Il ne me la rendit pas et je lui retirai mon suffrage. Nous en sommes là. Dieu et moi nous sommes deux. Jamais il ne me rendra Marie sous prétexte que SA MORT devient inéluctable.
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Un jour, je retrouvai André par hasard. Il était actionnaire de la firme marketing pour laquelle je travaillais. Nous nous reconnûmes par hasard et ce fut un moment privilégié dans ma vie. Tant de temps. Un rapprochement avec Ralph se fit, mais très court. Ralph prit congé de la vie rapidement dû à son diabète. À ce moment, toutes mes larmes s'écoulèrent. André était là, près de moi. Je lui accordais plus que ma confiance.
Marie sur sa moto, tournant l'écosse avec un amour infini et à une vitesse à sa mesure, ne devait ne plus revenir. On m'annonça son décès, par une nuit tempétueuse. Totalement anéantie, André m'offrit un réconfort indicible.
Je fus des mois sans parler, sans être capable de communiquer. André demeurait à mes cotés, immuable. Un jour je le regardai et je lui fis part d'un projet. Je désirais enregistrer un album jazz pour tous mes disparus. Il loua un studio et m'épaula. Il me demanda de combien de musicien, le projet nécessitait, je lui répondis personne.
J'enregistrai tout par moi-même. Josh, propriétaire du studio, conservait une énorme banque de sons. C'est ainsi que naquit «Rituel extatique.» Je l'ai réalisé piste par piste. Josh m'assistait dans certaines programmations complexes. J'en suis fière aujourd'hui. André en fit un tirage d'un nombre excessif d'exemplaires, tous vendus à ce jour, il s'agissait de la fille de Jean-Marie Langevin. J'y reprends certain thèmes de mon père et de mes propres compositions. André assistait à tous les enregistrements. Mon troisième père me soutenait.
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Suite à tout ceci, j'habitais toujours rue St-Denis Montréal centre. Je ne savais plus. Il s'agissait d'un appartement mortuaire. Je retrouverais Marie partout. J'en devenais folle. Je crois qu'on aime qu'une seule fois dans une vie, de là l'immense tâche de veiller l'une sur l'autre. J'ai faillis à la mienne.
Encore une fois André me préserva de moi. Il habitait une immense propriété donnant sur le lac Supérieur au Québec. Je sous-louai mon appartement et depuis j'y habite. Un tas d'autres personnes nous ont rejointes, dont mon demi-frère Swager, que je ne connaissais pas. Notre mère habite avec nous. André acheta un piano à queue et je donne un concert/semaine pour tous maintenant. Nous formons une grande famille dorénavant. À environ un kilomètre du ponton, une île nous est ouverte. J'y passe tout plein d'heures à écrire, tant mes souvenirs, que pour mes lendemains.
J'habite une jolie pièce au grenier de la villa. Je m'y plais. Avec Flox, mon si beau labrador, il y règne la paix.
Je n'ai pas mentionné ma super très grande amie Émilie. Depuis que j'ai laissé l'agence et que j'œuvre comme mannequin, elle demeure comme un pilier, tout comme André. Je suis entourée de gens aimants. Mais très souvent les yeux d'André croisent les miens et, lentement, s'efface le groupe des «quatre», ces grandes années de grande prospérité.
Je conserve des enregistrements de cet album, sous format mp3. Je ne les vends pas. Je les distribue, je les donne à qui veulent entendre, ce à quoi ressemblent le passé, le présent et l'avenir.
Voilà un brin de ma vie. Je désirais vous le partager. J'espère que vous comprendrez ce juvénile comportement de m'être dissimulée derrière une autre.
Ainsi tout cela était vrai !.... pourtant une ombre demeure au tableau, j'ai ouï dire... un détail, me dira-tu… Mais non, pardon, ça ne me regarde pas… pourtant… Julia à raison, ce site est chouette
· Il y a plus de 8 ans ·Sébastien Jalbert
tu peux me dire ce ouï dire, ce serait nécessaire je crois
· Il y a plus de 8 ans ·suemai
oui, ce "ouîe dire" n'est pas un ragot, c'est de toi que je le tiens, c'est détail du texte "Marie Desocéans"
· Il y a plus de 8 ans ·Sébastien Jalbert
Oui, tu as raison, Marie était cocaïnomane et c'est d'ailleurs moi qui lui payait ses doses. Par respect et culpabilité, je ne désirais pas en parler. ..
· Il y a plus de 8 ans ·suemai
oui, tu as raison, mais tu en dis beaucoup... je trouve...bise. Amitées à Julie
· Il y a plus de 8 ans ·Sébastien Jalbert
tant qu'à narrer ma vie, tu as raison, autant avouer aussi mes culpabilités, possiblement m'en libérer. De toute manière, tu as rapidement fait le lien. Il en aurait sûrement été de même pour d'autres. Oui j'en dis beaucoup, ça me permet de ne pas oublier, de ne pas en crever. Je ne pourrai jamais tout juguler. Julie te passera sûrement le bonjour. bise
· Il y a plus de 8 ans ·suemai
oui, j'y compte bien bye
· Il y a plus de 8 ans ·Sébastien Jalbert
y a des jours où je le trouve chouette ce site ;-)
· Il y a plus de 8 ans ·julia-rolin
alô Julia, je partage ton avis^^ pour tous. C'est tout un compliment et dire que je te lis à peine ou pas du tout. Parfois et souvent je me troue d'une grande concentricité. Je vais remédier à la situation. Bisous, Sue+++
· Il y a plus de 8 ans ·suemai
Je rejoins les 3 commentaires des 3 personnes ci-dessous: Life,Alice,Patrick. Moi c'est Philippe.
· Il y a plus de 8 ans ·effect
alô cher Philippe, voilà qui m'étonne et pas à la fois. Le doute règne en maître dans nos sociétés, surtout ces pixels, qui tout à coup nous parlent comme ça... pas de futilité à se perdre dans le non-dit, le non verbal. Ces attitudes à décoder chez les autres, quelle ennui. Donc, te voilà rassuré, en partie, sur une certaine existence, et moi heureuse que tu le sois. grosse bise, Sue+++
· Il y a plus de 8 ans ·suemai
voila qui est dit et bien dit,, merci sue !
· Il y a plus de 8 ans ·Patrick Gonzalez
alô Patrick, tant mieux si ça peut écarter toutes ces suspicions qui grouillent autour de moi. Un peu de transparence ne fait de mal à personne. De toute manière, toute cette histoire se retrouve dans mes journaux. Tu crois que je souffre de narcissisme ? :-)) Bises, Sue+++
· Il y a plus de 8 ans ·suemai