Premiers plaisirs funestes

marcelle-adenydd

Je me retrouvais acculée. Il me tenait. A chacun de mes mouvements, il m'enfonçait un peu plus dans ma peur. Celle de faire le mauvais geste au mauvais moment causant ainsi ma perte. Coincée, je tentais toute fois de riposter. Frappant ça et là, je m'aperçus qu'il était plus faible que moi, où alors mon esprit et instinct de survie me jouaient des tours. J'augmentais toute fois mes coups, accélérais le rythme, le touchant toujours plus fort. A mon tour, je le faisais reculer, si bien que très vite, il se retrouva en position de faiblesse. Profitant de mon avantage, je le blessais. Toute ma haine, ma colère sortait à travers mes impactes. Bientôt, je vis du sang jaillir de son nez et sa bouche. Un filet fin coula et je sentis en moi une étrange excitation monter. Je prenais du plaisir à voir se déverser tout son liquide vital. Cette couleur, d'un rouge intense, semblait briller dans cette nuit sans lune. Ne pouvant détacher mes yeux de ce merveilleux spectacle, je me mis à cogner cet homme encore plus violemment. Son visage devint rapidement gluant de sang. Maintenant, l'odeur de ce vin rouge me chatouillait le nez, provocant chez moi des accentuations de mon plaisir nouveau. Chaque inspiration déferlait en moi une poussé d'extase. Je ne me contrôlais plus.

Voir ce mâle atterré devant moi, encaissant tous ces chocs sourds me procurais une envie telle que je ne pouvais m'arrêter. Je frappais alors joignant à mes poings des coups de pieds. A nouveau son corps se fit fontaine de jouvence pour mon plaisir; crachant son sang, il ne ripostait plus. Ces bleus accroissaient encore et encore, ils devenaient de plus en plus foncés. A force de répéter mes attentats aux mêmes endroits, sa peau explosa sous la pression de son sang. Ses bras, ses jambes, son estomac, son dos et son visage n'étaient plus que boursouflures et rivières rouges. Ne me lassant pas de ce qu'il m'offrait, je continuais de l'observer en train de se contorsionner pour amoindrir sa douleur. Dès qu'il cessait de se mouvoir, je le frappais avec force. Mon excitation n'était pas entièrement satisfaite cependant. Je réfléchissais au moyen d'atteindre l'extase. Je mis le doigt dessus très vite. Me penchant, je m'approchais de son oreille pour lui murmurer «Ce fut un moment délicieux, merci». Puis ma bouche glissa sur ses lèvres sanglantes et y déposa un long baisé. Cependant que mes mains appuyaient sur son corps douloureux, lui arrachant un gémissement d'horreur. Il le sentait, il vit sa mort arriver à grands pas. Mais je n'avais pas encore été satisfaite, j'étais à deux doigts d'obtenir mon bonheur. Je décidais donc de sucer sa lèvre inférieure, aspirant son sang. J'avalais de nombreuses gorgées de son vin vital, peut être même des litres. Je sentis son corps avoir des soubresauts sous le mien. Le moment d'extase arriva en même temps que sa fin.

J'avais aspiré sa vie jusqu'au bout.

Soudain, je pris conscience de ce que je venais de faire. Sortant de cet état second, car évidemment je n'étais plus moi-même, je me redressais et regarda ce corps gisant à mes pieds à la fois horrifiée et satisfaite, encore sous le plaisir de cet acte que je venais de commettre, un bien étrange sentiment, toute fois, mais que j'appréciais. Je me demandais si je serais capable de recommencer. Pour la première fois de ma vie, j'avais pris le souffle de quelqu'un et quelque chose au fond de moi me disais que je le ferais encore. Je venais de mettre au monde une créature immonde qui dévorerait quiconque se mettrait sur son passage et cette révélation m'effraya.

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