Prêtrise rime avec traîtrise.

Hervé Lénervé

Je vous avais dit que j’étais rentré dans les ordres. Ça ne m’a pas plu, trop de désordre.

Je voulais être prêtre, non par vocation, encore moins par dévotion, mais pour pouvoir fréquenter ma nonne sans que son honneur en soit bafoué. C'était tout au mien, d'honneur, car je n'avais pas l'âme d'un curé. D'ailleurs, je ne connaissais pas très bien et même pas du tout, ce que l'on pouvait entendre par « âme » ? Le concept manquait de transparence dans l'image d'une évanescence spirituelle.

Hormis les sessions obligatoires de théologie, les messes à répétition, matines, vêpres, prime, tierce, sexte, pour nous empêcher de penser par nous-mêmes, de réfléchir par les mêmes et nous conditionner dans l'orthodoxie règlementaire. Lavage du cerveau de toutes sectes. Hormis toutes ces corvées militarisées, je cherchais ma nonne.

Je connaissais le quartier des sœurs, là où elles couvaient leur vertu dans leur couvent bien fermé, (mais dont j'avais copié la grosse clef de la solide grille). Elles se faneraient là, les bonnes-sœurs, chacune dans une cellule minuscule et spartiate avec pour seule décoration le crucifix règlementaire, H. : 30cm, L. :15cm, Ep. : 2.3cm, made in China. Je devais trouver le donjon de mon enjôleuse princesse, engeôlée vivante, je l'aurais cherchée jusqu'au Pandémonium, ma nonne. A force d'indiscrétions et en procédant par élimination, trois cellules me paraissaient ne pouvoir qu'être son « home no sweet home ». J'aurais encore pu peaufiner ma recherche, mais je n'en tenais plus, l'envie d'enfin la revoir et d'enfin en finir aussi avec cette farce grotesque quotidienne. Donc, j'optais pour : « le hasard fait bien les choses », plutôt que de demander le renseignement à l'autre du haut qui ne répond jamais, je n'avais plus de temps à perdre.

Je mis à profit la nuit entre deux messes pour forcer la première cellule dument repérée par une croix rouge tracée de mon sang sur la porte. Je vis le lit, les draps blancs monter et descendre aux rythme de ronflements pachydermiques. Ce ne pouvait être mon ange éthéré, non, impossible ! Pourtant, je me rapprochais pour écarter définitivement cette horrible hypothèse. Ouf ! C'était la grosse sœur barbue que j'avais déjà croisé une fois, en la saluant d'un « Bonjour mon père ! »

Il me restait assez de temps avant que ne sonne les matines pour trouver ma nonne, pour visiter la deuxième cellule. Donc n'écoutant que ma parole, puisque non accompagné, j'y allais en tapinois, car mon tapis volant était en panne. Le souffle court et suspendu, mais pas suspendu haut et court, quand même, j'ouvrais, (imparfait justifié par la lenteur avec laquelle j'ouvrais cette putain de porte qui grinça tout de même). Réveillant l'abbé surpris dans ses songes et entre les cuisses d'une nonne qui par chance pour lui, n'était pas la mienne, mais une vulgaire nonne quelconque, du tout-venant par Dieu, notre Père qui n'est pas par terre !

Allez la dernière sera la bonne, celle de ma nonne, ma madone, mon icône, condition sine qua non de ma sélection.

Le souffle court… non j'ai déjà écrit ça ! En apnée, alors, j'ouvrais… et par quel prodige, quel miracle, n'ayons plus peur du mot. Elle se tenait droite à m'attendre depuis si longtemps, que, si elle n'avait pas été Elle, mais qu'autres communes, elle aurait été tordue par des crampes atroces.

Elle m'ouvrit ses bras et moi, je fermai la porte, en vous privant, ipso facto, de voir la suite… dommage ! Pour plus de détails pornographiques ou seulement érotiques, voir ailleurs, cela ne manque pas dans le coin. (Le site a dû être racheté par un sex-shop.)

Nous nous enfuîmes à l'aube quand chantent les vêpres, courant dans la brume des champs comme des enfants, le cœur empli de l'espoir d'avoir osé, à la limite de la résilience par l'allégresse.

Nous courûmes à en perdre nos peines en chantant à tue-tête, sans plus personne planant, vautours, sur nos crânes. Ni abbé, ni curé, ni moine, ni Jésus ni son présumé père… libérés des morales qui emprisonnent chacun dans ses dogmes, nous étions libres de tout.

Seul l'Amour sauve ! Le reste n'est que vent dans les ailes des moulins d'avant.

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