QUAND J'S'RAI KO

Isabelle Revenu

*•.¸¸.•.♪♫

 Quand j's'rai KO

descendu des plateaux d'phono

quand j's'rai en bas 

poussé par des plus beaux, des plus forts que moi

est-ce que tu m'aim'ras encore

dans cette petite mort ?

•*¨*•.¸♫♪♥

 

Cette petite mort...

Celle dont je rêve de me revêtir un jour. Une fois seulement....

J'ai un pote de comptoir. Un de ces gros nazes qui trainent les coudes sur le zingue à la recherche de son moi profond. Qui confond sa vie, ses amis avec les traine-bouilli des samedi soir sans gloire.

Sans envie. 

Qui déblatère sur l'existence avec des lieux communs, des phrases toutes prêtes à l'emploi.

Des mots navrants. Comme lui.

- Bordel de merde ! Elle est Johnny la jeunesse.... Faudrait un  jour une p'tite guéguerre pour débarrasser le quartier de tous ces glandeurs, ces fauteurs de trouble. Hein Mimile ?

- Ah fais excuse mon gars, moi c'est Freddie.. Mimile est parti en remettant sa tournée.... Finis ton verre, je remets la mienne et je m'escape. J'm'arrache, la planète va pas s'arrêter de tourner passque chuis plus là...

Et boucle-la un peu, la guéguerre, ça commence petit et ça termine toujours dans une vallée de larmes. Capito ?

- T'es un pote toi un vrai ! Oh, voilà, hop c'est vide...Hep patron ? La même chose ! Hé Freddie ? Je l'emmerde moi la planète ! 

Les gars qui n'ont d'horizon que la ligne de flottaison entre la pomme d'Adam et les premiers symptômes de l'ivresse addictive, ne reconnaissent leurs vrais amis qu'en fonction des tournées d'apéro. De leur générosité à refaire sans cesse les niveaux.

Je ne tiens meeting au bistrot que les grands soirs de déconvenue. Lorsque la solitude se fait trop insistante. Ou quand les déceptions s'enchainent à moi comme les tentacules d'une pieuvre indélogeable. Et la désespérance trop colle-au-cul.

C'est vrai alors que mes amis changent de physionomie.

Ils deviennent fût de bière, Jéroboam, tonneau en perce, cru de médiocre facture....Ardoise....

Ils se muent en mégot de blonde à moitié consommée, se consument morts de soif en dissertant sur les plaies de l'Humanité toute entière. Apportent remèdes de soiffard et conseils de poivrot à qui veut les écouter patiemment.

Ils déversent sur leur vie un regard tellement éteint que je me demande ce que je branle là, en pleine nuit, avec eux.

Ma chemise tachée à ras bord de relents aigris. Et de morosité crasse.

- Patron, c'est la mienne celle-là. Je paye et je vais voir si Morphée m'attend...

- Putain de veinard de Freddie de mes deux...T'es mon pote, mon vrai...je t'aime !

Attends, reste encore !

Non merci...Moi j'aime la vie, le grand air et l'odeur des lavandes.

Les bistrots de chez trop, ça me fait gerber....


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