Ribaldie (2) Le griot

Susanne Derève


Autrement le Verbe, autrement les Mots.
Je parcourais le monde tel un griot superbe,
Abreuvant les nuées de mes songes imberbes,
Et je tirais de l'or de mes moindres émois.
 
Mon penchant pour l'alcool et le shit
Ne faisait pas mystère ;
D'autres ont fêté l'absinthe que l'histoire révère
En d'absurdes transports jusque chez les bourgeois.
 
Néanmoins, mon caractère fantasque s'accommodait mal
De cette encombrante gloire.
En mon âme et conscience, il me semblait déchoir,
Et mes rêves eux-mêmes en devenaient étroits.
 
Mon naturel, n'était-ce pas  de tutoyer les cieux ?
De ces billevesées, de cette fièvre, je n'avais cure ;
De cette populace exigeante et obscure,
Qui, telle une sangsue se cramponnait à moi.
 
Je repris la route au printemps.
Les premières giboulées ne me firent pas de mal,
J'avais déjà rejoint l'herbe d'un petit val.
J'y dormis comme un roi.
 
Loin des ghettos, des tripots, des champenoises,
Qu'attendais-je couché en ce lieu idéal ?
A taquiner les Muses – et j'étais leur vassal -
Seul, enfin seul, j'y retrouvai la voix.
 
 
 
 
 
 
 
 
(Printemps des poètes 2012)
Signaler ce texte