Roi

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Ami, la brise alcaline souffle sur tes plumes, fait s'envoler les mots et éclore quelques fleurs de lys. Quelques rayons transpercent les perles bleues s'y étant installées et piquent ton regard curieux.

Tu t'avances prudemment sur les dalles de ton jardin pour sentir le parfum épuré de ces belles de cour.

Ces dames valsent gaiement pour ton bon plaisir et celui du roi. Mais tes pensées nébuleuses te donnent des allures de prince en velours sombre...


Pourquoi cette odeur d'ambitions et de rêves putrides à tes pieds ?


Ta foule d'admiratrices, pourtant dévotes, t'exaspère, mais les plaisirs et les conventions imposent le respect des mondanités.

Parfois mélancolique et ennuyé, tu te souviens et me jettes un regard discret. Et je suis terrifiée du bonheur passager que me procure ton attention...

Alors, ta favorite ne manque pas de me rappeler que l'on ne peut pas tomber amoureux de quelqu'un que l'on ne connaît pas. Il convient seulement de pouvoir s'en enticher.


Alors, le roi s'entiche-t-il à se vautrer dans n'importe quels draps ?


Lesquelles dessines-tu ?

Pour lesquelles chantes-tu ?

Pour laquelle écris-tu ?


Et toi, en roi des vers, tu poses tes phrases comme tu poserais tes douces paumes sur l'épaule d'un être fragile et patientes, charognard des affections, tapis dans son ombre... Et toi, tu renies l'Apollon pour n'être que le semblable d'Hadès et te délecter de chacune des lettres que je pose à la poussière de tes pas...

Tu les piétines sans les voir, n'entends qu'un vague craquement d'os, une brève compression sourde de chair. Comme l'entichement s'agglutine et colle à ta semelle, tu t'arrêtes et arraches le résidu. Un pétale de lys tombe. Quelques regards furtifs. Personne. Un bruissement de feuilles. Tu t'empresses de le gober goulûment.

Mots bruts, sans mastication. La faim dévore même les plus simples et bienveillantes affections.


Mais voyons, ne rampe pas !

Je te donnerai malgré tout et malgré moi ce que ton avidité recherche...

Reste digne. Je le ferai. Pour toi.

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