Soleil à l'orange à Québec

Le soleil de la capitale éclairait un ciel de bleuets suaves. Québec soufflait ses dernières chaleurs d’août et la journée était ravissante de clarté. La ville pétillait comme un soda en moussant de rires et d’explorateurs en vacances. Ça sentait la fraise de fin d’été et le blé d’inde sucré. La rue Saint-Jean souriant de voir cette belle journée, était colorée d’étalages de livres d’époque, de disques usagés et de vêtements de friperie.

                Deux jeunes femmes en début de vingtaine étaient venues passer la fin de semaine dans la petite ville, en provenance de Montréal. Elles adoraient Québec pour sa joie, sa simplicité et sa culture délicieuse. Elles se promenaient donc sur la rue Saint-Jean, quelques bouquins d'occasion à la main et quelque folie à la tête. Un passe-temps qu’elles entretenaient depuis l'enfance était d’effacer les lettres faites à la craie sur les ardoises devant les cafés. Créer des fautes d’orthographes, changer les prix, changer les mots, c’étaient toutes les choses amusantes que les deux jeunes femmes avaient découvertes puis cultivées dès le plus jeunes âge.

                À Québec, donc, elles décidèrent de se subordonner à leurs envies de retomber en enfance et effacèrent des lettres et des chiffres et des accents et des virgules, partout devant les restaurants de la rue Saint-Jean. Un esclaffement incontrôlé les prenait chaque fois qu’elles terminaient leur crime bonbon.

                À bout de course et à bout de souffle, elles choisirent la dernière victime de leurs plaisanteries. C’était un café qui faisait le coin d’une rue. Elles se mirent à effacer ce qu’il fallait sur l’ardoise noire, où un menu austère indiquait boudin rouge et patate chaude.  À peine avaient-elles  achevé leur besogne qu’elles virent un employé, ou était-ce le patron, arriver du coin de l’œil et se mirent à courir en laissant s’échapper des rires de sucre-glace.

Tout à coup, deux coups stridents se firent entendre, puis le silence.

Sur la rue Saint-Jean, deux jeunes femmes étaient au sol, les lèvres jusqu’aux oreilles, les yeux rieurs fixant le ciel, la tête baignant dans du sirop de framboise. 

Alex

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Copyright Alexandra Harfouche