Talents cachés.

flolacanau

Il paraît que j'ai des talents cachés, le principal étant, sans doute, celui de ne pas les exposer. Je sais bien que le loser est passé de mode, mais j'ai jamais été très tendance et dès qu'il s'agit de me pencher sur ma personne, c'est en chirurgien désabusé que j'opère. Je m'appesantis sur ce qui déconne et je tranche dans le vif. Mollesse, inertie, viscères anarchiques, tout me paraît bancal, alors je taillade puis je cautérise. Pas d'auto-mutilation, hein ? Je vous l'ai dit, je ne suis pas tendance, mais un examen de conscience que je rate le plus souvent. Pour certains, c'est une posture, pour moi, un art de « mévivre ». Dès qu'une opportunité apparaît, vous pouvez être sûrs que mes yeux se tourneront vers l'impasse. Je suis sans cesse percuté d'idées parasites. Tenez, un exemple frais (on dit « premium » quand on est con) : l'impasse. Doit-on donner le nom d'une célébrité à une impasse ? C'est quand même une route ratée, une impasse. De fait, il faudrait lui accoler un patronyme en rapport et non celui d'un artiste ayant marqué son temps. Je vous vois venir… Vous pensez que je songe à truster les impasses et les voies de garage pour assurer ma postérité, mais il n'en est rien. Je me fous de la postérité à peu près autant que de la collection printemps/été en cours. Je stoppe là l'exemple. L'esprit se balade, glandouille, et les opportunités dont on sait qu'elles ont la patience d'un frelon en colère, s'envolent vers un support plus accueillant et moins distrait.

Je n'envie pas les gens mus par un fil conducteur pour autant. Je crois que c'est pas mon truc. Je m'ennuierais à viser le but. Pas plus la carotte que le bâton. Le but, c'est l'expression du vide. L'important, c'est le chemin dit-on… Moi je pense que l'important, c'est la friche. Le chemin, c'est déjà un signe d'exploration antérieure. Je vis donc le monde, comme entouré de ronces, d'orties, et autres plantes urticantes Je me perds dans leurs intrications, je m'écorche au quotidien, pas au point de me construire une couronne d'épines. Gamin, je voulais, comme beaucoup, être archéologue, voire géologue en plan B. J'ai développé la patience, la résistance à la frustration, la solitude et me suis séparé sans grand regret de l'emprise du temps. Alors qui sait ? Un jour peut-être irai-je à la recherche de mes talents cachés ? Enfouis, ensevelis, plutôt. Les glissements de terrains et les sédiments n'ont pas rendu la tâche facile. Je délaisse l'image du chirurgien pour celle de l'aventurier scientifique, vêtement couleur sable. À coup de pioche et de plumeau, j'attaque la surface censée receler des trésors. Être l'inventeur de soi-même, merde ! Ça ressemble à un but ! Serais-je donc comme tout le monde à courir après quelque-chose ?

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