Train

Son regard se pose sur elle.

Au loin, un tressautement de coeur. Un frisson la parcourt. Est-ce lui ? Est-ce le bon ? Un sourire ?

Et puis non. Mauvaise pioche.

A bien y regarder, inutile de rêver.

Pourtant son visage lui semble connu. Brun, yeux marrons, cheveux joliment peignés, barbe de quelques jours, allure relativement soignée dans son manteau d'hiver. Peut-être déjà vu. Ici. Dans la rame qui fend l'air et la bruine à vive allure.

Mal des transports ou mal d'aimer. Son camp n'est pas difficile à trouver. Sans se sentir chez elle dans le train, elle a ses petites habitudes.

Combien de jours encore, combien de voyages assise ainsi seule, entourée de visages qui semblent tantôt familiers, tantôt impénétrables ? Combien de fois aucune main virile à serrer, aucun doigts avec lesquels jouer pendant le trajet ? Aucun cou où loger son nez, ses lèvres ?

Elle se contente de croiser les regards de parfaits anonymes, tend son sourire à qui veut lui renvoyer.

Pas d'humeur, pas le bon jour pour cette jeune femme. Un air malicieux par-ci, une esquisse de lèvres amusées par-là...

Il l'a à nouveau regardée. Etait-il seulement dans ses pensées ?

Pas le bon moment.

Garder l'espoir, se dire que la flamme saura être allumée par un être fait pour elle, qu'à terme, il faudra la raviver, la faire briller encore plus fort, toujours plus fort.

Fin du voyage. Déjà. Fin du rêve. Ah bon ? Retour sur terre. Et tous ses pièges.