Travaux manuels 2

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Monsieur le Président, Emmanuel, Manu,

 

Que s'est-donc passé ce samedi dans les jardins de l'Elysée ? Un instant, je me suis demandé si vous n'aviez pas fumé de la ganja issue du Fort de Brégançon !

Il est facile d'alpaguer un jeune en galère par des poncifs qui frisent les railleries du Café de Flore. Le pauvre petit gars, il était tétanisé de subir les foudres de Jupiter, noyant ses espoirs de réaliser un jour son rêve, cultiver modestement son petit jardin par le beau métier d'horticulteur.

Il suffit de traverser la rue pour trouver un travail boulevard du Montparnasse. Soit. Dites-moi Manu, vous en connaissez beaucoup des serveurs ou des plongeurs qui, une fois leur travail terminé, traversent la rue pour aller se reposer dans un de ces ateliers d'artistes qui firent la renommée de Montparnasse ?

La réalité est toute autre. Une fois leurs tâches terminées, il y a une grande (mal)chance qu'ils aient à  emprunter le Noctambus en direction de Sevran ou d'Evry. Personnellement, il m'est arrivé de le prendre deux ou trois fois, après avoir loupé le dernier métro pour avoir emmerdé le garçon, l'air déconfit et regardant désespérément sa montre, dans l'attente qu'il me serve une dernière bière. Je peux vous assurer que croiser le regard hagard de pauvres hères harassés m'a fait décuver, tant je me suis senti mal à  l'aise, non pas par les odeurs de transpiration qui s'en dégageaient, mais par un sentiment de culpabilité.

A l'époque, j'habitais Saint-Denis. Et, Manu, je vais vous faire une confidence. Il y a dix-huit mois, je n'ai pas ménagé ma peine pour arpenter les cités dyonisiennes qui, derrière les doux noms de Floréal ou de Bel-Air, cachent une misère dont vous n'avez pas la moindre idée, pas plus que moi avant de la découvrir : des enfants de fainéants, enfermés toute la journée, voire toute la nuit, pour qu'ils n'aient pas à  côtoyer les caïds au bas de leur immeuble quand leurs parents se tuent à  la tâche, vidant les poubelles des bureaux parisiens ; des Mohamed, Rachid ou Mamadou, Master 2 en poche qui se font livreurs de pizzas, leur CV rejeté du fait de leur nom et de leur lieu de résidence qui les mettent automatiquement au pilori. J'y croyais moi, à  votre révolution, d'une société enfin plus égalitaire.

Manu, descendez de votre immodeste Mont Parnasse. Méfiez-vous qu'une douce colombe, fatiguée de vos propos hors-sol, ne vienne un jour vous balancer une fiente lyonnaise.


Bien à  vous.

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