Tribulations d'une fille sur un balcon.

Les gens, ils ont toujours quelqu'un à qui se confier. Et si, malheureusement pour eux, ils n'ont personne, ils le font à un journal, à un chat ou à chien.

Moi, j'ai choisi mon balcon.

Peut-être parce que, quand je sors le soir sur ce petit bout de béton, que je lève la tête et que je vois cette grande toile obscure à laquelle sont accrochées des milliers d'étoiles qui semblent danser, que le vent frais caresse mon visage, que je peux sentir le vide sous mes pieds, perchée au huitième étage avec pour seule protection de la chute un morceau de fer ouvragé, que même le bruit de la ville me paraît lointain, que la lune me sourit avec bienveillance, comme une mère aimante, je me sens bien, encore mieux qu'à n'importe quel autre endroit au monde, et qu'avec n'importe qui.

La clope au bec, mon vieux plaid sur les épaules, je viens sur mon balcon tout les soirs. C'est mon rituel avant d'aller dormir. Chaque soir : aucun n'échappe à la règle. Même après une soirée trop arrosée, même si quelqu'un est chez moi - ce qui est rarissime -, même si je suis malade. C'est mon rendez-vous quotidien que rien ni personne ne m'enlèvera.

Car je ne sais pas ce que je ferais sans lui. Mon trop plein d'émotions de la journée, il faut bien qu'il sorte un moment ou à un autre. Sinon, c'est comme si on amorçait une bombe sans savoir quand elle explosera : c'est un jeu dangereux, quelqu'un en paye toujours le prix.

Autant que ce soit mon balcon. A ce jour, il connaît tout de mes joies et de mes peines. Il m'a vu dans tout mes états. Euphorique à l'annonce de ma promotion. Anéantie lors de la mort de ma mère. Amusée d'une sortie entre copains qui a mal tournée. Furax lorsque j'ai appris la liaison de mon copain avec ma meilleure amie. Tout, il sait tout.

Et il restera encore longtemps mon confident, tant que personne ne sera prêt à venir me sortir de ma solitude, toute l'écoute qu'elle pourra me porter sous le bras.