Tu me fais marcher, là !

Hervé Lénervé

Inspiré d’un commentaire fait à yl5.

Avant, mais il y a longtemps, les hommes suivaient les femmes pour les draguer, c'était con, certes, mais c'était ainsi ! Ils se disaient :

J'aime, donc je suis.

Dote-moi de défiance,

Tu ôterais à ma vie

Toute consistance*.

*On peut substituer à consistance : conscience, sens, existence, assurance,  concupiscence, cucurbitacée, mais pas autruche. Car l'Autruche est à maruki, ce que la cucurbitacée est à autrui.

Bon les hommes suivaient, ce qui est un peu con, car pour aborder une femme, il ne faut pas se contenter de la suivre à distance respectable, mais courir après pour la rattraper.

Maintenant, c'est un fait, si vous courez après quelqu'un, celui-ci va, par mimétisme, se mettre à détaler aussi et cela d'autant plus vite, si vous criez : « Attendez ! Attendez ! » De toute façon, ce sera toujours plus vite que vous, car la peur donne des ailes.

Remarquez que l'on dit aussi qu'elle paralyse, la peur, comme quoi, on dit beaucoup de conneries qui se contredisent et s'annulent ipso facto. Comme de requoi, on ferait mieux de ne rien dire du tout. Maintenant, on se ferait chier et ce n'est pas dans notre nature. Je veux dire « de se taire » pas « de se faire chier un max » ça j'en sais quelque chose.

Mais je m'éloigne du sujet qui nous échappe et ne suis pas prêt de l'aborder la greluche.

Donc, les hommes suivaient à distance l'élue de leur vue, mais vue de loin.

Un, pour être remarqué d'elle.

Deux, pour montrer qu'ils savaient marcher, eux aussi.

Trois, qu'ils avaient une bonne et longue vue, pour ne pas se tromper dans la foule.

Quatre, qu'ils étaient fidèles pour ne pas bifurquer sur une autre donzelle de passage, moins rapide.

Cinq, qu'ils ne connaissaient de l'ingénue que le dos et prenaient le risque d'être déçus, si elle avait une face.

Six, non ! Il n'y a pas de six.

Eh, ce n'est pas un jeu de dés, mais un jeu de dupe. Car si la fille s'arrêtait, l'homme devait faire semblant de s'intéresser à toute autre chose qu'à la fille. Un lacet dénoué par exemple. Celui qui avait chaussé des mocassins était un novice-profane de la drague pédestre. Si la demoiselle s'arrêtait pour faire du lèche-vitrine, le suiveur s'arrêtait, pour ne rien faire du tout (le lèche-vitrine était exclusivement féminin*) et passait pour un con.

Tant pis, c'était comme ça, chaque époque, ses us et coutumes.

Cet usage cessa, après qu'une plainte fut déposée par une association de vieux garçons culs de jattes pour pratique discriminatoire de la séduction et les cavaleurs oublièrent le sport, burent de la bière et devinrent obèse par abstinence de baise.

***

Aujourd'hui, ce n'est pas plus simple.

-         Tu m'kiffes ?

-         Dégage, bouffon !

Echange qui peut être réalisé par SMS en appel groupé avec l'avantage de prendre 100 râteaux pour 95 contacts en un seul clic.  

Pas plus simple, certes, mais plus rapide, quand même, la cour de nos jours ! Que voulez-vous, on n'a plus le temps de rien dans ce monde d'énervés.

*Il fallut attendre la survenue des grands magasins parisiens pour que les entrées soient libérées dans les petites boutiques. De ce temps, entrer dans une échoppe, c'était l'obligation d'y acheter un truc, non mais alors ! C'est la raison pour laquelle on pouvait encore lire, au siècle dernier, sur de vieilles façades de petits commerces, l'indication saugrenue « Entrée Libre ».

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